La Chambre ayant considéré que la suspension de pigments revendiquée était évidente, la Titulaire avait proposé une revendication portant sur l'utilisation des pigments dans une formulation d'encre flexographique pour obtenir les effets suivants: moins de défauts d'impression, un pouvoir couvrant plus élevé et des couleurs plus intenses, tout en permettant l'utilisation d'un anilox à plus faible volume.
L'Opposante argumentait que les caractéristiques fonctionnelles étaient définies en termes relatifs et concernaient des concepts peu définis, ce à quoi la Titulaire rétorquait que la jurisprudence acceptait ce type de revendications, faisant notamment référence à la "réduction de la friction" de G2/88.
La Chambre estime que la revendication n'est pas claire.
Elle fait tout d'abord remarquer que les revendications d'utilisation doivent être aussi claires que les autres. Dans G2/88 et G6/88, l'utilisation porte sur un effet technique qui est objectivement distinct de celui connu de l'art antérieur (réduction de la friction / anti-corrosion, régulation de la croissance des plantes / antifongique). Dans de tels cas, l'effet peut légitimement être défini en des termes larges. Si l'invention est basée sur la découverte d'un nouvel effet technique il est en effet généralement accepté de définir l'effet en termes larges, à condition que l'effet soit suffisamment distinct pour délimiter clairement la portée par rapport à l'art antérieur.
Le cas d'espèce est différent en ce que D10 concerne un but analogue: dans D10 les pigments sont aussi utilisés dans une encre flexographique. La seule différence est que la revendication spécifie que son utilisation améliore différents aspects de la qualité d'impression alors que D10 rapporte en son exemple comparatif 8 que l'encre est comparativement inférieure à d'autres alternatives. En outre, dans l'exemple 2 de D2, cité dans D10, l'additif procure le même effet que celui décrit dans le brevet, à savoir empêcher l'agglomération du pigment.
L'utilisation revendiquée ne cherche pas à définir un effet technique distinct mais plutôt des améliorations relatives. Dans un tel cas, l'article 84 CBE ne peut être respecté que si l'amélioration est définie d'une manière qui procure une portée claire et objectivement vérifiable. Il serait autrement impossible de vérifier si une utilisation tombe ou pas dans la portée, par exemple celle de l'exemple comparatif 8 de D10.
Dans le cas d'espèce aucun critère objectif n'est disponible pour déterminer le nombre de défauts d'impression, le degré de couvrance, l'intensité de la couleur ou le volume de l'anilox peuvent être considérés comme suffisamment faibles ou élevés pour que d'autres utilisations entrent ou sortent du champ d'application de la revendication.
Lorsqu'une invention revendiquée est définie par l'utilisation d'une entité connue pour obtenir un effet ou un objectif technique connu, et que la contribution technique alléguée réside dans une amélioration ou un renforcement relatif de cet effet ou de cet objectif, l'exigence de clarté prévue à l'article 84 CBE impose généralement que la caractéristique définissant cette amélioration ou ce renforcement relatif soit exprimée en termes objectivement vérifiables, garantissant ainsi la sécurité juridique quant à l'étendue de la protection.
Décision T2387/22