lundi 31 mai 2010
T349/09 : "copier-coller" interdit
La Chambre rejette le recours comme irrecevable.
Une opposition a pour but d'attaquer un brevet tandis qu'un recours a pour but d'attaquer une décision. Le mémoire de recours doit donc présenter les raisons pour lesquelles la décision doit être annulée (R. 99(2) CBE, Art 12(2) RPCR) : il se distingue d'un mémoire d'opposition.
La jurisprudence est constante : le mémoire de recours doit indiquer les raisons de fait et de droit justifiant l'annulation de la décision, fournir des arguments clairs et concis permettant immédiatement à la Chambre et aux autres parties de comprendre les raisons pour lesquelles la décision est considérée comme incorrecte, et les faits sur lesquels ces arguments se basent. Les motifs de la décision attaquée doivent être analysés en détail.
Comme l'indique la Chambre, un lien doit exister entre les motifs du recours et les motifs de la décision attaquée, et ce lien doit être explicitement indiqué dans le mémoire.
Décision T349/09
vendredi 28 mai 2010
L'invention de la semaine
FR 2.937.833
ASSEMBLAGE DORSAL POUR UN ANIMAL POUR PORTER AU MOINS UNE POUPEE
mercredi 26 mai 2010
T585/08 : restitutio et principe de la bonne foi
Ayant raté le délai pour former un recours contre la décision de rejet de la demande, le mandataire a formé une requête en restitutio in integrum, mais sans la motiver.
Il était clair dans le cas d'espèce que rien parmi les multiples écritures du mandataire ne pouvait être assimilé, de près ou de loin à des motifs.
Le mandataire a donc tenté de bénéficier du principe dit "de la bonne foi", parfois appelé principe de protection de la confiance légitime, en invoquant notamment la décision T14/89.
Selon cette dernière : "en vertu du principe de la bonne foi qui doit régir la conduite de la procédure entre l'OEB et les parties, les irrégularités manifestes qui entachent une requête en restitutio in integrum (en l'occurrence : taxe non acquittée et absence de commencement de preuve) et auxquelles il peut être facilement remédié, doivent être signalées à l'auteur de ladite requête dès lors qu'il peut vraisemblablement encore y être remédié dans le délai de deux mois fixé par l'article 122(2) CBE pour la présentation de la requête en restitutio in integrum."
La Chambre refuse l'application de ce principe, en soulignant les différences entre le cas d'espèce et le cas de la décision T14/89. Dans ce dernier cas, l'erreur était manifeste et l'expiration du délai était encore lointaine.
Dans le cas d'espèce en revanche, s'apercevoir du défaut de motivation impliquait de se plonger dans les différents courriers du mandataire, et l'expiration du délai ne pouvait être connue car le mandataire n'indiquait pas la date de cessation de l'empêchement.
Décision T585/08
lundi 24 mai 2010
Où l'on parle de chocolat, de carottes et d'oignons
Une petite décision pour mettre en appétit.
Au regard de l'art antérieur D7, qui divulgue des vermicelles en chocolat ayant la bonne teneur en graisse et la même granulométrie, la seule différence se révèle être l'aspect lyophilisé.
Le problème technique est d'obtenir un effet croustillant en bouche.
Or, il était connu de l'état de la technique que la lyophilisation apportait un effet croustillant au poisson (D26), au fromage sur les pop-corn (D28), aux chips de carottes (D29) ou d'oignons (D30), aux champignons (D31), aux morceaux de fruits et aux chips de pommes de terre (D32 et D33).
Pour la Chambre, cet art antérieur, même s'il ne concerne pas les produits en chocolat, aurait quand même incité l'homme du métier à tester la lyophilisation, en espérant une chance raisonnable de succès.
En résumé, l'homme du métier du chocolat ne fait pas preuve d'activité inventive en allant voir ce qui se passe du côté des carottes, oignons et pommes de terre.
Une illustration des principes suivants, ajoutés récemment aux Directives (C-IV 11.3) :
L'homme du métier est impliqué dans le développement constant de son domaine technique. On peut attendre de lui qu'il recherche des indications dans des domaines techniques voisins ou généraux (T 176/84, T 195/84) ou même dans des domaines techniques éloignés, s'il est incité à le faire (T 560/89).
