Un confrère amateur de jurisprudence me signale la décision T580/06.
Alors que le délai pour former un recours expirait le 18 avril, le requérant a formé un recours le 13 avril, en joignant un ordre de débit de la taxe de recours par prélèvement sur un compte courant.
Là où le bât blesse, c'est que ledit compte courant, le 13 avril, n'était pas suffisamment approvisionné.
Dans de pareils cas, la Réglementation applicable aux comptes courants (RCC) prévoit un remède : l'OEB notifie le problème à l'intéressé (Art 6.4), et si ce dernier réapprovisionne le compte et paye une taxe d'administration dans un délai d'1 mois à compter de la réception de la notification, le paiement est réputé effectué à la date de réception de l'ordre de débit initial (Art 6.5). A défaut de paiement de la taxe d'administration dans le délai, le paiement est réputé effectué à la date où le compte courant a été suffisamment approvisionné (Art 6.7).
Dans le cas d'espèce, le compte a été approvisionné le 20 avril (donc après l'expiration du délai de recours), mais sans paiement de la taxe d'administration.
Le 24 avril, l'OEB envoie par fax la notification prévue à l'Art 6.4 RCC, mais dans le délai d'1 mois, aucune taxe d'administration n'est payée.
Pour l'OEB, la date de paiement est donc le 20 avril (application de l'Art 6.7), et le recours est donc réputé non formé.
Le requérant conteste, car il affirme n'avoir pas reçu le fax. Or si le fax n'est pas reçu, le délai d'1 mois ne court pas.
L'OEB estime au contraire que, le rapport de transmission du fax indiquant "OK", le fax a bien été reçu. L'Art 6.4 RCC autorise l'envoi par fax.
Pour la Chambre, la technologie de la télécopie est maintenant extrêmement fiable. Selon le protocole de communication utilisé, c'est le récepteur qui envoie la confirmation de réception. Au point 1.4.2, la Chambre estime que "l’OEB supporte les risques de la transmission des données dans la sphère du récepteur. Une fois que le fax, comme indiqué par le message « OK », est parvenu dans le domaine de responsabilité du récepteur, il y a transmission des risques, le destinataire ayant à supporter les risques liés à sa propre sphère, comme par exemple des défaillances de l’imprimante ou de la mémoire de son appareil."
L’indication « OK » doit donc être considérée comme preuve de la transmission régulière et complète, par laquelle le fax est parvenu dans le domaine de responsabilité du mandataire.
La restitutio in integrum est en revanche acceptée, s'agissant d'une erreur isolée dans un système fonctionnant habituellement de manière correcte.
dimanche 31 août 2008
T580/06 : le fax est "OK"
jeudi 28 août 2008
mardi 26 août 2008
T1102/03 - report de procédure orale
Puisque nous sommes encore en période de vacances (pour certains) voici une décision qui parle de vacances...
Dans l'affaire T1102/03 , le mandataire d'une partie souhaitait modifier la date d'une procédure orale car à cette date il comptait prendre un mois de vacances dans un hôtel suisse, pour lequel une réservation avait déjà été faite.
L'Art 15(2) du règlement de procédure des Chambre de recours prévoit que "La chambre peut, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, changer à titre exceptionnel la date d'une procédure orale sur requête écrite et motivée. Cette requête doit être présentée aussitôt que possible avant la date fixée pour la procédure orale."
Selon le communiqué en date du 16 juillet 2007 du Vice-président en charge de la DG3, des vacances ayant déjà fait l'objet d'une réservation ferme avant la signification de la citation à la procédure orale constituent un motif de fond sérieux en vertu duquel le changement de date de la procédure orale peut être demandé. En outre, toute requête en fixation d'une autre date pour la procédure orale doit contenir une déclaration expliquant pourquoi le mandataire qui se trouve dans l'impossibilité de participer à la procédure orale ne peut être remplacé par un autre mandataire.
Il n'en reste pas moins que la Chambre peut exercer son pouvoir discrétionnaire pour accepter ou non cette requête, en prenant en compte tous les aspects pertinents de l'affaire.
Dans le cas d'espèce, la Chambre a rejeté cette requête du fait de plusieurs facteurs:
- le nombre d'opposants particulièrement élevé (10!),
- une Chambre élargie à 5 membres,
- la réservation à l'OEB pour deux jours de la plus grande salle utilisable.
samedi 23 août 2008
Loi de modernisation de l'économie
La loi de modernisation de l'économie du 4 août dernier apporte des modifications substantielles au droit français des brevets.
Certains changements sont calqués sur ceux de la CBE2000 :
- Art L611-11 : brevetabilité des applications thérapeutiques ultérieures,
- Art L613-2 : portée du brevet déterminée par les revendications (et non plus par leur "teneur"),
- Art L613-24 : possibilité de limiter la portée d'un brevet français après la délivrance, auprès de l'INPI,
- Art L613-25 : posibilité de limiter la portée d'un brevet français dans le cadre d'une action en nullité. Le fait d'avoir étendu la portée est sanctionné par la nullité du brevet.
