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lundi 25 janvier 2016

T1693/10 : conflit d'intérêt


Le jour de la procédure orale, le mandataire M de la Requérante est venu accompagné d'un autre mandataire (C) du même cabinet.
C avait jusqu'en 2014 été employé par le cabinet B représentant  l'Intimée, au sein du département en charge de l'affaire.

Un sous-pouvoir a été déposé par M, afin de permettre à C de représenter la Requérante. La Chambre a fait remarquer qu'aucun pouvoir ne figurait au dossier et qu'elle n'était donc pas en mesure de vérifier si M était autorisé à donner un sous-pouvoir à un autre mandataire.
Après discussion, M a retiré son sous-pouvoir. C devait donc être considéré comme assistant du mandataire (au sens de G4/95), et la Chambre, qui n'avait pas été au préalable informé de sa venue, ne l'a pas autorisé à prendre la parole.

L'Intimée contestait toutefois la présence même de C aux côtés de M, et a émis une objection au titre de la R.106 CBE, au motif que C se trouverait en situation de conflit d'intérêt et que sa présence violerait le droit à un procès équitable prévu à l'article 6 CEDH.


La Chambre rejette ces objections.

Le fait que C puisse assister M avant ou pendant la procédure orale, ou pendant les pauses, n'a pas d'incidence sur la procédure de recours. La Chambre n'est pas l'organe compétent pour statuer sur les questions soulevées par l'Intimée (conflit d'intérêt, manque de loyauté et manquements au code de conduite professionnelle), ces questions ne pouvant entraîner, selon les circonstances, que des mesures disciplinaires dans le cadre du Règlement en matière de discipline des mandataires agréés.

Quant à l'argument relatif à l'Art 6 CEDH, la Chambre note que l'objection ne figure pas sur la liste des motifs spécifiés à l'Art 112bis(2) et à la R.104 CBE, et qu'un tel vice de procédure ne constitue donc pas un motif de révision. En tout état de cause, l'Intimée n'a pas fait valoir qu'elle serait privée de la possibilité de se défendre.

Décision T1693/10

NDLR: sur la question du conflit d'intérêt, l'article 3(2) du Règlement en matière de discipline prévoit ce qui suit:
Tout mandataire agréé doit se récuser lorsque l'acceptation d'un mandat ou sa continuation le conduirait à connaître d'un cas d'espèce au sujet duquel il a conseillé ou représenté une personne ayant des intérêts opposés à ceux de son mandant, à moins que le conflit d'intérêts n'ait cessé.

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7 comments:

Anonyme a dit…

Au moins les choses sont claires. La Chambre reconnait que les procédures devant l'OEB n'ont pas à respecter l'article 6 CEDH et à être équitables...

Raoul a dit…

Que le mandataire du cabinet B n'ait pas apprécié la présence de son ancien collègue C du côté de l'opposant/appelant est compréhensible.
En conclure que son droit d'être entendu ne serait pas respecté si son ancien collègue C avait eu le droit de parler au nom de l'opposante est un pas que la CR a bien fait de ne pas franchir.

Il s'agit en l'espèce d'un problème de conflit d'intérêts qui est à régler devant la Chambre de Discipline et non devant une CR technique.

En présence d'un pouvoir valable il n'y a pas de base légale pour une CR de refuser d'entendre un mandataire figurant sur ladite liste.

D'un autre côté, ce qui est strictement légal n'est pas toujours équitable... C'est le mandataire de l'intimée qui fait état de l'Art 6 de la CEDH. Il a donc bien fallu que la CR se penche sur ce point. La réponse ayant été donnée par la GCR, cf. R 18/09 et les autres décisions qui y sont citées, elle était tenue de s'y conformer.

Il est un peu facile, pour ne pas dire malhonnête, d'affirmer, comme le fait l'anonyme ci-dessus, que "les procédures devant l'OEB n'ont pas à respecter l'article 6 CEDH et à être équitables...". Le contraire est vrai, quoiqu'il puisse penser. C'est au législateur de dire si l'Art 6 de la CEDH peu servir à soutenir une requête en révision, et pour cela, il faut une conférence diplomatique. La GCR n'avait donc d'autre choix que de décider que l'Art 6 de la CEDH ne permet pas de fonder une requête en révision.

Dans ces circonstances, une objection selon la R 106 était donc vouée à l'échec, d'autant plus que la CR. La CR a deplus noté que "l'intimée n'a pas non plus précisé en quoi son droit à être entendu prévu à l'article 113(1) CBE 1973 aurait été méconnu par la seule présence du mandataire accompagnant aux côtés du mandataire de la requérante lors de la procédure orale ou par la décision de la chambre de poursuivre la procédure orale en présence du mandataire accompagnant dans les conditions mentionnées ci-dessus".

Pour éviter de se retrouver dans une situation de conflit d’intérêt, ne serait-il pas judicieux d’appliquer un délai de trois ans entre le changement de cabinet et le fait de se retrouver agir à l’encontre d’un client de son ancien cabinet, par exemple par analogie avec G 2/94, connue sous le terme de Lex Bossung, JO 1996, 401.

Le fait est que l'ancien collègue C ne pouvait pas présenter un pouvoir valable.