Décision T1038/07
vendredi 21 mai 2010
L'invention de la semaine
FR2.937.226
COUVRE-CHEF AVEC SYSTEME SOLAIRE.
mercredi 19 mai 2010
T2017/07 : comment une restriction peut élargir la portée d'un brevet
La revendication 1 telle que délivrée avait pour objet :
A hair dye composition which comprises (A) an acid dye and (B) an alkylene carbonate having 3-5 carbon atoms in total, [...] wherein the content of the alkylene carbonate having 3-5 carbon atoms in total is 0.5-50 % by weight.
La revendication modifiée portait quant à elle sur :
A hair dye composition which comprises (A) an acid dye and (B) alkylene carbonate having 3-5 carbon atoms, [...] wherein the content of the alkylene carbonate is 0.5-50 % by weight, the alkylene carbonate being propylene carbonate.
Une vraie limitation à première vue.
Et bien non, cette revendication modifiée pose un problème au titre de l'Art 123(3) CBE, car la revendication étant ouverte (par l'utilisation du terme "comprenant") la teinture revendiquée peut maintenant contenir plus de 50% de carbonates d'alkylène ayant de 3 à 5 atomes de carbone, par exemple en ajoutant du carbonate de butylène.
Le breveté a résolu ce problème d'Art 123(3) CBE en ajoutant que le carbonate de propylène était le seul carbonate d'alkylène ayant de 3 à 5 atomes de carbone, pour mieux tomber dans le piège de l'Art 123(2) CBE, la seule base à sa modification étant quelques exemples.
Le remplacement de "comprenant" en "consistant" est également jugé contraire à l'Art 123(2) CBE.
Décision T2017/07, déjà commentée sur les blogs K-s Law et EQE Tools.
lundi 17 mai 2010
Inventions mises en oeuvre par ordinateur : nouvel ouvrage
"Patent Law for Computer Scientists, Steps to Protect Computer-implemented Inventions" est un nouvel ouvrage consacré à la brevetabilité des inventions mises en oeuvres par ordinateur.
Rédigé par quatre examinateurs de l'OEB travaillant dans le domaine, ce livre est conçu comme un véritable guide pratique sur les moyens d'obtenir une protection sur ce type d'inventions dans les principaux Offices de brevets.
Principale originalité de l'ouvrage : la majeure partie (plus de 130 pages) est consacrée à des études de cas concrets. Après une description des éléments pertinents des diverses inventions, des revendications sont proposées et les auteurs commentent en détail les différentes objections pouvant être soulevées ainsi que les chances d'obtenir un brevet dans les différents Offices.
Un grand nombre de cas sont proposés dans différents domaines : méthodes d'affaires, méthodes administratives, DRM, bases de données, paiement et facturation, interfaces graphiques, simulations, jeux, enseignement, informatique médicale et méthodes mathématiques.
L'ouvrage se termine par un exposé succinct des jurisprudences les plus pertinentes.
Sans aucun doute, un document de travail pratique et très utile pour les ingénieurs brevet ayant à connaître ce type d'inventions.
samedi 15 mai 2010
L'invention de la semaine
FR 2.937.233
COUTEAU FOURCHETTE UNIVERSEL.
- un tranchage aisé des viandes les plus ferme
- la manutention dans l’assiette des aliments les plus variés en pâtes, riz ou légumes
- le transport de l’assiette à la bouche de l’utilisateur sans changer de couvert
vendredi 14 mai 2010
T358/08 : ce que doit préciser l'acte de recours
Dans son acte de recours, la Titulaire avait requis l'annulation de la décision et le maintien du brevet, sans préciser sous quelle forme.
Décision T358/08
mercredi 12 mai 2010
G3/08 : la saisine est irrecevable
Le 23, octobre 2008, la Présidente de l'OEB avait saisi la Grande Chambre d'un grand nombre de questions relatives à la brevetabilité des programmes d'ordinateur.
Sujet récurrent objet de passions, en témoignent les presque 100 amici curiae reçus.
