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jeudi 6 février 2025

T1847/22: le changement d'ordre des requêtes les a rendues "procéduralement inactives"

La présente décision rappelle que changer l'ordre des requêtes peut avoir des conséquences procédurales.

La division d'opposition avait maintenu le brevet selon la requête subsidiaire 4, anciennement requête subsidiaire 13. Suite au changement d'opinion de la division d'opposition concernant la nouveauté par rapport à D1, la Titulaire avait en effet réordonné ses requêtes, certaines n'étant pas à même de répondre à l'objection.

En recours, la Titulaire demandait à ce que les requêtes subsidiaires 5 à 11, qui étaient numérotées 6 à 12 en première instance (puis 7 à 13 après le changement d'ordre intervenu en procédure orale) soient examinées avant la requête subsidiaire maintenue en première instance.

La Chambre rappelle que l'objet premier du recours est de vérifier le bien-fondé de la décision de première instance et fait remarquer que du fait du changement d'ordre en première instance, la Titulaire a empêché la division d'opposition de prendre une décision quant à ces requêtes. Le changement d'ordre en recours constitue une modification, de sorte que les requêtes subsidiaires ne sont pas admises dans la procédure en application de l'article 12(4) RPCR.

La Titulaire argumentait que sont changement d'ordre n'était pas une manœuvre procédurale arbitraire mais une réponse au changement d'avis de la division d'opposition pendant la procédure orale. La Chambre rétorque qu'un avis n'est que préliminaire, de sorte qu'un changement d'avis ne peut constituer une surprise. En outre, s'il est vrai que changer l'ordre des requêtes peut souvent réduire la durée des procédures devant la division d'opposition, les titulaires doivent garder à l'esprit que l'ordre des requêtes est déterminée par les titulaires eux-mêmes et doivent refléter l'ordre de préférence dans lequel les requêtes doivent être considérées. La réorganisation des requêtes n'est pas qu'une simple modification sans conséquence procédurale.

Le fait d'avoir empêché la division d'opposition de prendre une décision sur ces requêtes les rend "procéduralement inactives" de la même manière que si elles avaient retirées.


Décision T1847/22

mardi 4 février 2025

Offre d'emploi


Nous recherchons un(e) gestionnaire de portefeuilles brevets


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Rémunération selon profil

Poste à pourvoir dès que possible, dans le cadre d’un CDI.

Les candidatures sont à adresser à : recrutement@becker.fr




lundi 3 février 2025

T1841/23: la procédure de recours n'est pas conçue pour servir de support à des considérations tactiques dans des procédures parallèles de contrefaçon

La JUB ayant informé l'OEB de l'engagement d'une action en contrefaçon du brevet opposé début septembre 2024, la Chambre avait rapidement notifié aux parties l'accélération de la procédure et convoqué une procédure orale pour le 11 décembre 2024. Un mois plus tard, la Chambre avait envoyé son opinion provisoire, selon laquelle le brevet ne respecterait pas les exigences de l'article 123(2) CBE. Environ 3 semaines avant la procédure orale, le défendeur à l'action en contrefaçon a déposé une intervention et cité un nouveau document.

La Titulaire a demandé un report de la procédure orale, arguant notamment du peu de temps imparti pour répondre aux nouveaux arguments soulevés par l'intervenant. La Chambre fait remarquer que selon l'article 15(2) c) RPCR, le dépôt d'objections, arguments et preuves nouveaux ne justifie normalement pas un changement de date de la procédure orale. En outre, pour ce qui concerne les points de débat les plus pertinents (article 123(2) CBE), l'intervenant n'a pas soulevé de nouvelles objections mais s'est basé sur les arguments antérieurement au dossier. Du reste, s'il apparaît à l'issue de la procédure orale que le droit d'être entendu d'une partie n'a pas pu être respecté, la procédure peut être poursuivie par écrit. La requête en report de la procédure orale est donc rejetée.

