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lundi 30 juin 2025

T2328/22: portée de l'intervention

Dans sa décision T2538/16, la Chambre avait maintenu le brevet sous forme modifiée et renvoyé l'affaire devant la division d'opposition pour procéder à l'adaptation de la description. C'est à cette étape qu'un tiers  accusé de contrefaçon était intervenu dans la procédure et entendait remettre en cause la validité du brevet.

L'intervenante, invoquant les décisions G1/94 et T167/93, argumentait que n'étant pas partie à la décision T2538/16, l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision ne lui était pas opposable. 

La Chambre n'est toutefois pas convaincue: G1/94 porte sur le cas d'une intervention formée pendant la procédure de recours, avant qu'une décision finale n'ait été prise, et T167/93 porte sur la question de savoir si une décision de recours sur examen lie une division d'opposition, donc dans une procédure différente, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

La Chambre suit plutôt la décision T694/01 et confirme la décision de la division d'opposition selon laquelle l'intervention est limitée aux questions d'adaptation de la description, et ne peut remettre en cause la décision prise précédemment par la Chambre. Une intervention n'ouvre pas une nouvelle procédure, et l'intervenante doit accepter l'état du dossier dans lequel il est au moment de son intervention.

 

Décision T2328/22

jeudi 26 juin 2025

JUB - Cour d'Appel - 19 juin 2025 - on peut attendre des parties qu'elles connaissent la jurisprudence de l'OEB

La Cour d'Appel avait confirmé le rejet de la demande en interdiction provisoire car il ne pouvait être établi avec le degré de certitude nécessaire que le brevet était valide. La Titulaire avait demandé une révision de ce jugement en application de l'article 81(1) AJUB pour vice de procédure fondamental, faisant valoir que la Cour (1) avait appliqué une nouvelle norme pour l'interprétation de la revendication sans lui donner l'opportunité d'être entendue sur le sujet et (2) avait basé sa décision sur des faits incorrects.

La Cour rejette cette demande de révision.

Seuls des vices fondamentaux peuvent fonder une révision. L'appréciation des arguments et les conclusions qui en sont tirées ne peuvent en tant que telles faire l'objet d'un contrôle, y compris si une telle appréciation peut être considérée comme incorrecte. Il en est de même pour l'évaluation des preuves.

L'interprétation d'une revendication est une question de droit, et c'est à la Cour d'Appel qu'il revient d'établir comment la personne du métier comprend les termes utilisés dans la revendication dans le contexte des revendications dans leur ensemble et en prenant en compte la description et les dessins. A cet égard, il n'y a aucune raison pour que la décision de la Chambre de recours de l'OEB dans l'opposition relative au brevet en cause, si elle est invoquée par une des parties, ne puisse pas être considérée comme une indication du point de vue de la personne du métier. 

On peut attendre des parties qu'elles aient une connaissance de la jurisprudence pertinente, y compris celle des Chambres de recours et de la Grande Chambre de recours de l'OEB. Même si la Cour n'est pas liée par cette jurisprudence, il y a lieu de prendre en compte ces décisions, puisque ces organes appliquent les mêmes dispositions de droit matériel de la CBE.

La Cour indique en outre que si elle doit prendre en compte tous les arguments avancés par les parties, elle n'est pas tenue de tous les traiter explicitement et de manière détaillée dans sa décision. Si les parties doivent avoir l'opportunité de prendre position sur les motifs, faits et preuves sur lesquels la décision se fonde, il n'est pas nécessaire qu'elles puissent le fait par écrit. Enfin, à moins que la décision n'ait pu être objectivement prévue et ne surprenne les représentants bien informés, par exemple parce qu'elle s'écarte fondamentalement de la jurisprudence établie, le droit d'être entendu n'exige pas que la Cour notifie à l'avance son avis préliminaire.


Décision du 19 juin 2025 UPC_CoA_405/2024

lundi 23 juin 2025

T404/23 et T1958/22 : motivation des arguments

Dans l'affaire T404/23, le mémoire de recours déposé par l'Opposante consistait essentiellement en une répétition des écritures de première instance. 