La Grande Chambre a maintenant rendu son avis sur 61 pages : la saisine est irrecevable.
Le but de l'Art 112(1) b) CBE est de permettre à la Grande Chambre de rétablir une uniformité juridique qui aurait été rompue, pas d'intervenir dans le développement de la jurisprudence (pt 7.3.1).
D'un point de vue procédural, on peut donc conclure de cet avis qu'une saisine par le Président ne sera recevable que s'il existe un réel conflit entre deux jurisprudences, typiquement deux décisions contradictoires rendues par des Chambres différentes dans un espace de temps réduit.
Même si la Grande Chambre décide de ne pas répondre aux questions qui lui sont posées, quelques principes importants ressortent des motifs.
Dans la décision T1173/97, la Chambre avait décidé qu'un "effet technique supplémentaire" était nécessaire pour qu'un logiciel soit brevetable, même s'il était revendiqué avec son support de données (sur ce dernier aspect, voir la dernière phrase de la décision). La Grande Chambre insiste sur le fait que cette décision n'a pas été suivie.
Dans la décision plus récente T424/03, la même Chambre, dans une composition différente et 7 ans plus tard, estime au contraire qu'un logiciel sur un support de données lisible par un ordinateur n'est pas exclu de la brevetabilité, la présence du support de données étant une caractéristique technique (pt 5.3). Cette décision est parfaitement en ligne avec la jurisprudence maintenant bien établie depuis la décision T258/03 - Hitachi, selon laquelle la présence d'une seule caractéristique technique suffit à satisfaire le critère d'invention. Le critère d'activité inventive demeure bien entendu (T154/04) : dans ce cas, seules les caractéristiques contribuant à la solution technique d'un problème technique sont prises en compte.
La Grande Chambre valide donc la jurisprudence la plus récente.
Pour rappel, les questions étaient les suivantes :
1. Un programme d'ordinateur ne peut-il être exclu à titre de programme d'ordinateur en tant que tel que s'il est revendiqué de façon explicite en tant que programme d'ordinateur ?
2. a) Une revendication relevant du domaine des programmes d'ordinateur peut-elle échapper à l'exclusion prévue à l'article 52(2)c) et (3) CBE en mentionnant simplement de façon explicite l'utilisation d'un ordinateur ou d'un moyen d'enregistrement de données déchiffrables par ordinateur ?
2. b) S'il est répondu par la négative à la question 2 a), un effet technique supplémentaire est-il nécessaire pour échapper à l'exclusion, ledit effet allant au-delà des effets inhérents à l'utilisation d'un ordinateur ou d'un moyen d'enregistrement des données en vue, respectivement, d'exécuter ou d'enregistrer un programme d'ordinateur ?
3. a) Une caractéristique revendiquée doit-elle produire un effet technique sur une entité physique dans le monde réel pour contribuer au caractère technique de la revendication ?
3. b) S'il est répondu par l'affirmative à la question 3 a), suffit-il que cette entité physique soit un ordinateur non déterminé ?
3. c) S'il est répondu par la négative à la question 3 a), des caractéristiques peuvent-elles contribuer au caractère technique de la revendication si les seuls effets auxquels elles contribuent sont indépendants de tout matériel informatique particulier qui est susceptible d'être utilisé ?
4. a) L'activité consistant à programmer un ordinateur implique-t-elle nécessairement des considérations d'ordre technique ?
4. b) S'il est répondu par l'affirmative à la question 4 a), les caractéristiques résultant de la programmation contribuent-elles par conséquent toutes au caractère technique d'une revendication ?
4. c) S'il est répondu par la négative à la question 4 a), les caractéristiques résultant de la programmation ne peuvent-elles contribuer au caractère technique d'une revendication que si elles contribuent à un effet technique supplémentaire lors de l'exécution du programme ?