Suite au rejet des différentes requêtes pour extension de l'objet, la Titulaire a formulé une objection au titre de la règle 106 CBE, argumentant qu'elle aurait dû bénéficier d'un délai d'au moins 2 mois pour répondre à l'intervention, et que le peu de temps disponible rendait difficile l'élaboration de requêtes subsidiaires qui à la fois satisfassent aux exigences de la CBE et procurent la meilleure protection possible, compte tenu de l'action en contrefaçon en cours.

La Chambre rétorque que la question qui a conduit à la révocation du brevet est en discussion depuis le début de la procédure d'opposition, et que la Titulaire a eu amplement la possibilité d'être entendue à ce sujet.

Si une intervention recevable doit être traitée comme une opposition, son dépôt peu de temps avant la procédure orale devant une Chambre n'excuse généralement pas le titulaire (ou les autres parties), et en particulier ne leur donne pas un bon pour un délai supplémentaire. Ses implications concrètes pour la procédure de recours sur opposition doivent plutôt être déterminées au cas par cas, conformément aux dispositions de la CBE et du RPCR.

En outre, la procédure de recours sur opposition n'est pas non plus conçue pour servir de support à des considérations tactiques dans des procédures parallèles de contrefaçon. Il s'agit plutôt d'une contestation existentielle du titre, sur la base de laquelle l'exécution est poursuivie dans la procédure de contrefaçon, et des paramètres tels que la sécurité juridique et l'économie de procédure sont également en jeu. Les difficultés rencontrées par le titulaire pour rédiger des requêtes auxiliaires qui offrent également la meilleure étendue de protection, compte tenu de la procédure de contrefaçon en cours, ne constituent pas une raison pour retarder la procédure de recours.

Décision T1841/23

jeudi 30 janvier 2025

T295/22: le mode d'administration est une caractéristique distinctive, contre les DIrectives

La revendication 1 portait sur un composé (apremilast) stéréoisomériquement pur pour son utilisation comme médicament, le médicament étant administré par voie orale.

  


Selon les Directives G-VI 6.1.2 (exemple 2),  le mode d'administration peut être un facteur déterminant dans un traitement médical et doit être considéré comme une caractéristique restrictive, mais ce uniquement par rapport à une indication médicale supplémentaire (spécifique). Dans l'exemple 2, à défaut d'indication thérapeutique spécifique, la caractéristique "administré localement" reste purement illustrative et ne constitue pas une caractéristique technique restrictive susceptible de conférer le caractère de nouveauté. 

Toutefois, l'exigence sous-jacente à la spécificité de l'utilisation au sens de l'article 54(5) CBE doit, selon la conclusion explicite de G 2/08 (5.10.3), être interprétée simplement par opposition à la large protection générique conférée par la première application médicale revendiquée d'une substance ou d'une composition, et n'est en principe pas confinée à une indication médicale particulière.

La Chambre considère en conséquence que le mode d'administration est un élément qui caractérise l'objet revendiqué. 

Le mode d'administration ne confère toutefois pas d'activité inventive en partant de l'exemple 12 de D1, qui décrit l'apremilast stéréoisomériquement pur et son utilité, en tant qu'inhibiteur de la PDE4 dans le traitement de maladies inflammatoires. Le problème technique objectif est de proposer un mode d'administration permettant un traitement sûr et bien toléré des maladies liées à la PDE4 et l'état de la technique montre que le développement d'inhibiteurs de PDE4 administrés oralement était prometteur, ce qui constituait une espérance raisonnable de succès. La présence de certains effets avantageux additionnels éventuellement inattendus ne pouvait conférer d'activité inventive dans la mesure où il aurait déjà été évident d'administrer le composé par voie orale (T1356/21).


Décision T295/22

mardi 28 janvier 2025

Offre d'emploi


 recherche

un(e) Ingénieur(e) Brevet Electronique (H/F)

CASALONGA, première société pluri-professionnelle d’exercice d’avocats et de conseils en propriété industrielle en France, intervient dans tous les domaines de la propriété intellectuelle, tant en conseil qu’en contentieux.