Il y a certes présomption de mandat pour un mandataire figurant sur la liste des mandataires, mais la fourniture d'un pouvoir séparé peut être exigée selon les circonstances: voir la Décision de la Présidente de l’OEB du 12 Juillet 2007, JO 2007, édition spéciale no 3, 128, reprise dans l’édition spéciale 1 du JO 2015 relative aux Chambres de recours, VIII.1, 79.
Dans le cas d’espèce, un pouvoir n’avait pas été fourni par le mandataire initial de l’opposant, et donc la possibilité de délivrer un sous-pouvoir ne pouvait être documentée.

Le nouveau mandataire ne pouvait donc que participer à la PO en tant que personne accompagnante au sens de G 4/95. Cette situation embarrassante aurait aisément pu être évitée.

Leçons à retenir :
1) La R 106 est à utiliser avec précaution.
2) La présomption de mandat n’est pas suffisante pour qu’un mandataire puisse parler en cours de procédure orale. Si le nouveau mandataire n’est pas du même cabinet que le mandataire initiale, il faut toujours présenter un pouvoir séparé.
3) Il vaut toujours mieux fournir soit un pouvoir séparé, soit un renvoi à une autorisation générale. Cela permet le cas échéant de donner un sous pouvoir et donc d’éviter ce genre de situation plutôt embarrassante pour un mandataire.

Resp PI a dit…

@ anonyme de 17h36
Ce n'est pas ce que dit l'extrait cité, qui d'ailleurs est une citation de la grande chambre.

Anonyme a dit…

Formally, yes, ECHR is not applicable to this case. Mostly because one wonders how could you prove that the contents of the private conversation between M an C were in any related to the case. This is clearly a case for EPI to solve under the professional conduct...

Still, the Board did consider if the procedure was equitable:

...Cette objection n'était ainsi ni motivée ni étayée d'aucune preuve. Toutefois, comme déjà mentionné, l'intimée n'a de toute façon pas soulevé d'objection à l'encontre de la représentation de la partie adverse par le mandataire de la requérante.

2.2.4 L'intimée n'a pas non plus précisé en quoi son droit à être entendu prévu à l'article 113(1) CBE 1973 aurait été méconnu par la seule présence du mandataire accompagnant aux côtés du mandataire de la requérante lors de la procédure orale ou par la décision de la chambre de poursuivre la procédure orale en présence du mandataire accompagnant dans les conditions mentionnées ci-dessus.

Resp PI a dit…

je vais hasarder une analyse peu juridique. Le mandataire de la requérante savait que sa demande n'avait aucune chance d'aboutir, son ancien collègue pouvant de toute façon être présent comme public.
Mais en procédant de cette façon, il a obligé la chambre a prendre position et à mettre en lumière ce qui semble quand même un cas qui pose de questions sur la déontologie. -je reste prudent-

Cela constitue donc un bon début de preuve pour exercer une action devant l'EPI.

Anonyme a dit…

"Il est un peu facile, pour ne pas dire malhonnête, d'affirmer, comme le fait l'anonyme ci-dessus, que "les procédures devant l'OEB n'ont pas à respecter l'article 6 CEDH et à être équitables...". Le contraire est vrai, quoiqu'il puisse penser. C'est au législateur de dire si l'Art 6 de la CEDH peu servir à soutenir une requête en révision, et pour cela, il faut une conférence diplomatique."

"Le contraire est vrai, quoiqu'il puisse penser." Ça manque un peu d'arguments...
Actuellement l'Art 6 de la CEDH ne peut servir à soutenir une requête en révision. Par conséquent une violation de cet article ne peut avoir de conséquences concernant la procédure. Donc dire que "les procédures devant l'OEB n'ont pas à respecter l'article 6 CEDH" n'est pas malhonnête, c'est simplement la réalité factuelle. Chacun peut constater d'ailleurs que, en l’espèce, un mandataire a pu violer ses obligations sans que cela n'ai de conséquences pour la procédure.

S'il existe des règles déontologiques, ce n'est pas pour faire joli mais bien parce que leur violation pourrait conduire à une procédure inéquitable.

Anonyme a dit…

Un anonyme a dit "This is clearly a case for EPI to solve under the professional conduct..."
Pour mémoire, l'EPI (ou plus précisément sa Commission de Discipline) ne peut démarrer d'action disciplinaire sans une plainte formelle, déposée par écrit auprès du Greffier.

De manière intéressante, il a été argué un conflit d'intérêt au motif que le mandataire en question était précédemment salarié du cabinet, au sein du département en charge de l'affaire. Aujourd'hui, ce département comprend une vingtaine de conseils, et il ne fait aucun doute pour moi que les cabinets disposent du relevé du temps de travail de chaque conseil sur chaque dossier. Il ne semble pas avoir été démontré que le mandataire en question avait précédemment conseillé ou représenté le client dans l'affaire en question, et je serais d'avis que les éléments dont le public dispose (à travers cette décision) ne constituent pas "un bon début de preuve" tout en posant d'intéressantes questions.

Ce cas a une vague similitude avec le cas disciplinaire CD 07/2012 (blog du 27 décembre 2017), sauf que dans ce dernier cas, il a été démontré que le mandataire avait précédemment rédigé la demande.

 
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