Avis G3/08
Etablissement d'une cour européenne des brevets ; ce que peut apporter la CAFC
Par Philippe Signore et Jonathan Parthum, Oblon, Spivak, McClelland, Maier & Neustadt, L.L.P
Aujourd'hui, un litige en matière de brevet en Europe doit être jugé dans plusieurs États membres de l'Union européenne (UE), alors même que l'UE est une économie de marché unique et que le litige porte sur une seule invention, qui a obtenu la protection par brevet via un seul Office (l’Office européen des brevets). Cette multiplicité augmente le coût, le temps et les inconvénients des litiges liés aux brevets, et peut conduire à des applications incompatibles des lois sur les brevets et des jugements incohérents entre les différents États membres. En tant que tel, le Conseil de la compétitivité européenne a récemment présenté des propositions recommandant la création d'une unique Cour Européenne des Brevets (CEB) pour prendre en charge les litiges des États membres en matière de contrefaçon et de validité des brevets. Les détails de ces propositions sont encore fragmentaires et évolutifs, mais le principe de base est de créer une Cour européenne unifiée pour les litiges.
Les avantages inhérents à la capacité de la CAFC de prendre des décisions contraignantes uniformes à travers les États-Unis ont également donné naissance à un tribunal susceptible de créer son propre corpus de droit distinct du droit suivi par d'autres tribunaux fédéraux. Par exemple, la CAFC a adopté une règle générale selon laquelle une injonction permanente est automatique à partir du moment où le brevet a été jugé contrefait et valide. Dans d'autres domaines du droit, en revanche, obtenir une injonction permanente exige habituellement de satisfaire un test d’équité en quatre critères. Dans sa décision eBay c. MercExchange (2006), la Cour suprême a annulé cette règle d’injonction automatique pour les brevets et a rappelé à la CAFC qu'elle ne peut agir comme un tribunal « voyou » en créant des lois qui ne sont pas en accord avec l'application des lois dans d'autres juridictions. De telles corrections par la Cour suprême ont également eu lieu dans d'autres domaines du droit des brevets, par exemple en ce qui concerne les exigences pour la recevabilité de l’action en jugement déclaratoire(Medimmune c. Genentech, 2007). Bien que la Cour suprême des États-Unis puisse renverser certaines jurisprudences de la CAFC, la révision des décisions de la CAFC par la Cour suprême est exceptionnelle et entièrement discrétionnaire, laissant ainsi un caractère contraignant à certaines décisions erronées de la CAFC.
Un autre problème rencontré par la création du CAFC a trait à son taux élevé d'annulation des décisions de tribunaux de district. Près d'un tiers des décisions en matière de brevets qui sont annulées par la CAFC le sont en raison d'une interprétation des revendications jugée erronée. Un taux aussi élevé augmente le coût pour les parties, qui sont obligées de passer par un second procès utilisant la nouvelle interprétation des revendications. Ce second procès peut leur coûter des millions de dollars. Ce taux élevé d’annulation a trois causes principales: (1) de nombreux juges de district ne sont pas bien équipés pour effectuer l'interprétation d’objets techniques, (2) la CAFC revoit l’interprétation des revendications de novo, c'est à dire, sans aucun égard pour l’interprétation faite par le juge de tribunal de district; et (3) les règles d’interprétation de la CAFC que les juges des tribunaux de district doivent suivre sont loin d'être claires. Une solution possible est de permettre aux parties de former un « appel interlocutoire », par exemple un appel sur l'interprétation des revendications avant procès. Si un tel appel interlocutoire renverse l’interprétation, les justiciables n'ont pas à payer pour le procès à deux reprises. Cependant, la CAFC refuse actuellement d'entendre la plupart de ces appels interlocutoires, ce qui oblige les justiciables à passer par le procès avant tout appel. La principale raison de ce refus est la lourde charge de travail de la CAFC et l’arriéré actuel des cas en appel. Un octroi routinier de tels appels interlocutoires ne ferait qu'exacerber ces problèmes. D'autres solutions envisagées comprennent la modification du standard « de novo » pour donner un plus grand respect à l'interprétation des revendications faite par le tribunal de district, et une meilleure formation des juges du tribunal de district afin qu’ils puissent fournir plus d’expertise lorsqu’ils interprètent la portée et la signification des revendications.