Précurseur, dynamique et innovant, CASALONGA est aujourd’hui un groupe européen de plus de 120 collaborateurs (avocats, CPI brevets et marques, mandataires, juristes, ingénieurs, gestionnaires de portefeuilles, assistants et autres fonctions support), disposant de bureaux à Paris, Munich, Alicante, Grenoble, Toulouse, Montpellier, Beaune, Pau, Nantes et d’un réseau international de correspondants.

Poste à pourvoir :

Pour accompagner son développement, et notamment son département Electronique en forte croissance, CASALONGA recherche un(e) ingénieur(e) ayant, de préférence, une première expérience réussie en cabinet de conseils en propriété industrielle ou dans un service PI de l'industrie.

Sous la responsabilité de l’associé en charge du département et en liaison directe avec nos clients, vos principales missions consisteront à :

  • Rédiger des demandes de brevets en français ou en anglais dans divers domaines de la mécanique et de l’électronique
  • Suivre les procédures de délivrance en France et à l’étranger
  • Accompagner nos clients dans l’élaboration de leur politique PI
  • Etablir des consultations juridiques de brevetabilité et de liberté d’exploitation
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Profil du candidat :

  • Autonome, motivé et rigoureux, de formation ingénieur ou universitaire, en électronique, vous bénéficiez idéalement d’un ou deux ans d’expérience
  • Idéalement, vous êtes titulaire du CEIPI
  • Vos langues de travail sont le français et l’anglais, l’allemand serait un plus

Conditions de travail :

  • Type de contrat : CDI à temps complet
  • Date de prise de poste : au plus tôt
  • Rémunération : en fonction de l'expérience et des qualifications du candidat (sur 13,5 mois)
  • Lieu de travail : Paris 6e, Toulouse, Nantes ou Grenoble – possibilité de télétravail
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CASALONGA offre à tous les candidats les mêmes opportunités d’accès à l’emploi sans distinction de genre, d’ethnicité, de religion, d’orientation sexuelle, de statut social, de handicap et d’âge.

Merci d’envoyer CV et lettre de motivation à rh@casalonga.com

lundi 27 janvier 2025

T1865/22: détérioration évidente

La composition de décapage revendiquée se distinguait de celle de l'exemple 2 de D7 en ce que la teneur en co-solvant était de 2 à 20%, contre 25% pour l'exemple 2. 

En l'absence d'effet technique associé, le problème technique objectif était de fournir une composition de décapage alternative. La Chambre n'admet pas dans la procédure les avantages allégués pour la première fois lors de la procédure orale.

Le fait de réduire arbitrairement la concentration d'un composant en faveur d'un autre n'est qu'une mesure de routine qui ne pouvait impliquer d'activité inventive.

La Titulaire argumentait que la personne du métier n'aurait pas réduit la teneur en monoéthylène glycol, car selon D7 des teneurs élevées en agent de couplage étaient nécessaire pour obtenir une tolérance à l'eau appropriée. C'est pour cette raison que la division d'opposition avait conclu à la présence d'une activité inventive.

La Chambre n'est pas convaincue par cet argument. Si réduire la concentration en monoéthylène glycol réduit la tolérance à l'eau, alors la même détérioration s'applique aussi à l'objet revendiqué, de sorte que le problème technique objectif serait de réduire la tolérance à l'eau des compositions de décapage de D7. La solution aurait alors été évidente car rien n'aurait empêché la personne du métier de réduire la concentration si une plus faible tolérance à l'eau avait été requise.

Plus généralement, le simple fait que l'objet revendiqué exclue une caractéristique technique divulguée dans l'art antérieur le plus proche comme étant essentielle ou avantageuse pour un effet technique ne peut pas en soi établir l'existence d'une activité inventive. Au contraire, dans des situations où l'exclusion de la caractéristique technique en question est la seule caractéristique qui distingue l'objet revendiqué de l'art antérieur le plus proche, il doit être démontré que l'objet revendiqué atteint cet effet technique dans une mesure comparable à celle de l'art antérieur le plus proche, même en l'absence de cette caractéristique. Sans cette preuve, l'objet revendiqué ne fait qu'entraîner une détérioration évidente de l'effet technique décrit dans l'art antérieur le plus proche.