La Chambre rappelle que selon l'article 12(3) RPCR, le mémoire de recours doit présenter les motifs pour lesquels il convient d'annuler la décision attaquée. Un opposant doit normalement expliquer pourquoi le raisonnement de la division d'opposition dans sa décision est supposément incorrect. Des arguments déjà soulevés en première instance doivent habituellement être présentés dans le contexte de la décision attaquée. Selon l'article 12(5) RPCR, la Chambre peut ne pas admettre dans la procédure les moyens qui ne respectent pas ce principe. 

En l'espèce, concernant le défaut d'activité inventive basé sur les combinaisons de D1 avec D10 ou D11, la division d'opposition avait expliqué que la personne du métier n'aurait pas combiné ces documents car cela aurait conduit à certaines conséquences indésirables; le mémoire de recours ne contient aucun argument à cet égard. Le mémoire n'explique donc pas en quoi la décision attaquée devrait être infirmée sur cet aspect. L'objection n'est donc pas admise dans la procédure.

Il en est de même pour les autres objections d'activité inventive et d'extension de l'objet. 

Elle admet en revanche l'objection d'insuffisance de description pour laquelle le raisonnement de la division d'opposition semble limité. Le degré de justification requis en vertu de l'article 12(3) RPCR dépend généralement du degré de motivation de la décision attaquée.

Décision T404/23

En revanche, dans l'affaire T1958/22, la Chambre n'est pas persuadée que des arguments devraient ne pas être pris en compte simplement car ils seraient une simple répétition des arguments de première instance. Si un recours peut être irrecevable lorsqu'il repose exclusivement sur la même affaire que celle présentée en première instance, cela n'empêche pas une partie de se référer à des arguments présentés antérieurement. Au contraire, un certain degré de répétition est souvent inévitable, étant donné que l'objectif du recours est généralement de présenter et éventuellement de développer les arguments initiaux afin de contester la décision contestée. Par conséquent, la répétition des arguments de la procédure de première instance est non seulement autorisée, mais souvent nécessaire pour présenter un dossier complet conformément à l'article 12(3) RPCR.


mercredi 18 juin 2025

G1/24: la description doit toujours être consultée

Dans sa décision G1/24, la Grande Chambre a enfin tranché le débat sur le recours à la description et aux dessins lorsqu'il s'agit d'interpréter les revendications:

Les revendications sont le point de départ et la base de l'évaluation de la brevetabilité d'une invention selon les articles 52 à 57 de la CBE. La description et les dessins doivent toujours être consultés pour interpréter les revendications lors de l'évaluation de la brevetabilité d'une invention selon les articles 52 à 57 CBE, et pas seulement si la personne du métier estime qu'une revendication n'est pas claire ou ambiguë lorsqu'elle est lue isolément.

La Grande Chambre est donc complètement en ligne avec la Cour d'Appel de la JUB, et souligne d'ailleurs expressément le besoin d'harmonisation.

Ni l'article 69 CBE (et son protocole interprétatif) ni l'article 84 CBE ne sont entièrement satisfaisants comme base pour l'interprétation des revendications lorsqu'il s'agit d'évaluer la brevetabilité. L'article 69 CBE concerne la question de la contrefaçon devant les juridictions nationales et la JUB, tandis que l'article 84 CBE est de nature formelle. La CBE ne donne donc pas de base juridique claire sur le sujet. 

Il ressort clairement de la jurisprudence constante que les revendications forment le point de départ. Sur la question du recours à la description et aux dessins, la Grande Chambre rejette la ligne de jurisprudence selon laquelle la description ne devrait être consultée que si la revendication est ambiguë, comme étant contraire à l'article 69 CBE  et à la pratique des tribunaux nationaux et de la JUB, et comme étant en outre illogique: le fait de considérer une revendication comme claire est déjà en soi un acte d'interprétation, et pas un préalable à l'interprétation.

La Grande Chambre en profite pour souligner l'importance fondamentale de l'examen de la clarté: la réponse correcte à un défaut de clarté est une modification.