La création de la CAFC a également créé l'obligation controversée selon laquelle les juges doivent résider dans un rayon de 50 miles (environ 80 km) de l'emplacement de la CAFC. Les opposants de cette exigence soutiennent que le nombre de juges intéressées à siéger à la CAFC est sévèrement diminué car de nombreux juges qualifiés sont très réticents à quitter leur Etat d'origine pour Washington DC. Les partisans de la règle, dont le juge en chef de la CAFC, affirment que travailler ensemble au même emplacement permet d’offrir une doctrine cohérente, une cohérence entre les équipes de juges, et permet de diminuer les coûts d’équipement.
Ce ne sont que quelques-uns des problèmes qui pourraient survenir et doivent être considérés avec la création d'une CEB. Quelle est la meilleure approche pour contrôler la jurisprudence de la CEB afin d'assurer la primauté et l'uniformité du droit communautaire?
Quelle devrait être la norme de contrôle des décisions de la CEB, en particulier en ce qui concerne l'interprétation des revendications? La CEB devrait-elle être située dans un lieu unique et les juges devraient-ils être contraints de vivre à une certaine distance de ce lieu? Bien sûr, ces questions peuvent ne sembler que secondaires par rapport à la question principale de la CEB: quelle(s) langue(s) devrait-elle utiliser? Pour cette question difficile, l’étude de la CAFC ne peut malheureusement rien apporter.
lundi 10 mai 2010
Rapprochement avocats-CPI : le Conseil de l'Ordre se prononce en faveur de l'interprofessionnalité
Ashvane Fowdar, sur son blog DBF, nous informe de la position prise récemment par le Conseil de l'Ordre du Barreau de Paris sur le rapprochement avocats-CPI.
Voici le texte figurant sur le dernier Bulletin de l'Ordre des avocats de Paris :
M. Pierre Lenoir, MCO et par ailleurs président de l’association des Avocats en propriété industrielle (AAPI) a rappelé que, si un temps elle avait été envisagée, l’idée d’une fusion des deux professions était manifestement aujourd’hui abandonnée par le gouvernement.
Seul le CNB s’était déclaré favorable à cette fusion en 2009, mais elle n’était souhaitée ni par les entreprises, ni par les avocats spécialistes en propriété intellectuelle.
Les pouvoirs publics travaillent désormais au rapprochement des deux professions.
Le 30 juin 2009, le Conseil de l’ordre de Paris avait lui-même pris une résolution aux termes de laquelle « le rapprochement avec les conseils en propriété industrielle (CPI) devrait être traité dans une perspective plus large d’un projet de loi à intervenir sur les professions juridiques afin de pouvoir bénéficier d’une étude d’impact préalable ».
Le gouvernement envisage aujourd’hui ce rapprochement par le biais d’une interprofessionnalité capitalistique et un avant-projet de loi a été élaboré dans ce sens.
Cette question est d’autant plus d’actualité que, sur le plan international, la création d’une juridiction communautaire est envisagée pour statuer en matière de contrefaçon de brevet d’invention (la Cour européenne des brevets).
Les débats au sein du Conseil ont été animés, certains estimant que l’interprofessionnalité est « un péril mortel » pour la profession qui risquerait ainsi de se paupériser.
D’autres ont exclu l’interprofessionnalité dès lors qu’elle serait limitée à son seul aspect capitalistique.
M. Pierre Lenoir a souhaité apaiser le débat en rappelant qu’au contraire d’une fusion des professions qui serait générale et dont les conséquences seraient radicales, l’interprofessionnalité restait optionnelle de sorte qu’elle ne pouvait être imposée à ceux qui ne la souhaitaient pas.
Le Conseil a majoritairement conclu que cette interprofessionnalité, qu’elle soit d’exercice ou capitalistique, devait n’être envisagée qu’à la double condition que les avocats conservent leur indépendance et leur déontologie.
C’est dans ces conditions que le bâtonnier a soumis au Conseil un projet de résolution dans les termes suivants.
- « Le Conseil de l'Ordre du Barreau de Paris envisage avec intérêt l’interprofessionnalité avec les CPI.
- Celle-ci doit se concevoir en protégeant l’indépendance de l’avocat et les règles déontologiques de sa profession. »
PS : Un lecteur me signale la mise en ligne d'un courrier de Mr Derambure aux CPI, informant des dernières avancées sur l'interprofessionnalité.