Décision T1865/22

jeudi 23 janvier 2025

T1588/22: la division d'examen a agi à l'encontre du principe de protection de la confiance légitime.

La demanderesse (une personne physique non représentée) avait répondu à la notification selon la règle 71(3) CBE en proposant un jeu de revendications modifié. 

Dans la notification suivante, la division d'examen avait soulevé une objection au titre de l'article 123(2) CBE, et indiqué que la demanderesse pouvait soit modifier les revendications pour revenir au texte proposé dans la notification selon la règle 71(3) CBE, soit déposer de nouvelles revendications, étant rappelé qu'une procédure orale aurait alors lieu, pour plus d'efficacité et une meilleure communication. La demanderesse avait en réponse à nouveau modifié ses revendications, et la demande avait ensuite été rejetée par décision écrite.

La Chambre considère que la division d'examen avait créé une attente légitime à ce qu'une procédure orale soit organisée avant toute rejet de la demande. La division d'examen a donc agi à l'encontre du principe de protection de la confiance légitime. 

La décision faisait remarquer que la demanderesse n'avait pas requis de procédure orale, de sorte que son droit d'être entendu avait été respecté. La Chambre n'est pas d'accord, car même si aucune requête en procédure orale n'avait été formulée, la division d'examen avait créé une attente légitime à ce qu'une telle procédure orale ait lieu.

La décision est donc annulée et la taxe de recours est remboursée.


Décision T1588/22

mardi 21 janvier 2025

T1249/22: connaissances générales, les Directives doivent être nuancées

Comme indiqué hier, la décision T1249/22 est également intéressante en ce qu'elle nuance la position prise par les Directives concernant la preuve des connaissances générales.

La Chambre critique le fait d'avoir considéré l'ouvrage D5 comme représentatif des connaissances générales. D5 est un livre regroupant 43 articles individuels de différents auteurs. D5 est en réalité plus proche d'un recueil de présentation faites lors d'une conférence que d'un manuel de référence. Le simple fait que les articles soient regroupés dans un seul livre ne fait pas de ce dernier une seule et unique pièce d'art antérieur.

Le fait qu'un document soit considéré comme une preuve qu'un enseignement donné faisait partie des connaissances générales doit se faire au cas par cas selon le principe de libre appréciation de la preuve. Le fait qu'un document soit un livre ou un manuel peut être pertinent, mais n'est pas décisif.

Tout ce qui est écrit dans un livre, ou même dans un manuel, ne fait pas nécessairement partie des connaissances générales à la date de sa publication. Par exemple, un manuel peut comprendre une partie dans laquelle les auteurs présentent un logiciel particulier développé dans leur groupe de recherche. Les détails sur ce logiciel ne faisaient pas nécessairement partie des connaissances générales auparavant ou n'en font pas nécessairement partie du fait de la publication du manuel.

A l'opposé, une déclaration faite dans l'introduction d'un article scientifique, selon laquelle une mesure était courante pour obtenir un effet particulier, peut établir des connaissances générales (voir aussi, dans le même sens, la décision de la division centrale de la JUB du 27/11/2024 s'agissant de déclarations faites dans l'introduction d'une demande de brevet).

La Chambre nuance donc les Directives G-VII 3.1, selon lesquelles les informations figurant dans un manuel le sont car elles faisaient déjà partie des connaissances générales.


Décision T1249/22

lundi 20 janvier 2025

T1249/22: approche alternative pour les inventions de type mixte


L'invention concernait le développement - y compris l'entraînement - d'un modèle analytique (par exemple, un modèle d'apprentissage automatique) et le déploiement du modèle analytique entraîné sur un « moteur de calcul » afin de traiter les données entrantes en direct, le but étant de permettre aux experts du domaine, ainsi qu'aux scientifiques et ingénieurs en données, d'effectuer ces tâches rapidement et facilement.


