Par Oliver Randl
Le breveté avait d'abord déposé une demande EP ("D40") revendiquant une "composition biocide en tant qu’additif de substances que peuvent infester des micro-organismes nuisibles, où la composition biocide présente au moins deux substances actives biocides dont l’une est la 2-méthylisothiazolin-3-one, caractérisée en ce que la composition biocide contient comme autre substance biocide la 1,2-benzoisothiazolin-3-one."
Suite au rapport de recherche négatif (on lui oppose notamment D3 et D11), il a déposé, sous priorité de D40, une demande PCT revendiquant une "composition biocide en tant qu’additif de substances que peuvent infester des micro-organismes nuisibles, où la composition biocide présente au moins deux substances actives biocides dont l’une est la 2-méthylisothiazolin-3-one, caractérisée en ce que la composition biocide contient comme autre substance biocide la 1,2-benzoisothiazolin-3-one, exception faite des compositions biocides avec une teneur en 5-chloro-2-méthylisothiazolin-3-one (CMIT)."
La division d'opposition a reconnu la validité de la priorité, mais révoqué le brevet pour défaut de nouveauté par rapport à D3.
En appel, la Chambre constate que D3 ne détruit pas la nouveauté.
En ce qui concerne la priorité toutefois : "L’objet de la demande telle que déposée et du brevet délivré se distingue de celui du document prioritaire (D40) seulement en ce que les compositions CMIT ont été exclues des compositions revendiquées." [4.1.2]
La requérante est d’avis que le brevet revendique sa priorité valablement, car il ressort des exemples de D40 que seuls des mélanges sans CMIT sont considérés. Le « disclaimer » concrétise donc l’enseignement du paragraphe [0006] de D40. [4.1.3]
Selon la décision G 2/98, la condition requise à l'article 87(1) pour qu'il puisse être revendiqué la priorité d'une demande portant sur « la même invention » signifie qu'il ne convient de reconnaître qu'une revendication figurant dans une demande de brevet européen bénéficie de la priorité d'une demande antérieure conformément à l'article 88 que si l'homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble. [4.1.5]
La Chambre estime que cette condition n’est pas remplie du seul fait que les compositions revendiquées, y compris le disclaimer, ne dépassent pas le contenu d’ensemble du document de priorité. Une limitation en tant que telle n’est en effet pas suffisante pour reconnaître le droit de priorité si l’objet limité ne peut pas être déduit directement et sans ambiguïté de la demande prioritaire. [4.1.6] Pour la Chambre il ne fait pas de doute que le document de priorité (D40) divulgue un enseignement différent de celui de l’invention du brevet litigieux, car la présence de CMIT dans les compositions de D40 n’est pas exclue mais au contraire est explicitement prévue. Par conséquent, l’homme du métier ne peut, même en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l'objet de la revendication 1 dans son ensemble de la demande prioritaire. [4.1.10]
La priorité ne peut pas être reconnue. [4.1.11]"
La priorité n'étant pas valablement revendiquée, le propre document de priorité devient un art antérieur au sens de l'Art 54(3), ce qui est fatal au brevet. Si la priorité avait été un premier dépôt national, les conséquences auraient été moins graves.
dimanche 25 janvier 2009
T 1443/05 : un "disclaimer" peut faire perdre le droit de priorité
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12 comments:
"La priorité n'étant pas valablement revendiquée, le propre document de priorité devient un art antérieur au sens de l'Art 54(3), ce qui est fatal au brevet".
J'avoue avoir un peu de mal à comprendre ce dernier commentaire. En effet, le document de priorité devient bien un art antérieur au sens de l'Art 54(3), mais je ne vois pas en quoi cela devient fatal au brevet. Si le raisonnement ayant conduit à la perte de droit de priorité est basé, comme c'est le cas, sur le fait que le brevet et le document de priorité divulguent des objets différents (du fait de l'introduction du disclaimer), alors le document de priorité ne peut pas détruire la nouveauté du brevet. Et comme un art antérieur de type Art 54(3) ne peut pas être utilisé au titre de l'activité inventive, la revendication du brevet avec le disclaimer devrait être valable.