- Art L614-12 : possibilité de limiter la portée d'un brevet européen dans le cadre d'une action en nullité, conformément à l'Art 138(3) CBE. Le texte fait référence à l'Art 105bis CBE : la limitation doit-elle être réalisée devant l'OEB ?
Un breveté qui procèderait à plusieurs limitations durant une même instance de manière dilatoire ou abusive peut se voir infliger une amende civile de 3000€.
D'autre part, l'Art L613-9 est modifié. Dorénavant, un licencié peut intervenir dans une action en contrefaçon pour obtenir la réparation de son préjudice même si la licence n'est pas inscrite au RNB. L'origine en serait le Traité de Singapour sur le droit des marques qui prévoit qu'une licence non inscrite puisse être opposable aux tiers s'il s'agit d'établir un préjudice.
Enfin, la loi autorise le Gouvernement à légiférer par ordonnance, dans les 6 mois qui viennent, pour mettre la loi française en conformité avec le PLT (conditions d'obtention d'une date de dépôt, restauration, en particulier du droit de priorité...), et plus généralement simplifier et améliorer les procédures de délivrance et l'exercice des droits.
D'après le rapport parlementaire, l'établissement différé du rapport de recherche serait supprimé.
D'autres modifications du CPI sont donc à prévoir dans les prochains mois.
jeudi 21 août 2008
Le JO d'août est en ligne
Au menu du JO d'août :
- la liste des admis à l'EQE 2008
- une communication sur le programme pilote de "voie tripartite" entre l'OEB, l'USPTO et l'Office Japonais. Selon ce programme, la recherche sera effectuée par l'un des trois Offices, les deux autres utilisant les résultats. Seules 100 demandes seront concernées, qui devront revendiquer la priorité du première demande US déposée moins de 4 mois avant.
- la décision T1093/05
Dans cette affaire, une notification selon la R51(4) CBE1973 avait été émise, accompagnée d'une modification de la description. Malgré le désaccord du demandeur sur cette modification (le demandeur avait fourni une nouvelle description modifiée), un brevet a été délivré sur la base de la description modifiée par la division d'examen.
Le demandeur a requis une correction au titre de la R89 CBE1973, qui a été refusée. C'est contre cette décision que le demandeur a formé le recours.
Pour la Chambre, la délivrance du brevet malgré le désaccord du demandeur sur le texte est un vice de procédure grave car contraire à l'Art 113(2) CBE. Néanmoins, la décision ne devient pas nulle de ce seul fait, car l'OEB est lié par la décision prise, et un recours contre la décision de délivrance est nécessaire (contraire à la décision T971/06).
Or la R.89 CBE1973 (R.140 CBE) est inapplicable en l'espèce, car il n'y avait ni faute d'expression ou de transcription ni erreur manifeste. Il ne peut exister d'erreur manifeste que si le texte soumis pour délivrance n'est pas et ne peut pas à l'évidence être le texte correspondant à l'intention réelle de la division d'examen. Le recours a donc été rejeté, et le brevet maintenu tel quel.
Moralité pour les divisions d'examen : "Pour éviter ce genre de problèmes, la division d'examen ne doit proposer, dans la notification établie conformément à la règle 51(4) CBE, que des modifications dont elle peut raisonnablement s'attendre qu'elles soient acceptées par le demandeur, ainsi que le prévoient les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB, point C-VI, 15.1."
Moralité pour les demandeurs : bien vérifier que le texte du brevet délivré correspond bien au texte sur lequel l'accord a été donné.
mercredi 20 août 2008
Fusion CPI-avocats, du nouveau pendant les vacances
La CNCPI a mis en ligne sur son site un document élaboré conjointement avec le CNB, qui sera présenté à la prochaine AG du CNB les 12 et 13 septembre prochains.
Intitulé "Projet d’unification des professions d’avocat et de conseil en propriété industrielle, une nouvelle dynamique pour l’offre de services PI", ce document de 168 pages expose d'abord le contexte en dressant en particulier un portrait très détaillé des professions de CPI, avocat, spécialiste en PI de l'industrie, mandataires OEB et OHMI, et en les situant dans une perspective internationale. De nombreuses statistiques illustrent le propos (démographie, taux de réussites aux examens...)
Sont ensuite présentés les projets de textes normatifs de l'unification : modifications entre autres de la loi du 31 décembre 1971 (voir en particulier l'Art 12-1 permettant aux diplômés du CEIPI mandataires en brevets européens d'être exemptés de l'examen dit "pré-CAPA"), de la loi du 31 décembre 1990, du décret du 27 novembre 1991 (avec notamment introduction d'une passerelle équivalent à celle existant actuellement pour les CPI pour les mandataires agréés près l'OEB disposant de 8 ans d'expérience et d'une maîtrise en droit), de l'arrêté du 8 juin 1993 (ajoutant la spécialisation "conseil en propriété intellectuelle"), de l'arrêté du 25 novembre 1998, de l'arrêté du 11 septembre 2003 (ajoutant la PI à la liste des matières pouvant être choisies par le candidat à une épreuve écrite et une épreuve orale du pré-CAPA), de l'arrêté du 7 décembre 2005 (programme du CAPA).
lundi 18 août 2008
Qualité des brevets : la Commission s'en préoccupe
Après l'OEB, c'est au tour de la Commission Européenne de s'intéresser au sujet en vogue : la qualité des brevets.