La Demanderesse reprochait à la division d'examen de n'être pas partie d'un document de l'état de la technique particulier, mais la Chambre valide l'approche de la division d'examen.

Dans le cas des inventions qui se rapportent à une mise en œuvre technique d'une méthode non-technique (qui ne contribue pas au caractère technique de l'invention), la Chambre considère comme valide une approche consistant à: 

  1.  identifier d'une part la méthode non-technique et d'autre part les caractéristiques de sa mise en œuvre technique, 
  2. définir comme problème technique le fait de proposer une mise en œuvre de cette méthode fournie à la personne du métier (technique) en tant que spécification des besoins non-techniques, 
  3. évaluer si la personne du métier aurait résolu ce problème technique en proposant la mise en œuvre technique revendiquée.

Dans cette approche, le choix de l'infrastructure informatique sur laquelle la méthode doit être mise en œuvre est considéré comme faisant partie de la solution technique et l'évaluation de l'activité inventive implique d'évaluer s'il aurait été évident de choisir cette infrastructure. 

Cette approche diffère de l'approche partant de l'infrastructure comme "état de la technique le plus proche", dans laquelle le problème technique objectif consiste à proposer une mise en œuvre de la méthode sur cette infrastructure. 

Lorsque l'infrastructure informatique se résume à un système couramment employé pour le même type de méthodes non-techniques (par exemple une architecture client-serveur ou un simple ordinateur), les deux approches aboutiront au même résultat, mais ce ne sera pas forcément le cas lorsque le choix d'une infrastructure spécifique n'aurait pas été évidente pour la méthode non-technique en question (T1325/17).

La Chambre considère en revanche que la décision n'est pas suffisamment motivée car il ne ressort pas clairement quelles caractéristiques ont été considérées comme non-techniques et pourquoi. Le fait de souligner les caractéristiques techniques dans le libellé de la revendication n'est pas suffisant.

La décision comprend également des éléments intéressant sur la notion de connaissances générales, qui seront résumés demain.

Décision T1249/22

jeudi 16 janvier 2025

T832/22: le standard « au-delà du doute raisonnable » n'exige pas une certitude absolue

La question essentielle dans le présent recours était de savoir si le document D9, un manuel technique de l'Opposante, faisait partie de l'état de la technique. 

La division d'opposition avait considéré que cela n'avait pas été prouvé au-delà de tout doute raisonnable car les différents éléments de preuve présentés par l'Opposante étaient contradictoires.

La Chambre rappelle le principe de libre évaluation de la preuve, et souligne que ce qui est décisif est le fait d'emporter la conviction des juges (G2/21, 31). Il est donc difficile de quantifier la différence entre le standard "balance de la probabilité" et le standard "au-delà de tout doute raisonnable". Pour la présente Chambre, s'agissant de ce deuxième niveau de preuve, il semble plus opportun de se concentrer sur le terme "raisonnable". Le standard « au-delà du doute raisonnable » n'exige pas une certitude absolue et il suffit que les (la majorité des) membres de l'organe décisionnaire n'aient aucun doute raisonnable quant à la survenance d'un fait allégué. En d'autres termes, même s'il subsiste un doute, le niveau de preuve « au-delà de tout doute raisonnable » peut être respecté tant que le doute subsistant n'est pas raisonnable, ce qui peut être compris comme globalement insubstantiel au vu de l'ensemble des preuves disponibles.

En l'espèce, la Chambre ne décide pas quel niveau doit être appliqué car même en appliquant le niveau de preuve le plus élevé elle est convaincue que le document D9 était accessible au public. 