Les exemples de la demande de priorité, entre autres, antériorisent la revendication du brevet.
L'objet du brevet (tel qu'il est revendiqué dans sa généralité) ne découle pas directement et sans ambiguité de la demande prioritaire, d'où la perte de priorité.
Mais cela n'empêche pas que certains objets de la demande prioritaire antériorisent quand même le brevet.
C'est toute la différence entre test de nouveauté et test du "découle directement et sans ambiguité".
Citer G2/98, c'est bien, mais la question est plutôt, d'après ce que je cromprends : "le disclaimer est-il conforme à G1/03 ?"
notamment, est-il un disclaimer minimal, n'excluant que ce qui est strictement nécessaire pour rétablir la nouveauté vis à vis d'un art antérieur 54-3 ou d'un art antérieur 54-2 fortuit ?
G1/03 n'est pas applicable ici :
Le disclaimer était dans la demande déposée, donc il n'y a pas de pb de 213(2).
Par contre, d'après G1/03, un disclaimer introduit après le dépôt ne fait pas perdre la priorité s'il est admissible.
123(2) pardon, pas 213(2) ;-)
"Par contre, d'après G1/03, un disclaimer introduit après le dépôt ne fait pas perdre la priorité s'il est admissible."
Tout à fait. Mais admissible selon les critères de G1/03.
Donc G1/03 s'applique.
La question est de savoir s'il s'agit d'un disclaimer minimal, n'excluant que ce qui est strictement nécessaire pour rétablir la nouveauté vis à vis d'un art antérieur 54-3 ou d'un art antérieur 54-2 fortuit.
Si c'est le cas, la priorité est valable, sinon, elle n'est pas valable.
La décision G1/03 le dit au point 4des motifs : "un disclaimer ... admissible ... peut être introduit lors du dépôt sans affecter le droit de priorité".
J'ai du mal à croire que cette décision est correcte compte tenu de ce qui est dit dans G 1-2/03 :
"[Le disclaimer] peut donc être introduit également lors de la rédaction et du dépôt de la demande de brevet européen, sans affecter le droit de priorité fondé sur la 1ère demande qui ne contient pas le disclaimer."
Vous avez cité le bon passage de G2/03 mais
La question est de savoir s'il s'agit d'un disclaimer minimal, n'excluant que ce qui est strictement nécessaire pour rétablir la nouveauté vis à vis d'un art antérieur 54-3 ou d'un art antérieur 54-2 fortuit.
Si c'est le cas, la priorité est valable, sinon, elle n'est pas valable.
ici, vraisemblablement, ce n'est pas le cas
Je ne crois pas. Les critères de G 1/03 et G 2/03 ne semblent pas s'appliquer ici. Ces décisions traitent de l'admissibilité de disclaimers vis à vis de l'art. 123(2). Ici ne se pose aucun problème relatif à l'art. 123(2) vu que le disclaimer était initialement présent dans la demande, comme l'a déjà dit quelqu'un dans un commentaire précédent. Il manque donc une étape dans le raisonnement si l'on veut dire que les critères de G 1/03 et G 2/03 doivent être appliqués ici. Mais est-ce vraiment possible ?
Les critères de G1/03 s'appliquent aussi au moment du dépôt. Pourquoi ne s'appliqueraient-ils pas ?
Le disclaimer a pour but de rétablir la nouveauté vis à vis d'un 54-3 ou d'un 54-2 fortuit. Si le demandeur connaît déjà ce document destructeur de nouveauté au moment du dépôt sous priorité, pourquoi devrait-il attendre la phase d'examen pour introduire son disclaimer ?
G1/03 dit donc au motif 4
"[Le disclaimer admissible selon les critères définis dans cette décision de la GCR] peut donc être introduit également lors de la rédaction et du dépôt de la demande de brevet européen, sans affecter le droit de priorité fondé sur la 1ère demande qui ne contient pas le disclaimer."
G1/03 s'applique par analogie, dans le sens où la priorité et l'Art 123(2) utilisent le même test.
C'est d'ailleurs pour cela que la GCR a admis que le disclaimer admissible ne faisait pas perdre la priorité.
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