Dans un document 12267/08 du 28 juillet dernier adressé au Parlement Européen, au Conseil de l'UE et au Comité économique et social, et ayant pour titre "une stratégie dans le domaine des droits de PI pour l'Europe", la Commission s'inquiète des "enchevêtrements de brevets" et des "trolls".
La Commission se fixe les objectifs suivants :
- lancer une étude détaillée sur la qualité des brevets pour analyser les risques dus aux droits de mauvaise qualité et envisager les moyens d’éviter leur présence en Europe;
- étudier l’étendue des problèmes potentiels causés par les brevets inutilisés, notamment en analysant leurs causes et en proposant des solutions.
A noter cette phrase, qui s'applique par exemple à la France : "Les États membres qui appliquent le système des modèles d’utilité et octroient des brevets sans vérifier l’activité inventive sont invités à évaluer la contribution de ces droits à l’innovation."
Dans le but de promouvoir l'accès au brevet par les PME, la Commission souhaite renforcer le rôle des modes alternatifs de règlement des conflits, comme la médiation et l'arbitrage.
La Commission se prononce également en faveur d'une harmonisation internationale du droit matériel des brevets.
La question de la qualité des brevets est également évoquée dans le dernier numéro d' "epi information" par Alison Brimelow, présidente de l'OEB, qui répond à un précédent article de Mr Rosenich, et par Francis Hagel.
Pour reprendre les termes de Mme Brimelow :
"In addition, the patent offices are increasingly facing criticism for granting too many patents for inventions with an insufficient inventive step and thereby undermining the purpose of the patent system. The inventive step requirement is meant to avoid that exclusive rights are granted for innovations that do not go beyond normal technological development. Granting
patents for developments that are within reach of the average engineer or researcher would not promote innovation but hinder innovation."
Pour Francis Hagel, la question de la qualité ne doit pas se limiter à un problème d'activité inventive, mais doit aussi englober plus largement les questions de support (limitation à ce qui constitue réellement la contribution de l'inventeur), de suffisance de description (éviter les brevets spéculatifs), de clarté, de concision (éviter les brevets fleuves). La qualité du rapport de recherche est également un élément de la qualité d'un brevet. En matière d'activité inventive, l'OEB devrait-il être plus restrictif en abandonnant le test "could/would" ?
dimanche 17 août 2008
EQE 2008
Les résultats de l'EQE 2008 sont tombés au début de ce mois.
Les statistiques font apparaître un taux de réussite jamais atteint pour les candidats français avec près de 53% de réussite pour les candidats passant l'EQE pour la première fois - first sitters - (contre 25% en 2007), et même près de 56% pour les candidats résidant en France. En prenant en compte tous les candidats, le taux de réussite atteint 40%.
Tous pays confondus, le taux de réussite chez les first sitters atteint 41,5% contre 24,1% en 2007. Sur l'ensemble des candidats, le taux de réussite est de 36%.
C'est encore une fois l'épreuve C qui s'est révélée la plus difficile, avec cette année 42% de réussite.
Le nombre de candidats first sitters de nationalité française a décrû entre 2007 et 2008, passant de 96 à 72, soit autant qu'en 2003. Les "resitters" étaient en revanche plus nombreux (137 contre 113), du fait du faible taux de réussite en 2007. Ce phénomène de diminution du nombre de candidats est général, puisqu'à l'échelle européenne, le nombre de first sitters a baissé de 100 entre 2007 et 2008, alors qu'il augmentait régulièrement année après année. Faut-il y voir une baisse des vocations ou un effet de la CBE 2000, déjà au programme de l'EQE 2008 alors qu'elle venait juste d'entrer en vigueur ?
Le Compendium est déjà disponible, mais comme en 2007 il ne présente malheureusement pas d'exemples de bonnes copies.
Comme je l'avais fait début 2008 (voir ici), je me propose de mettre en ligne sur ce blog des exemples de copies ayant eu de bonnes notes.
Si vous avez eu une bonne note (par exemple de l'ordre de 80 ou plus aux épreuves A, B, C, de l'ordre de 30 ou plus aux épreuves D1 ou D2), je vous invite à m'envoyer votre copie scannée à mon adresse E-mail. Je la publierai en respectant votre anonymat. N'hésitez pas à relayer autour de vous cet appel aux bonnes volontés.
dimanche 3 août 2008
Requête en limitation
L'OEB informe de la publication du premier document "B3", c'est-à-dire d'un brevet ayant fait l'objet de la nouvelle procédure de limitation introduite par la CBE 2000.
Pour plus d'informations, voir sur le site de l'OEB.