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lundi 15 octobre 2012

T2266/10 : Art 83 et virus


Une fois n'est pas coutume, une décision dans le domaine de la biotechnologie. J'espère que les lecteurs avertis pardonneront mon manque de connaissances en la matière, et corrigeront si besoin est.

Le brevet en question porte sur des variants de rétrovirus HIV-3 déposés auprès de l'ECACC (European Collection of Cell Cultures) sous le numéro  V88060301.

Plus précisément, la requête principale portait sur des parties de molécule d'acide nucléique contenant au moins une partie de l'ADNc correspondant à l'ensemble du génome à ARN de la souche en question, et sur son utilisation pour le diagnostic in vitro d'une infection à HIV-3.

Lorsqu'une matière biologique ne peut être décrite dans la demande de brevet, les exigences de suffisance de description ne sont respectées que si la matière a été déposée auprès d'une autorité habilitée, au plus tard à la date de dépôt.

Plusieurs objections ont été soulevées par les Opposantes.

Premièrement,  le dépôt de matière (du 3.6.1988) avait été fait au nom d'Innogenetics S.A., Anvers, tandis que la demande avait été déposée au nom d'Innogenetics N.V., Gand.
La requérante ayant fourni une déclaration montrant qu'Innogenetics S.A./N.V. avait plusieurs bureaux, et que ces bureaux appartenaient à la même entité juridique, la Chambre considère que le dépôt de matière respectait les exigences de la R28 CBE1973.

Deuxièmement, l'intimée faisait valoir qu'elle n'avait pas pu obtenir de souche entre mars et juillet 2004.
La requérante a pu démontrer qu'elle a été informée le 16.08.2004 par l'ECACC du besoin de redéposer une souche. Lorsque le matière cesse d'être viable ou que l'autorité de dépôt ne dispose plus d'échantillons, il était nécessaire de redéposer la matière dans un délai de 3 mois après requête (Art 4 du traité de Budapest et R.28bis CBE 1973), et d'informer l'OEB dans un délai de 4 mois après redépôt (R. 28bis CBE 1973).
Les preuves fournies (redépôt le 10.11.2004 et information de l'OEB le 2.3.2005) satisfont la Chambre.

Troisièmement, l'intimée a déposé des preuves expérimentales afin de prouver que le virus initialement déposé en 1988 et le virus redéposé en 2004 étaient différents, une séquence d'ADN (faisant partie de la séquence de l'enveloppe du rétrovirus) étant présente dans celui de 1988 et absente dans l'autre.
L'intimée rappelle que la division d'examen a été avertie dès 1993 que les séquence d'enveloppe étaient d'origine non-virale. Le dépôt d'origine contenait des cellules infectées par la souche revendiquée et, apparemment des contaminants. Un document D48 montre que la séquence d'enveloppe a probablement pour origine un Mycoplasma. La présence d'une telle séquence est, pour la Chambre, non décisive. L'amplification des séquences spécifiques HIV-3 à partir des souches redéposées en 2004 révèle que la séquence ne diffère qu'en 3 positions sur 355 des séquences HIV-3 connues. Cela n'est pas une preuve absolue que la même souche a été redéposée. Néanmoins, les virus HIV sont connus pour changer rapidement leur séquences d'acides nucléiques et on ne peut exclure que le dépôt d'origine présentait déjà ces 3 différences. La charge de la preuve revient à l'opposante, qui n'a pas apporté de preuve contraire.

L'affaire est renvoyée en première instance pour discuter d'un "nombre considérable" d'autres objections, au titre des Art 54, 56, et également 83... sachant que le brevet a expiré en 2008.
A noter que la division d'opposition avait mis presque 3 ans (!) pour envoyer la décision écrite de révocation.

Décision T2266/10

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1 comments:

Roufousse T. Fairfly a dit…

A noter que la division d'opposition avait mis presque 3 ans (!) pour envoyer la décision écrite de révocation.

Et encore, ce n'est rien en comparaison avec une demande divisionnaire issue de la même demande antérieure: on est encore en examen! En supposant un refus, un recours, un renvoi en examen, une délivrance, une opposition, et un recours (sans renvoi), on devrait en avoir jusqu'au 40ème anniversaire de la demande, si on a de la chance... Elle aura occupé deux ou trois générations d'examinateurs et de mandataires. Les acteurs auront appris chaque mot du dossier au point de pouvoir les déclamer au théâtre.

Le délai est toutefois aussi du fait du demandeur, qui désirait attendre l'issue du recours dans l'affaire apparentée.

En supposant qu'un brevet soit délivré, je me demande s'il y a prescription en matière de faits de contrefaçon. Il deviendra de plus en plus difficile d'évaluer la preuve de contrefaçon, même si elle aura été réunie à temps, et les contrefacteurs auront intérêt à brouiller les pistes, par le jeu des fusions, acquisitions et cessions d'intérêts.

Le système de dépôt de matière biologique me rappelle quelque part cette exigence du droit US du XIXème siècle qui exigeait le dépôt de modèles des inventions.

 
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