Le RPCR 2020 permet aux Chambres de rédiger des décisions abrégées.
Cette disposition vise à augmenter la productivité des Chambres afin de respecter le plan à 5 ans fixé par M. Josefsson en 2018, à savoir, d'ici 2023, réduire l'arriéré de 9000 à moins de 7000 et clore 90% des affaires en moins de 30 mois. L'objectif visé en termes de productivité (nombre d'affaires traitées par membre technicien) était une augmentation de 30%. Selon le rapport annuel 2018, rendu en avril 2019, la productivité avait déjà augmenté de 18% en 2018. La reconduction des membres des Chambres à l'issue des périodes de 5 ans est conditionnée à une évaluation favorable des performances.
Selon l'article 15(7), lorsque la décision a été prononcée à l'issue d'une procédure orale, les motifs ou des éléments de ces motifs peuvent être formulés par écrit sous forme abrégée. Après l'exposé sommaire des faits, les motifs peuvent se limiter aux conclusions décisives sur lesquelles la décision est fondée.
La Chambre tiendra compte des effets sur la qualité de la décision, de la cohérence et de l'évolution de la jurisprudence et des intérêts de tiers, d'une juridiction, voire du public en général.
Le consentement explicite des parties est nécessaire. L'OEB indique que le fait de ne pas donner son consentement ne portera pas préjudice à une partie, de même que le fait de consentir à la forme abrégée ne portera pas préjudice au droit de présenter une requête en révision.
L'article 15(8) prévoit un autre cas où la décision peut être abrégée: lorsque la Chambre est d'accord avec les conclusions et les motifs de la décision attaquée. Contrairement à l'article 15(8), l'article 15(7) ne prévoit pas de consentement des parties et s'applique y compris en l'absence de procédure orale.
La présente décision est la première décision rédigée sous forme abrégée en application de l'article 15(8) RPCR.
En première instance le brevet avait été maintenu sous forme modifiée après discussion des motifs selon les articles 100 b), 100 c) et 100 a) CBE. Seule l'Opposante a formé un recours. La Titulaire défendait donc le brevet tel que maintenu.
La procédure orale de recours a eu lieu le 9 janvier 2020. A l'issue de la procédure orale, le Président a expliqué que la Chambre envisageait de formuler la décision sous forme abrégée car la Chambre faisait sienne toutes les conclusions et tous les motifs de la décision attaquée et qu'aucun nouvel argument n'avait été soulevé en recours par les parties (ce qui a été confirmé par les parties).
La décision écrite, disponible le 16 janvier, est effectivement abrégée puisqu'elle tient en 7 phrases, dont 3 pour justifier la forme abrégée. Elle renvoie, s'agissant des arguments des parties, aux points pertinents de la décision attaquée et indique que la Chambre "souscrit au raisonnement pertinent de la division d'opposition" en renvoyant aux points 12.3, 13.3, 14.3 et 15.3 de la décision.
Décision T1687/17 (en langue allemande)
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lundi 20 janvier 2020
T1687/17 : décision abrégée
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11 comments:
Espérons que ce mode de rédaction ne sera employé que dans de rares cas, et que le management des chambres ne fera pas pression pour que cela devienne un standard. Productivité pourquoi pas mais pas au détriment de la qualité des décisions!
On s'approche petit à petit d'un système où la deuxième instance n'aura plus aucune utilité. Avec ce nouveau règlement, impossible d'apporter de nouveaux arguments, ne parlons même pas de nouveaux documents. Et incitation à faire un simple renvoi à la décision de première instance...
Par contre pour les mandataires, interdiction de renvoyer aux courriers déposés en première instance!
Il convient de noter que l'Art 15(8) NRPCR n'exige pas le consentement explicite des parties et n'est pas limité aux décisions prononcées lors de la procédure orale. Il n’en reste pas moins que les exigences de l’Art 113 s’appliquent même aux CR.
Pour respecter l’Art 113(1), il doit donc bien y avoir discussion contradictoire devant la CR. Ce n’est qu’après discussion devant la CR que la décision peut être abrégée.