Décision G1/24

lundi 16 juin 2025

JUB - Division locale de Düsseldorf - 13 mai 2025 - deuxième application thérapeutique

Cette décision est à ma connaissance la première dans laquelle la JUB se penche sur la brevetabilité et la contrefaçon d'un brevet de deuxième application thérapeutique.

Le brevet EP3536712 concerne une composition pharmaceutique particulière pour la réduction du taux de lipoprotéines (a) chez un certain type de patients (diagnostiqués ou identifiés comme à risque de développer des maladies cardiovasculaires ou des maladies occlusives thrombotiques, ayant un taux de Lp(a) sérique supérieur à 30mg/dL, et ne suivant pas un régime de statine).

Les juges considèrent qu'une nouvelle utilisation thérapeutique au sens de l'article 54(4) CBE peut aussi bien être une nouvelle indication, comme une maladie non encore traitée par la substance revendiquée, qu'une indication pour un nouveau groupe de patients. Afin de bénéficier de la "nouveauté fictive" de l'article 54(5) CBE, les revendications doivent se rapporter à une utilisation spécifique dans une méthode selon l'article 53c) CBE. La seule raison pour laquelle de telles revendications peuvent faire l'objet d'un brevet est la nouveauté (et l'activité inventive) de cette nouvelle utilisation.

En l'espèce, la réduction du taux de Lp(a) est considérée comme un "traitement thérapeutique", ce terme incluant l'atténuation ou la prévention d'un état pathologique, et pas nécessairement sa guérison complète. La composition était connue pour traiter le risque de maladies cardiovasculaires, mais en réduisant le taux de LDL, pas en réduisant le taux de Lp(a), et encore moins pour le type de patients visés.

Concernant l'activité inventive, le tribunal est d'avis qu'il doit exister une justification quant à la question de savoir si un document serait considéré par la personne du métier comme un point de départ réaliste. Dans le cas d'espèce un document BP19 est considéré comme un point de départ réaliste car il évalue des traitements destinés à réduire le taux de Lp(a). 

En termes de contrefaçon, le contrefacteur présumé doit offrir ou mettre le produit médical sur le marché de manière à ce qu'il conduise ou puisse conduire à l'utilisation thérapeutique revendiquée, et ce, en sachant ou en étant raisonnablement censé savoir que c'est le cas. 

Dans le cas d'espèce, en tant qu'élément objectif, il doit exister soit une prescription visant à abaisser les niveaux de Lp(a), soit des circonstances montrant qu'une telle utilisation peut être prévue. De plus, en tant qu'élément subjectif, le contrefacteur doit le savoir ou aurait raisonnablement dû le savoir.

En outre, les exigences d'un tel comportement ne peuvent être définies de manière abstraite, mais nécessitent une analyse de tous les faits et circonstances pertinents, par exemple le marché pertinent, la part de marché de l'utilisation revendiquée, ou encore les actions que le prétendu contrefacteur a prises, soit positivement, en encourageant l'utilisation revendiquée, soit négativement, en prenant des mesures pour empêcher le produit d'être utilisé selon le brevet. 

En l'espèce, les juges ne sont pas convaincus que la mise sur le marché du "Repatha" conduit, ou pourrait conduire, à l'utilisation revendiquée. Selon le résumé des caractéristiques du produit (RCP), le médicament est approuvé pour abaisser le LDL-C et traiter l'hyperlipidémie mixte. Il y est aussi fait mention d'une diminution des taux de Lp(a), mais pas en lien avec des essais cliniques. Les médecins peuvent certes prendre note de cette information, mais leur décision de prescription sera basée sur les indications thérapeutiques pour lesquelles le médicament est approuvé.


Décision UPC_CFI_505/2024 du 13/5/2025


jeudi 12 juin 2025

T1078/23: le choix de l'état de la technique le plus proche ne nécessite aucune justification

La Demanderesse argumentait que D1, bien qu'appartenant au même domaine technique que l'invention, n'était pas un point de départ approprié et que la personne du métier serait partie de D5, qui vise le même but que l'invention.

