La présente décision revient sur une question récurrente, celle de savoir si une mauvaise définition d'un paramètre revendiqué conduit à une insuffisance de description (en empêchant l'homme du métier de reproduire l'invention sans efforts indus) ou ne pose qu'un problème de clarté (en faisant naître une imprécision quant à la portée de la revendication).
La membrane revendiquée était caractérisée par un potentiel Zeta (ZP) de la surface interne entre -3,0 et 0mV à pH 7,5.
Pour la Chambre, l'homme du métier doit être capable de produire de manière fiable une membrane ayant le ZP revendiqué. Les exemples du brevet donnent certes des détails quant aux conditions de procédé à appliquer pour produire les membranes, mais la membrane étant revendiquée par un paramètre, l'homme du métier doit être en mesurer de vérifier de manière fiable si le ZP tombe ou pas dans la gamme revendiquée.
Le brevet mentionne, pour mesurer le ZP, une étape d'encapsulation de la membrane dans une résine, mais les rapports d'essai soumis par l'Opposante montrent que les résines conventionnelles pénètrent en partie dans la membrane, de sorte que le ZP varie selon la résine utilisée, selon la durée d'encapsulation, selon la manière dont l'encapsulation est réalisée. L'homme du métier n'aurait pas nécessairement identifié ce phénomène, ou aurait dû procéder à un programme de recherche pour identifier une résine ne posant pas ce problème de pénétration.
La Chambre est consciente que des imprécisions quant à la mesure d'un paramètre ou l'existence de plusieurs méthodes de mesure ne conduisent pas nécessairement à une insuffisance de description et peuvent conduire les Opposants à formuler des
objections de défaut de clarté déguisées (
T608/07,
T1768/15).
Mais dans un cas où le paramètre est crucial pour résoudre le problème sous-jacent à l'invention, la méthode de mesure doit donner des valeurs cohérentes de manière à ce que l'homme du métier sache, lorsqu'il reproduit l'invention, si ce qu'il produit résout le problème ou pas (
T815/07).
Ici, le ZP est présenté dans le brevet comme étant le paramètre crucial nécessaire pour améliorer les performances de la membrane.
Du fait d'un manque d'information, le ZP est tellement mal défini que l'homme du métier ne sait pas si la membrane produite est capable de résoudre le problème technique ou pas. Cela fait peser une charge indue sur l'homme du métier, en le privant des promesses de l'invention (
T593/09).
Décision T1305/15
Accès au dossier
1 comments:
Pour distinguer entre défaut de clarté et insuffisance de description, il faut avoir à l'esprit
1)qu'il ne ne peut être remédié à une insuffisance de description qu'en rajoutant des données qui manquent dans les documents déposés à l'origine, c.-à-d. en enfreignant les dispositions de l'Art 123(2);
2) que, dans la mesure où les données manquantes se trouvent dans les documents déposés à l'origine, il s'agit d'un défaut de clarté ou de support des revendications auquel il peut être remédié.
Cette règle n'est pas absolue mais permet en première approximation de faire le tri.
Dans les deux cas, il peut être nécessaire de limiter la portée des revendications à la contribution effective de l'invention à l'art antérieur.
Le décision T 2001/12 (voir l'exergue), qui est une des plus récentes en la matière permet aussi de faire le tri entre Art 83 et Art 56. Il y a effectivement un lien entre activité inventive et suffisance de description.
Si un effet revendiqué ne peut pas être obtenu, alors l'objection est une objection d'insuffisance de description.
Si un effet n'est pas revendiqué, alors l'objet des revendications ne peut pas résoudre le problème que l'inventeur s'est posé, l'objection est alors une objection de défaut d'activité inventive.
C'est pour cette raison que dans T 486/16, le manque de plausibilité, du à l'absence de données à la date effective, a conduit à une objection d'activité inventive.
Enregistrer un commentaire