Le fait de rédiger une décision abrégée ne signifie en rien que la qualité des décisions doive en pâtir.
Que le mandataire ne puisse renvoyer à ses écritures de première instance a une raison bien précise : il n’est pas dit que les considérations valables en première instance soient applicables à la décision de la DO et donc en recours. Voir par ex. les Points 19 et 20 de la décision T 1311/13 ou Point 4 de la décision T 587/12.
Les documents tardifs sont une plaie et il est normal qu’ils ne soient admis dans la procédure qu’après un examen de recevabilité. Après tout l’opposant à 9 mois pour préparer son opposition.
Si un document tardif change l’issue de la procédure il sera admis, en tout cas en opposition. Comme le recours n’est là que pour vérifier si la décision de la DO est correcte, il faut être plus convaincant en recours.
Pour ce qui est des arguments, il serait utile de consulter T 1914/12 et T 1359/14.
J'imagine que les chambres seront assez sages pour ne pas abuser de ce type de décisions abrégées, qui reviennent à scier la branche sur laquelle elles sont assises.
Même s'il est tentant pour un membre dont la reconduction prochaine est en danger car il n'a pas atteint ses objectifs de performance d'essayer de se rattraper en abrégeant le maximum de décisions. Il y aura dans ce cas une certaine incitation à approuver la première instance pour gagner en efficacité.
De grâce, ne mettons pas en doute la probité des membres des CR sans raison apparente. Certains membres des CR sont certes d'anciens examinateurs et ils n'ont pas quitté une roue de hamster pour aller dans une autre.
Mettre en cause la probité des membres des CR est apporter de l'eau au moulin de ceux qui considèrent que les CR sont taillables et corvéables à merci et n'ont pour seul but que de contribuer au cash-flow de l'Office. L'ex président de l'OEB voulait même augmenter la taxe de recours à un niveau tel que les CR soient auto-suffisantes sur le plan financier. A-t-on jamais entendu pareille ânerie quand il s'agit d'un organe judiciaire?
Il vaudrait mieux défendre l’indépendance des CR que de les critiquer. Les organismes professionnels, epi en tête, se sont illustrés par un silence assourdissant à ce sujet. Si critères de performance il doit y avoir, alors ils doivent au moins être publics. Rien de tel n'est prévu à ce sujet.
Il est à espérer que les plaintes devant le Tribunal Constitutionnel Allemand quant à l'indépendance des CR secoueront le cocotier sans faire exploser la boutique.
En 2004 un projet de réforme des CR visant à leur donner une vraie indépendance avait été proposé par des juristes de l'OEB. Le CA n'en avait pas voulu à l'époque. Si gouverner est prévoir, alors la gouvernance de l'OEB était et est toujours encore mal partie.
Ce n'est pas la réforme cristallisée dans les R 12bis à 12quinquies qui ont augmenté l'indépendance des CR. Bien au contraire. Auparavant, elles pouvaient décider de manière autonome des leurs règles de procédure. Aujourd'hui, elles sont certes entendues à leur sujet, mais la décision d'adopter les règles de procédure est prise par le "Conseil des chambres de recours" comportant trois membres du CA et trois juges externes.
Ce sont ces derniers qui voulaient imposer un Art 11 NRPCR n’autorisant le renvoi qu’en cas de vice substantiel de procédure. Heureusement la mesure a été atténuée dans la dernière mouture.
La probité des membres des CR n'est pas remise en cause.
Mais force est de constater que la réforme des CR facilite la tâche des "ennemis des CR" (tel était peut-être son but?). Ils ne se priveront pas de clamer haut et fort que l'indépendance des CR ne peut être assurée lorsque les membres des CR se voient menacés de non-reconduction pour cause de "mauvaises" performances.
Le problème de la reconduction des membres des CR soulève effectivement un problème d'indépendance des membres de celles-ci.
En mars 2019, la même chambre du tribunal constitutionnel allemand qui va décider des plaintes relatives à l’OEB et à la JUBE a décidé qu’un juge pouvait être nommé pour une période donnée, mais à deux conditions cumulatives :
1) Le juge doit être fonctionnaire nommé à vie
2) Il ne peut pas être renouvelé dans ses fonctions.