La Chambre considère, en accord avec T2223/19 et T449/23, mais contrairement aux décisions T2057/12, T2759/17 et UPC_CFI1/2023, qui insistaient sur le caractère "réaliste" de l'état de la technique le plus proche, qu'aucune justification sur le choix du point de départ n'est nécessaire lorsque l'activité inventive n'est pas reconnue. L'objet revendiqué doit être inventif par rapport à tout l'état de la technique, et la personne du métier n'a pas pour tâche de choisir un document comme état de la technique le plus proche.

Un point de départ peut se révéler non approprié si le problème technique objectif qui en résulte est irréaliste ou artificiel. Mais cela ne disqualifie pas le document dès le départ. Et le fait que d'autres documents soient "relativement plus proches" n'est pas pertinent.

Décision T1078/23


mercredi 11 juin 2025

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mardi 10 juin 2025

T1713/22: principe de publicité des procédures orales

La Titulaire avait soulevé en début de procédure orale le fait que cette dernière ne figurait pas dans le calendrier en ligne des procédure orales. Selon elle, cela remettait en cause le caractère public de la procédure orale, ce qui constituait un vice de procédure.

La Chambre ne partage pas cet avis. La date de la procédure orale était visible sur le registre en ligne pour le brevet en question; le public avait donc accès à cette date. En outre, la salle dans laquelle elle se déroulait était indiquée à l'entrée du bâtiment. Cela suffit pour garantir le principe de publicité. L'inclusion d'une mention à cet effet dans le calendrier en ligne des procédures orales n'est pas une condition préalable au respect du principe de publicité des procédures orales.


Décision T1713/22 (en langue allemande)

jeudi 5 juin 2025

T1632/22: tous les problèmes que la personne du métier aurait considérés sont valables

La méthode revendiquée se distinguait de celle de D1 d'une part en ce qu'elle est utilisée pour détecter la "vivacité" d'une personne (ou la présence réelle) et d'autre part en ce qu'elle prend en compte des paramètres de qualité liés à la caméra. La méthode de D1 était utilisée pour de l'authentification faciale. 


La demanderesse argumentait que D1 ne concernait pas la même utilisation, et n'était donc pas un point de départ valable. Elle argumentait en outre que la personne du métier n'aurait pas été incitée à modifier le système de D1 pour réaliser de la détection de vivacité, en utilisant le même système que celui utilisé pour l'authentification de visage.

La Chambre considère que ce qui est évident pour la personne du métier ne peut dépendre du contenu de la demande examinée. En particulier, la demande ne peut être invoquée pour limiter l'état de l'art à prendre en considération ou le niveau d'expertise de la personne du métier sur la base de ce qui est indiqué comme "domaine de l'invention". 

L'expression "personne du métier" n'est pas faite pour limiter le "métier" pertinent, mais pour exprimer l'idée qu'une invention n'implique pas d'activité inventive si elle est évidente pour une personne ayant des compétences dans le domaine d'intérêt, par opposition à une personne n'ayant pas de compétences en la matière. 

Une personne du métier peut très bien tenir compte de l'état de la technique dans un domaine qui n'est pas, au sens étroit du terme, son "propre domaine", et peut notamment se tenir informée des développements dans des domaines connexes.

En outre, l'approche problème-solution requiert un problème technique que la personne du métier cherche à résoudre. Sur ce point, la Chambre considère que les problèmes qui découlent d'une comparaison entre l'invention et l'art antérieur ne sont pas les seuls problèmes qui peuvent être considérés (contrairement à T646/22). En principe, tous les problèmes que la personne du métier aurait abordé basés sur l'état de la technique le plus proche sont valables. Plus précisément, la personne du métier peut se rendre compte qu'un document de l'état de la technique peut aider à résoudre des problèmes dont il est supposé être déjà conscient.

Dans le cas d'espèce, la Chambre considère que les deux domaines sont proches, de sorte qu'une personne ayant des compétences en détection de la vivacité prendrait aussi en compte le domaine de l'authentification. Elle reconnaîtrait également que la solution proposée par D1 peut être appliquée de manière directe à la détection de la vivacité. La Chambre considère toutefois que la personne du métier n'aurait pas ajouté l'autre caractéristique distinctive au vu de D1, et renvoie devant la division d'examen pour discuter des autres documents cités pendant l'examen.


