Comme annoncé en juillet dernier, la Grande Chambre a décidé ce qui suit:
En cas d'urgence générale compromettant la possibilité pour les parties d'assister à une procédure orale en personne dans les locaux de l'OEB, la conduite d'une procédure orale devant les Chambres de recours sous forme de visioconférence est compatible avec la CBE même si toutes les parties à la procédure n'ont pas donné leur consentement à la conduite d'une procédure orale sous forme de visioconférence.
Les motifs sont maintenant parus et sont particulièrement intéressants.
Tout d'abord la Grande Chambre restreint la portée de la question à ce qui nécessaire pour la Chambre l'ayant saisie: elle limite donc la question aux procédures orales devant les Chambres de recours.
Pour la Grande Chambre, les procédures orales par visioconférence sont des procédures orales au sens de l'article 116 CBE. L'objet/ le but d'une procédure orale est de donner aux parties l'opportunité de plaider oralement leur dossier et il est peu probable que le législateur ait souhaiter exclure par anticipation de futurs formats permettant de le faire.
La Grande Chambre reconnait que pour l'instant les procédures orales par visioconférence ne sont pas complètement équivalentes aux procédures orales en présence, ces dernières constituant l'optimum en termes de communication. Les procédures orales en personne sont également préférables du point de vue la transparence du système judiciaire et de sa fonction dans la société. Le droit d'être entendu ou le droit à un procès équitable sont toutefois respectés. Les visioconférences permettent également de voir les personnes auxquelles on s'adresse, contrairement aux conférences téléphoniques. Les membres des Chambres répondent normalement aux arguments des parties par des questions ou commentaires, pas seulement par un signe de tête ou un regard interrogateur.
Les procédures orales en personne étant le format optimal ("l'étalon-or"), elles devraient être l'option par défaut, et les parties ne devraient se voir refuser cette possibilité que pour de bonnes raisons. Le choix du format n'est pas une question administrative, et relève plus des parties que des Chambres. Refuser à une partie la possibilité de paraître en personne doit être justifié par des circonstances spécifiques, par exemple des difficultés affectant la capacité des parties à assister en personne. La décision, discrétionnaire, ne devrait pas être influencée par des questions administratives telles que la disponibilité de salles ou d'interprètes.
La Grande Chambre note enfin que dans les Etats contractants, comme devant la CEDH, la possibilité d'imposer des audiences par visioconférence a été introduite du fait de la pandémie de Covid-19 et qu'il existe une réticence considérable à prolonger cette mesure au-delà de la situation d'urgence actuelle.