Seuls les examinateurs ou juristes de l’OEB préalablement embauchés avec un contrat à vie, ou les membres d’une fonction publique nationale, répondent à la première condition, mais certainement pas à la seconde. Les futurs juges de JUBE ne répondent à aucun de ces critères.
Si cette jurisprudence est appliquée aux membres des CR, alors il en est fini des CR dans leur configuration actuelle.
Il ne s’agit pas d’augmenter la perception de l’indépendance des CR, mais de leur en donner vraiment une. Tant que les CR n’auront pas un budget propre qui n’est pas soumis à l’appréciation du président de l’OEB, elles ne seront pas indépendantes.
Le fait que le droit de présentation des futurs membres des CR ou des membres à renouveler revienne au président de l’Office n’est pas non plus un gage d’indépendance. Pourquoi l’arriéré des dossiers a-t-il augmenté entre 2010 et 2018 ? Ce n’est certainement pas l’effet du hasard.
Les juges nommés à la CJUE sont des juges nationaux et ne sont à ma connaissance pas renouvelés. Ils répondent donc aux critères ci-dessus. Pour Alicante il est quasi impossible de trouver des informations, mais je pense que le système est similaire à celui de la CJUE.
A propos de juridiction auto-suffisante, c'est ce qui est prévu pour la JUB. Et là aussi cela pose un problème d'indépendance, car une juridiction qui vit grâce aux personnes qui leur amènent des affaires, sera tentée de fournir des conditions favorables à ces personnes. Dit plus clairement, ce sont les titulaires de brevet qui feront vivre la JUB, et donc cette dernière a tout intérêt à être favorable aux brevetés.
Lorsque la taxe de base pour une contrefaçon est de 11000 € et la taxe reconventionnelle de nullité, ou de nullité seule est de 20 000€, il est plus que clair en faveur de qui penche la balance!
@robin
votre comparaison me semble un peu biaisée. Pour la contrefaçon à la JUB il y en plus une taxe variable en fonction du volume de dommage prévu de l'affaire.
En ce qui concerne les critères de performance, on voit que la JUB prévoit des délais très courts pour les procédures, typiquement un an. (+ 1 an en appel) L'objectif de 2023 pour les chambres de recours d'être à 30 mois est loin du compte, même avec une opposition en 18 mois
Personnellement, étant donné le backlog des chambres je ne comprend pas pourquoi on ne fait pas un recrutement exceptionnel pour solder le backlog. Ensuite je ne vois pas très bien pourquoi on ne pourrait pas avoir de décision en 1 an pour les chambres de recours.
@RespPI,
Lire correctement: j'ai parlé de la taxe de base. Qu'il y ait en sus une taxe proportionnelle à la valeur du litige est bien évident, mais je maintiens la comparaison. À l'OEB la taxe d'opposition est de 785€ et pas de taxe proportionnelle à la valeur supposée du brevet.
Les délais très courts à la JUBE le sont au prix d'une forte limitation des moyens d'une partie. Ce que vous n'avez pas déposé au début, ne peut pratiquement pas être rattrapé. Une allégation d'une partie qui n'est pas contredite devient un fait. Très peu de voies de recours sur des décisions quant à la forme. La JUBE n'est pas non plus la panacée. Si le panel estime que vous en avez assez dit en PO, on vous coupe la parole ou alors en procédure écrite, toutes les soumissions ultérieures sont ignorées. Regardez bien les règles de procédure de la JUBE, vous serez surpris.
Les raisons du backlog sont très claires. Un énarque se targuant d'être manager a refusé de nommer des membres ou de les renouveler pendant des années. Aurait-on voulu étouffer les CR au profit de la JUBE que l'on ne s'y prendrai pas autrement!
Il n'est pas correct de lancer la pierre aux CR. Il y a eu un recrutement massif en 2019 et il continuera en 2020. Voir édition spéciale du JO n° de 2020 sur les CR. Mais les nouveaux membres doivent être formés, ce qui prend du temps.
Un délai d'un an est possible, mais est-il souhaité? Cf. ci-dessus.
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