Le débat tournait autour de l'accessibilité au public des documents D1 et D2, cités par la division d'examen et consistant en des documents de travail discutés en 2010 lors de réunions du Motion Picture Expert Group (MPEG).
NDLR: il semble que les documents aient été trouvés du fait d'un accord entre l'OEB et la Commission électrotechnique internationale (IEC) facilitant l'utilisation par l'OEB de documents IEC.
Pour le demandeur, ces documents sont des documents de travail confidentiels en lien avec le processus d'élaboration de normes.
Le demandeur se prévalait d'ailleurs, en lien avec d'autres demandes de brevet, d'une réponse du service de traitement des réclamations de l'OEB qui indiquait avoir donné instruction aux examinatrices et examinateurs de ne plus citer ce type de documents comme art antérieur.
Dans la décision T1155/12, la présente Chambre, dans une composition différente, avait jugé qu'un document MPEG, bien que rédigé à un stade plus tardif que D1 et D2 dans le processus de normalisation, n'était pas accessible au public.
La Chambre s'intéresse en détail au mode de fonctionnement du MPEG, également groupe de travail 11 du sous-comité 29 du comité technique 1 de l'ISO/IEC, donc ISO/IEC JTC 1/SC 29/WG 11.
Composé d'experts nommés par des organisme nationaux, le groupe de travail se réunit, discute de projets de documents ("m") - tels que D1 et D2 - mis à disposition sur un serveur dont l'accès nécessite un mot de passe et, éventuellement après consultation d'autres expertes ou experts, émet des documents "w". Dans le processus d'élaboration des normes, les différentes propositions sont étudiées et soit adoptées soit rejetées. Le processus de rédaction est donc collaboratif.
Pour le demandeur, les participants à ces réunions requièrent une accréditation nationale et sont dès lors tenus au secret. Le demandeur se prévalait également de certaines règles du MPEG concernant la confidentialité des documents de travail. D1 et D2, en tant que documents "m" de surcroît élaborés au tout début du processus de normalisation, ne pouvaient être accessibles au public au moment de leur production.
La Chambre ne partage pas cet avis. Si certains organismes de normalisation nationaux imposent des obligations de confidentialité, le demandeur n'a pas prouvé que cela s'appliquait à tous les organismes représentés dans le MPEG. Le MPEG n'a aucun contrôle sur ses membres, et l'ISO/IEC encourage la participation la plus large possible et même la dissémination la plus large possible des documents de travail afin d'assurer que toutes les parties intéressées aient l'opportunité de contribuer. Les expertes et experts sont même encouragé(e)s à consulter d'autres expertes ou experts non membres. Les expertes ou experts sont tenu(e)s de garder les documents de travail confidentiels, sauf pour ce qui est nécessaire afin d'assurer le développement de la publication concernée et l'obtention d'un consensus sur son contenu. D1 et D2 ont été élaborés par 13 personnes, les membres du groupe de travail présents aux réunions étant environ 20 à 30, membres de différentes sociétés, souvent concurrentes, de différents pays. La signature d'engagements de secret aurait pu être possible, mais n'a pas été faite.
Il apparaît donc que le MPEG n'a ni garanti ni même envisagé une confidentialité absolue au sein du groupe relativement restreint présent aux réunions, mais a au contraire envisagé une discussion plus large entre expertes et experts.
La Chambre propose le résumé suivant:
Une divulgation est considérée comme mise à la disposition du public si, à la date pertinente, il était possible pour les membres du public d'en connaître le contenu et qu'il n'existait aucune obligation de confidentialité restreignant l'utilisation ou la diffusion de cette connaissance (T 877/90).
En l'absence d'un accord de confidentialité explicite, on ne peut pas considérer qu'en l'espèce une obligation de confidentialité était en place. Compte tenu de la nature collaborative du processus d'élaboration et de la procédure de recherche de consensus inhérente au MPEG, la confidentialité n'a pu être garantie.
Les éléments de preuve révèlent un système conçu pour garantir une certaine "confidentialité" de ses données tout en étant suffisamment pragmatique et souple pour permettre une consultation avec d'autres parties afin de lui permettre de remplir sa mission de manière satisfaisante.
Décision T2239/15
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2 comments:
Pour moi, c'est clair. Le document A19 explique la composition de MPEG:
The ‘Experts’ in MPEG are drawn from a diverse, world-wide range of companies, research organisations and institutes. Membership of MPEG and participation in its meetings is restricted to delegates of National Standards Bodies. A company or institution wishing to participate in MPEG may apply to join its National Standards Body [...]. Joining the standards body, attending national meetings and attending the international MPEG meetings can be an expensive and time consuming exercise. However, the benefits include access to the private documents of MPEG (including access to the standards in draft form before their official publication, providing a potential market lead over competitors) and the opportunity to shape the development of the standards.
Ce qui est le plus étonnant dans cette décision est que le Directeur DMQS (Directorate Metrics and Standards) a affirmé dans une lettre que les documents MPEG étaient à considérer comme confidentiels et non publics. Voir Point III des raisons.
Comment se fait-il qu'une personne qui n'est membre d'aucune division puisse se permettre de décider ce qui fait partie de l'art antérieur ou non?
Cette position a semble-t-il été revue par après, mais le fait même qu'une telle prise de position ait été communiquée à une partie laisse pour le moins pantois.
La CR y a mis bon ordre et c'est tant mieux. Il y a une différence entre documents à caractère privatif et documents confidentiels. Des documents à caractère privatif peuvent être communiqués à d'autres parties, ou tout du moins leur contenu.
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