Le déposant, une personne physique résidant aux Etats-Unis, avait déposé une requête en restitutio in integrum suite au non-respect des délais pour former le recours et déposer le mémoire de recours contre la décision de rejet de sa demande.
Les déclarations soumises ne permettent pas de conclure que le cabinet américain, travaillant en liaison avec le mandataire européen, disposait d'un système de surveillance des délais satisfaisant, avec double vérification, et qu'un système de supervision des assistants était en place. La Chambre en conclut qu'il n'a pas été fait preuve de toute la vigilance requise.
Bien qu'une procédure orale ait été demandée, la décision est prise par écrit.
La Chambre rappelle qu'une requête en restitutio doit être formée par écrit dans un certain délai et que la requête doit être motivée. Le cadre de fait ne peut être modifié après l'expiration du délai (principe de concentration des moyens). Ce n'est que lorsque la justification est complète dans le délai prescrit qu'il est possible de compléter les faits et preuves dans des soumissions ultérieures.
Dans ce contexte, une procédure orale n'aurait servi aucun objectif légitime.
Dans le présent contexte, la procédure orale n'a pas pour but de donner une opportunité supplémentaire pour étayer les affirmations factuelles ou fournir des preuves.
Il ne fait pas de doute que la procédure orale telle que garantie par l'article 116(1) CBE est une pierre angulaire de la procédure devant l'OEB. Mais ce droit n'est pas absolu: il est soumis à des restrictions selon la CBE (articles 116(1) et (2) CBE) et les principes de procédure généralement admis dans les Etats contractants.
Certaines limites ont aussi été admises par la jurisprudence par exemple dans G2/19 (B.II.3 et B.II.5). Dans les différentes décisions citées, une procédure orale aurait indûment prolongé la procédure, allant ainsi à l'encontre des exigences de sécurité juridique sans pour autant servir un objectif légitime (J6/22).
La Chambre applique également le principe "d'interprétation dynamique", prenant en compte certaines modifications depuis la signature de la CBE, notamment l'évolution de la restitutio in integrum, le nombre important de recours, avec un intérêt des parties prenantes à voir les affaires jugées rapidement, et l'évolution du principe du droit à un procès équitable dans le droit international et européen des droits humains.
Sur ce dernier point, la Chambre cite plusieurs décisions dans lesquelles la CEDH a jugé qu'une procédure orale pouvait, voire devait, être supprimée. La CEDH a notamment pris en compte le fait que de nombreux Etats sont confrontés à des retards considérables dans des systèmes judiciaires surchargés, entraînant des procédures excessivement longues. Il en va de même pour la CBE en tant qu'épine dorsale du système européen des brevets qui, de par sa nature et sa finalité, opère dans un domaine hautement dynamique et innovant, et qui requiert une approche dynamique et évolutive correspondante.
La Chambre en conclut qu'une interprétation littérale de l'article 116(1) CBE irait à l'encontre des objectifs du législateur lorsque la procédure orale ne sert à rien et ne ferait donc que prolonger la procédure au détriment de tous.
L'objectif même de l'article 116(1) CBE peut être résumé comme prévoyant le droit essentiel d'être entendu dans le cadre d'une procédure orale uniquement dans la mesure où celle-ci poursuit un but légitime et ne va donc pas à l'encontre du besoin de sécurité juridique en temps utile, en tant qu'autre élément essentiel d'un procès équitable pour toutes les parties.