Cette décision concerne l'affaire à l'origine de la saisine de la Grande Chambre sur la brevetabilité des méthodes de simulation (G1/19).
Pour mémoire, la demande portait sur la simulation informatique d'une foule de piétons dans un environnement, utilisable dans le cadre d'un procédé de conception de lieux tels qu'un stade ou une gare. La demande décrit un algorithme de simulation de piétons, permettant de construire un modèle d'un environnement. Le concepteur du lieu peut créer ou importer un design architectural et simuler le mouvement des foules, et si besoin revoir le design.
Selon G1/19, une méthode de simulation mise en œuvre par ordinateur peut en soi résoudre un problème technique en produisant un effet technique allant au-delà de la mise en œuvre sur un ordinateur. Il ne suffit pas que la simulation se base, en tout ou partie, sur des principes techniques sous-tendant le système ou procédé simulé. Si les données sont spécifiquement adaptées au contrôle d'un dispositif technique, l'effet technique résultant de l'utilisation des données prévue peut être considéré comme implicite, à condition que les données n'aient pas d'autres utilisations pertinentes possibles.
Des données simulées peuvent donc, dans des cas exceptionnels, avoir un "effet technique implicite", mais une revendication sans limitation au moins implicite à une utilisation technique soulèvera une objection se basant sur le fait que l'objet revendiqué n'est pas technique sur toute sa portée. Un effet technique implicite peut être pris en compte si les données simulées permettent d'obtenir un effet technique réel lorsqu'elles sont utilisées pour l'usage prévu (et seul pertinent). Au contraire, le simple fait de fournir des données qui correspondent fidèlement à des effets techniques d'entités physiques n'est pas un effet technique à prendre en compte.
En conséquence, les données simulées dans le cas d'espèce, qui reflètent le comportement d'une foule, ne contribuent pas à un effet technique, car l'usage potentiel de ces données n'est pas limité à un but technique: elles peuvent être utilisées dans des jeux vidéos ou être présentées à un être humain pour obtenir des informations sur l'environnement modélisé, deux exemples d'utilisation non-techniques entrant dans le cadre de la revendication.
Dans une requête subsidiaire, la simulation faisait partie d'une méthode de conception d'un bâtiment. Mais la conception est normalement de nature cognitive (G1/19, 143). L'étape ajoutée pouvant être réalisée par un être humain, elle ne peut contribuer à l'activité inventive.
La production d'un modèle révisé d'une structure de bâtiment peut encore être utilisée dans des buts non-techniques (par exemple pour un jeu vidéo) et ne contribue pas non plus à un effet technique. Du reste, la simulation n'influence pas le modèle révisé, la révision pouvant être réalisée par un être humain.
Le fait de préciser que les données d'éntrée sont des données qui ont été mesurées ne change rien: d'une part la représentation plus fidèle alléguée n'est pas un effet technique et d'autre part la revendication ne comprend pas d'étape de mesure. Même si cette étape faisait partie de la revendication, cette mesure et la simulation ne seraient que juxtaposées, elles n'intéragisseraient pas de manière à produire un effet technique combiné.
4 comments:
Si je comprends bien la G fonde l'un de ses arguments sur le fait qu'un jeu vidéo est de nature non technique.
Un déplacement simulé de personages dans un jeu vidéo me semble pourtant être de nature technique.
J'ai tout faux?
Cette décision me laisse quelque peu perplexe. Je ne suis pas convaincu par l'argumentaire qui vise apparemment à nier tout caractère ou effet technique. Il me semble bien au contraire que la simulation en question vise à permettre la mise en évidence d'obstacles ou défauts entravant les mouvements de foule et donc l'adaptation de l'architecture/configuration du lieu en amont de sa réalisation concrète. Cette simulation offre à mon sens un avantage technique concret en ce qu'elle évite des adaptations potentiellement complexes et coûteuses après la réalisation du lieu en question. Je comprends donc difficilement l'obstination de la Chambre de recours à nier cela.
L'issue de cette demande ne faisait guère de doute dès lors que l'on se penchait sur la notification annexée à la convocation.
La CR a insisté sur le fait que le procédé n'avait pas de prise tant sur la réalité physique externe que sur la réalité physique "interne" du système informatique dans lequel l'invention est mise en œuvre.
La modification de l'architecture reste toute théorique et ne résulte pas automatiquement de la mise œuvre du procédé de simulation. Il n'y a pas de lien entre la réalité physique et la simulation et c'est ce point qui a emporté la décision.
Pour ce qui est de la réalité physique "interne" du système informatique dans lequel l'invention est mise en œuvre, rien de nouveau. Cette condition est bien ancienne.
Les RA 1-à 4 n'ont rien rien changé et les mêmes raisons que pour la RP s'y appliquent.
Les RA 7 à 9 ont été admises bien que tardives, mais non rien changé. La précision de la simulation a été améliorée, mais ne changeait quant au caractère non technique.
Les RA 10 et 11 concernent une méthode de contrôle du mouvement d'une entité telle qu'un robot.
Les dixième et onzième requêtes auxiliaires représentent un passage de l'invention revendiquée à un objet qui, bien que présent dans les revendications déposées à l'origine,
n'a délibérément pas été poursuivi dans la procédure de première instance. Le couperet des Art 12(4), 13(1 et 13(3) RPCR07 est tombé.
La décision est logique en ce qu'elle souligne l'importance d'un effet concret dans un domaine d'utilisation spécifié. Ce qui doit attirer l'attention des praticiens sur l'inclusion dans la description d'informations sur les effets/avantages obtenus dans des domaines d'utilisation spécifiques.
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