Décision T1632/22

lundi 2 juin 2025

T2194/22: resoumission d'une requête rejetée comme tardive

La requête principale examinée en recours était sur le fond identique à une requête que la Chambre n'avait pas admise dans la procédure dans un précédent recours (avant renvoi, décision T2371/18).

L'Opposante faisait valoir que l'autorité de la chose jugée aurait dû conduire la division d'opposition à ne pas admettre cette requête dans la procédure.

La Chambre rappelle que le principe de l'autorité de la chose jugée est un principe généralement admis dans les Etats contractants (article 125 CBE), et qu'il s'applique aux décisions des Chambres de recours, également dans le cadre de renvois devant les divisions d'opposition. 

L'autorité de la chose jugée porte non seulement sur le dispositif de la décision mais aussi sur les constatations et conclusions qui ont été décisives pour la décision, les conclusions définitives ne pouvant être réexaminées même si de nouveaux faits sont produits.  Il convient de distinguer l'autorité de la chose jugée de l'effet contraignant des motifs et du dispositif de l'article 111(2) CBE. Cet effet contraignant est d'une part plus restreint puisqu'il est limité aux procédures concernant le même brevet suite à un renvoi de l'affaire et qu'il ne s'applique que dans la mesure où les faits sont les mêmes. Cet effet contraignant est d'autre part plus large dans la mesure où il est lié à des questions qui ne sont pas couvertes par l'autorité de la chose jugée mais qui sont englobées par le raisonnement sous-jacent dans la décision de renvoi. Cela signifie que seule la question qui n'est pas couverte par l'autorité de la chose jugée, c'est-à-dire qui n'est pas définitivement réglée, peut faire l'objet d'un réexamen dans le cadre d'une procédure postérieure au renvoi, dans la mesure où les faits ne sont pas identiques.

La Chambre considère toutefois que dans ce contexte, l'application stricte du principe de l'autorité de la chose jugée n'est pas appropriée pour les décisions relatives à l'irrecevabilité des moyens des parties, telles qu'une requête déposée tardivement, dans la mesure où ces décisions sont des conclusions intermédiaires fondées sur une situation procédurale spécifique.

La « décision » quant à la recevabilité reste habituellement une étape intermédiaire pour parvenir à la décision finale. Par conséquent, si les circonstances qui ont motivé la décision changent au cours de la procédure, il semble approprié que la « décision » de recevabilité reste ouverte au réexamen. Par exemple, une requête tardive peut ne pas être admise en application de l'article 13(2) RPCR du fait que son dépôt n'est pas justifié, mais cette requête peut ultérieurement devenir une réaction légitime à de nouvelles objections ou preuves soumises lors de la procédure orale.

La « décision » de ne pas admettre la requête, qui n'était fondée que sur des raisons procédurales, n'est donc pas un obstacle absolu au réexamen d'une demande identique ou équivalente dans une procédure postérieure au renvoi.

En outre, la division d'opposition n'était pas liée par la décision antérieure car les faits de la cause ont changé, la requête étant une réaction légitime et appropriée à une nouvelle objection selon l'article 123(2) CBE soulevée par la division d'opposition dans son avis provisoire. Sur ce point, la Chambre prend soin de préciser que si les faits n'avaient pas changé, la requête n'aurait pas pu être admise. 

La Chambre précise également que même si la formulation d'une nouvelle objection peut justifier que le titulaire ait droit à une réponse juste et légitime, l'admission de requêtes dont l'objet est plus large que celui évalué dans la procédure de recours précédente n'est généralement pas justifiée. Au contraire, la poursuite d'une affaire après renvoi doit en principe s'appuyer sur la situation qui existait à la fin de la procédure de recours qui a conduit au renvoi. La division d'opposition doit tenir compte du cadre défini dans la procédure de recours qui a conduit au renvoi afin de garantir les intérêts légitimes de l'autre partie et du public en général à disposer d'un certain degré de sécurité juridique quant à l'existence et à la portée du brevet européen dans un délai raisonnable.


Décision T2194/22

 
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