Un projet d'amendement au projet de loi « de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées » autoriserait l'interprofessionnalité capitalistique entre avocats et CPI.
La CNCPI organise une réunion d'information ouverte aux CPI, le 31 mai 2010 à 14 heures, 6, rue Albert de Lapparent 75007 PARIS.
R4/09 : Ignorantia legis non excusat
Pendant la procédure orale tenue devant la Chambre de recours, cette dernière avait indiqué à la titulaire intimée que les requêtes subsidiaires, plus larges que celles maintenues en première instance, ne pouvaient être admises. Une telle admission aurait été contraire au principe de non reformatio in peius, établi par la décision G1/99.
La Chambre avait expliqué ce principe au mandataire de la titulaire, en omettant de lui indiquer que ladite décision prévoyait quelques exceptions.
Ce n'est que dans la décision de recours que la Chambre va plus loin, en indiquant l'existence d'exceptions, pour décider finalement que les exceptions ne s'appliquaient pas en l'espèce.
La titulaire estime que son droit d'être entendu a été violé, la Chambre ne l'ayant pas informé de l'existence d'exceptions au principe de l'interdiction de la reformatio in peius.
Pour la Grande Chambre cet argument n'est manifestement pas recevable.
L'on pourrait considérer que les informations données par la Chambre ont pu induire la titulaire en erreur, au mépris du principe de protection de la confiance légitime, ou principe de la bonne foi. Ce principe n'oblige toutefois pas les Chambres à prevenir les parties des irrégularités qui relèvent de leur responsabilité (G2/97).
Même en admettant que les indications de la Chambre n'étaient pas suffisamment claires, la partie, au moins lorsqu'elle est représentée par un mandataire agréé est présumée connaître la jurisprudence.
La titulaire, puisqu'elle ne connaissait pas la décision G1/99, pouvait également demander une interruption de la procédure afin de pouvoir l'étudier.
Décision R4/09
vendredi 7 mai 2010
Du nouveau sur la double brevetabilité
Le sujet de la double brevetabilité est un peu le serpent de mer du droit des brevets.
L'an dernier, j'avais commenté la décision T307/03, dans laquelle la Chambre 3.3.07 avait rejeté une demande divisionnaire dont l'objet se recoupait avec l'objet du brevet "parent". La Chambre s'était alors basée sur l'Art 60 CBE, qui a ses yeux ne permettait d'obtenir qu'un seul brevet sur une invention donnée. La Chambre avait également souligné qu'au point 13.4 de la décision G1/05, la Grande Chambre avait admis l'existence d'un principe général d'interdiction de la double brevetabilité, dû au fait que le titulaire n'avait pas d'intérêt légitime à obtenir deux brevets sur la même invention.
Dans l'affaire toute récente T1423/07, la division d'examen avait rejeté la demande au motif que son objet était identique à celui du brevet européen issu de la demande prioritaire.
L'obiter dictum de la décision G1/05 n'est pas non plus pertinent, puisqu'il concerne un conflit entre un brevet "parent" et une demande divisionnaire. Dans le cas d'espèce, la deuxième demande bénéficie d'une date de dépôt d'un an postérieure à celle du brevet parent : le titulaire a donc un intérêt légitime à obtenir un deuxième brevet, qui lui offre un an de protection supplémentaire.
Admettant que la CBE ne contient pas de disposition spécifique interdisant la double brevetabilité, la Chambre recherche si l'Art 125 CBE s'applique. Cet article permet à l'OEB, pour des questions de procédure, de prendre en considération les principes généralement admis dans les Etats contractants.
La plupart des Etats contractants évitent la double brevetabilité, dans le cas des demandes européennes déposées sous une priorité nationale, grâce à un phénomène de substitution du brevet national par le brevet européen, selon un mécanisme analogue à celui de l'Art L614-11 du Code de la Propriété Intellectuelle français.
Ce mécanisme est toutefois mis en oeuvre après la délivrance du brevet européen, et ne permet pas le rejet d'une demande.