En effet, le document D39, brièvement mentionné dans la décision attaquée et qui est un rapport forensique établi par une société spécialisée (Bit4Law), établit que le manuel D9, daté du 30.10.2014, a été chargé sur un serveur web public le 19.11.2014. La crédibilité de D39 et la méthodologie utilisée n'ont pas été critiquées par la Titulaire. Les autres preuves fournies ne contredisent pas la conclusion quant à la date de publication de D9. Les personnes ayant déclaré que le document avait été mis sur Internet le 30.10.2014 n'étaient pas celles responsables de la mise en ligne, et le fait que les événements aient eu lieu 10 ans auparavant explique certaines inexactitudes. 

 Décision T832/22

lundi 13 janvier 2025

T1345/23: les deux interprétations étaient techniquement sensées

Un lecteur, que je remercie, me signale cette décision intéressante.

Dans le cathéter revendiqué, une douille proximale 206 était montée sur l'extrémité distale de la tige de cathéter, et la partie proximale de chacun des bras 188, 190, 192 et 194 s'étendait à travers la douille proximale.


L'Opposante argumentait que à travers devait s'interpréter en ce que la partie proximale des bras s'étendait sur toute la longueur de la douille proximale (interprétation a)), ce qui était contraire à l'article 76(1) CBE.

La Titulaire argumentait au contraire qu'il fallait comprendre que la partie proximale des bras s'étendait le long d'une partie au moins de la douille proximale (interprétation b)), ce qui était supporté par la demande parente telle que déposée.

La Chambre reconnait que les deux interprétations sont à la fois linguistiquement et techniquement sensées. Mais elle n'est pas d'accord avec la décision T1791/16, selon laquelle il convient de considérer toutes les interprétation techniquement sensées et il suffit que l'une d'elles s'étende au-delà du contenu de la demande initiale pour enfreindre l'article 123(2) CBE. Pour la présente Chambre il convient au contraire de déterminer comme la personne du métier interpréterait la caractéristique incriminée, dans le contexte technique de la revendication 1.

Si la revendication 1 porte sur un cathéter, son contenu concerne plutôt la pointe du cathéter et les éléments qui s'y trouvent. La personne du métier comprend que pour assurer un couplage entre la pointe et l'extrémité distale de la tige du cathéter, il suffit que la partie proximale des bras s'étende partiellement à l'intérieur de la douille, et qu'il n'est nul besoin qu'elle traverse toute la douille.

La Chambre note en outre qu'une revendication doit être interprétée de manière uniforme et cohérente, que ce soit pour évaluer l'extension de l'objet et la nouveauté. Or, l'interprétation b) est plus large que l'interprétation a), de sorte que dans la présente affaire, l'approche suggérée par la décision T1791/16 reviendrait à retenir une interprétation restreinte d'une caractéristique ambigüe, ce qui est contraire à la jurisprudence établie.

Décision T1345/23

jeudi 9 janvier 2025

T2241/22: combinaison de deux bornes supérieures

Selon la revendication 1 du brevet, le rapport entre la rigidité du support flexible et celle du cadre était supérieur à 11% et inférieur à 20%. Selon la demande parente telle que déposée, ce rapport était de préférence inférieur à 20%, et même inférieur à 11%.


La division d'opposition avait révoqué le brevet, considérant que la gamme ]11-20%[ ne découlait pas de manière directe et non ambigüe de la demande parente.

La Chambre ne partage pas cet avis. De par la divulgation <20% et <11%, la personne du métier reconnaît l'existence de la gamme supplémentaire 11-20% comme une divulgation implicite. Cette gamme découle donc directement et sans ambiguïté de la demande antérieure telle qu'elle a été déposée, en faisant appel aux connaissances générales courantes, sans qu'il soit nécessaire d'avoir des connaissances plus approfondies qu'une simple arithmétique.

En outre, cette gamme n'est pas en contradiction avec l'enseignement de la demande parente et une personne du métier envisagerait sérieusement aussi bien un rapport inférieur à 11% qu'un rapport supérieur à 11%, qui est la seule autre option dans la gamme générale < 20% (voir aussi T2/81).

La présente affaire se distingue de la décision T1477/21, dans laquelle la demande comprenait une plage générale, neuf sous-plages ainsi que plusieurs plages ouvertes, qui ont été considérées comme des modes de réalisation distincts ne permettant pas à la personne du métier d'établir un lien entre elles ou même un ordre de préférence.

Le présent cas est similaire à l'affaire T113/19, dans laquelle la demande enseignait que les surfaces spécifiques supérieures à 10m²/g étaient satisfaisantes et les surfaces spécifiques supérieures à 15m²/g étaient encore plus satisfaisantes, de sorte que la personne du métier n'aurait pas écarté les compositions ayant une surface spécifique comprise entre 10 et 15m²/g.

Enfin, le fait que la demande ne contienne aucun exemple dans la gamme revendiquée n'est pas pertinent.

Décision T2241/22

NB: dans la décision T1477/21, la Chambre n'avait pas accepté que la gamme 5-30µm découle de manière directe et non ambiguë du paragraphe suivant:

the polymer film has a thickness of from about 5 µm to about 3 mm, for example, from about 5 µm to about 2 mm, or from about 5 µm to about 1 mm, or from about 10 µm to about 500 µm, or from about 10 µm to about 250 µm, or form about 10 µm to about 150 µm, or from about 10 µm to about 100 µm, or from about 20 µm to about 100 µm, or from about 30 µm to about 100 µm, or from about 30 µm to about 80 µm. In certain embodiments, the polymer film has a thickness of at least about 20 µm, or at least about 30 µm, or at least about 50 µm, or at least about 100 µm, or at least about 150 µm, or at least about 200 µm, or at least about 250 µm.


lundi 6 janvier 2025

T314/20: interprétation de G2/21

Le point crucial dans l'affaire en cause était de savoir si la Titulaire prouvait se prévaloir d'un effet technique associé à la combinaison revendiquée d'empagliflozine et de linagliptine, deux antidiabétiques. Selon la Titulaire, le document post-publié D56 montrait une augmentation des teneurs GLP-1 par rapport à d'autres combinaisons (empagliflozine + sitagliptine ou vildagliptine).


Selon G2/21, un effet technique peut être invoqué pour justifier l'activité inventive si la personne du métier, ayant en tête les connaissances générales et se fondant sur la demande telle que déposée, déduirait cet effet comme "(i) étant englobé dans l'enseignement technique et (ii) faisant partie de la même invention initialement divulguée". 

Dans la décision T116/18, la Chambre a considéré que les deux conditions étaient cumulatives et séparées et que leur but était d'éviter de breveter des inventions spéculatives, qui n'ont pas été réellement faites à la date de dépôt. La présente Chambre est en accord avec ces conclusions. Elle critique toutefois le fait que dans l'affaire T116/18 la Chambre ait finalement utilisé le critère de non-plausibilité ab initio alors que la Grande Chambre ne s'est référée à aucun des standards de plausibilité précédemment utilisés dans la jurisprudence. 

La présente Chambre choisit l'approche suivante: si l'existence de l'effet technique ou sa généralisation est spéculative, par exemple parce que les données pertinentes n'ont pas encore été générées ou n'ont pas été divulguées dans la demande, la titulaire ne peut se prévaloir de l'effet en cause.

La Chambre estime qu'en l'espèce une personne du métier ne serait pas attendue, sur la base de la demande de brevet, à une augmentation des taux de GLP-1 actifs grâce à une combinaison d'empagliflozine et de linagliptine, par rapport à une combinaison d'empagliflozine avec la sitagliptine ou la vildagliptine. 

Cet effet n'est non seulement pas rendu crédible par la demande telle que déposée, mais contredit même son enseignement technique. Dans la demande, l'augmentation de GLP-1 est en effet obtenue pour toutes les combinaisons de composés initialement revendiquées (dont les combinaisons maintenant comparatives), et il ne ressort pas que la combinaison maintenant revendiquée présenterait de meilleurs résultats. L'effet technique ne peut donc être pris en compte pour l'examen de l'activité inventive.


Décision T314/20

 
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