Seuls le Royaume-Uni et l'Irlande prévoient la possibilité de rejeter une demande pour cause de double brevetabilité.
La Chambre en conclut que si les Etats contractants interdisent dans la grande majorité la double brevetabilité, cela ne fournit pas pour autant une base pour rejeter une demande européenne en application de l'Art 97(2) CBE.
L'application des principes généralement admis dans les Etats contractants conduirait plutôt à un mécanisme de cessation des effets attachés au premier brevet lorsque le deuxième est finalement délivré.
On pourrait ajouter que dans les faits, un titulaire sensé obtenant deux brevets identiques devrait abandonner le plus ancien au profit de celui expirant le plus tard.
Dans le cas d'espèce, le problème de double brevetabilité avait de toute façon été résolu grâce à une cession de la demande à une filiale.
Cette décision fondamentale a déjà été discutée il y a quelques jours par plusieurs de mes confrères blogueurs, ici, ici (en anglais) et ici (en suédois).
mercredi 5 mai 2010
9651 mandataires agréés en 2009
Le nombre de mandataires agréés, qui a crû de 20% en 5 ans, approchait les 10000 fin 2009.
Aux Etats-Unis, le nombre de "patent agents" est de 9781, et le nombre de "patent attorneys" est de 29944.
Le tableau (que vous pouvez agrandir en cliquant dessus) montre la très forte hétérogénéité de répartition des mandataires agréés.
Les mandataires exerçant en Allemagne représentent à eux seuls le tiers de l'effectif global.
Un autre tiers est obtenu en additionnant les mandataires exerçant au Royaume-Uni, en France et aux Pays-Bas. Le troisième tiers est constitué des mandataires travaillant dans les 32 pays restants.
L'évolution du nombre de mandataires ces 5 dernières années illustre également le fossé existant entre les pays de l'Est et du Sud, dans lesquels le nombre de mandataires a fortement décru ou stagné et les autres pays, où leur nombre a généralement augmenté.
Les mandataires basés à Munich sont plus nombreux que les mandataires habitant en France.
Les villes comprenant plus de 100 mandataires agréés sont Munich (1080), Londres (727), Paris (379), Varsovie (170), Milan (162), Stuttgart (155), Düsseldorf (144), Berlin (116), Bâle (104) et Stockholm (101).
mardi 4 mai 2010
Eyjafjöll : Prorogation des délais
L'OEB informe qu'en raison des perturbations dues au nuage de cendres craché par le volcan Eyjafjöll (situé sous le glacier Eyjafjallajökull), tous les délais expirant normalement entre le 15 et le 28 avril 2010 ont été prorogés au 29 avril 2010.
Cette disposition est prise en application de la R. 134(2) CBE.
lundi 3 mai 2010
T87/08 : l'activité inventive, ou son absence, doit être motivée
La R. 111(2) CBE impose aux instances de l'OEB de motiver leurs décisions. La décision doit contenir une suite logique d'arguments et doit discuter en détail les faits, preuves et arguments pertinents. Il s'agit d'une exigence fondamentale, car seule une motivation claire et complète permet aux parties et à la Chambre de contester ou vérifier le bien-fondé de la décision.
La Division d'opposition avait rejeté certaines requêtes pour défaut d'activité inventive, au motif que le problème technique mis en avant par la Titulaire n'était pas résolu dans toute la portée de la revendication.
Elle avait ensuite admis certaines requêtes au motif que l'homme du métier n'était pas incité à choisir les pigments spécifiques revendiqués.
Dans le premier cas, la Chambre reproche à la Division d'opposition l'absence de toute référence à l'art antérieur. En outre, le fait qu'un problème technique ne soit pas résolu n'emporte pas automatiquement défaut d'activité inventive, mais doit conduire à reformuler le problème technique de manière moins ambitieuse, et l'évidence ou non au regard de l'état de la technique, eu égard au problème reformulé, doit toujours être examinée.
Dans le deuxième cas, la Chambre reproche aussi à la Division d'opposition de ne pas avoir discuté l'art antérieur, et de ne baser ses affirmations sur aucune base factuelle.
Chose rare, les deux parties se sont vues rembourser la taxe de recours.
Décision T87/08