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lundi 24 avril 2023

T1099/21: le manque de clarté d'une caractéristique n'excuse pas son remplacement

Le brevet avait pour objet une composition de peinture (notamment pour bateau) comprenant des biocides, en particulier de l'isothiazolone libre. Pendant l'examen, la demanderesse avait modifié la teneur maximale en biocide libre, en remplaçant une définition fonctionnelle (quantité telle que la Tg du polymère n'est pas réduite de plus de 20°C) par une teneur fixe (15%).



Le fait de ne pas réduire la Tg de plus de 20°C était une caractéristique essentielle pour résoudre le problème technique, en particulier ne pas compromettre l'intégrité de la peinture. Le fait d'avoir supprimé cette caractéristique essentielle était donc contraire à l'article 123(2) CBE.

La Titulaire argumentait qu'elle n'avait pas supprimé cette caractéristique, mais qu'elle l'avait simplement remplacé par une valeur numérique, divulguée dans la demande telle que déposée. La Chambre n'est toutefois pas convaincue, étant donné que la demande n'enseigne pas que cette limite de 15% est identique à la caractéristique supprimée. La question de savoir si la Tg est réduite de plus de 20°C ou pas va dépendre du polymère, et il est fort possible que la revendication couvre des cas dans lesquels une teneur de 15% conduit à réduire la Tg de plus de 20°C.

La Titulaire argumentait également que la caractéristique fonctionnelle ne pouvait être interprétée par la personne du métier comme définissant une limite. Le remplacement effectué permettait de répondre aux objections soulevées au titre des articles 83 et 84 CBE et était donc admissible.

Mais la Chambre rétorque que toute manque de clarté pouvant résulter d'une ambiguïté dans une demande telle que déposée se fait au détriment du titulaire du brevet, qui est en fin de compte responsable de la rédaction de la demande et de ses revendications. Le fait qu'une caractéristique de la demande ne soit pas claire ne peut donc pas justifier ou excuser la suppression complète de cette caractéristique ou son remplacement par une autre caractéristique si cela entraîne une extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée. Ce qui a incité un titulaire de brevet à apporter une modification particulière aux revendications ne peut avoir aucune influence sur le résultat de l'évaluation du motif d'opposition au titre de l'article 100(c) CBE.


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7 comments:

Anonyme a dit…

Décision "créative" si l'on veut être gentil. La chambre a transformé ce qui aurait dû être traité sous l'angle de l'article 84 deuxième partie (manque de support) ou, tout au plus, de l'insuffisance ou de la manque d'activité inventive, en une objection d'ajout de matière. Je dirais que la chambre a fait exactement ce qui est souvent imputé aux parties, c'est-à-dire identifier une définition de l'invention basée sur certaines parties de la description (article 69, où es-tu ?) et ignorer d'autres passages, même s'ils sont contenus dans la description, s'ils sont incompatibles avec cette définition

Anonyme a dit…

@anonyme de 9:21
L'article 84 n'était pas utilisable, le brevet a été délivré avec cette caractéristique. Et où serait le problème d'insuffisance? Choisir une teneur allant jusqu'à 15% ne paraît pas poser de difficultés particulières non ?

Anonyme a dit…

@anonyme de 10:29
Je n'ai pas dit que la chambre aurait dû discuter la validité du brevet sous l'article 84. J'ai dit que la question aurait dû se poser sous cet angle. Et que la chambre aurait dû fermer le débat même avant de le commencer car question de compétence de l’ED (ça arrive tout le temps avec la manque de clarté habillée en insuffisance).
Concernant l’insuffisance, le point aurait pu être soulevé en vue des implications du terme « coating » dans la revendication (voir point 9 de la décision). Si on considère la Tg>20 degrees comme une caractéristique essentielle d’une « coating composition », la chambre aurait pu se poser la question si il était possible de préparer une telle « coating » composition avec une teneur de 15% avec des différents polymères. Surement pas l’argument le plus fort que j’ai jamais vu. Mais tj plus pertinent que la question de matière ajoutée

Patskills a dit…

This decision appears to go contrary to the trend that, if a claim is clear in itself, its scope cannot be limited (or enlarged?) by claim interpretation, However the principle of claim interpretation with reference to the description and drawings under Article 69 EPC is usually accepted if the claim scope needs to be clarified. In the present case, the description explicitly described an embodiment with 15% which means that, contrary to the Board’s assertion, the application specifically described an embodiment leading to above the claimed amount. Therefore (i) claim 1 should be interpreted to cover this embodiment and (ii) specifying 15% in claim 1 did not and could not extend the subject matter of the application. The Board’s observation that the applicant is responsible for the claim definition and its scope is true, but in my opinion this principle does not take precedence over the clear wording of the principle of amending claims according to Article 69 EPC.

DXThomas a dit…

Observation liminaire

Le seul motif d’opposition invoqué par l’opposant était le motif selon l’Art 100(c).

J’ai donc quelques difficultés à suivre les commentaires qui se concentrent sur l’Art 84 et/ou l’interprétation en tenant compte de l’Art 69. L’Art 69 n’est pas du tout mentionné dans la décision et ce pour une bonne raison.

La CR se devait donc de rester dans le cadre de l’Art 123(2) et de procéder à une comparaison entre la revendication déposée et celle délivrée.

Pour ce qui est de l’interprétation des revendications il y a deux lignes de jurisprudence.

L’une considère que l’Art 69 doit être appliqué lors des procédures devant l’OEB, y compris pour déterminer s’il y a extension d’objet selon l’Art 123(2) et en général d’interpréter les revendications à la lumière de la description en ce qui concerne la nouveauté et l'activité inventive.

L’autre limite l’utilisation de l’Art 69 en opposition pour déterminer si les dispositions de l’Art 123(3) sont bien respectées et/ou si les revendications délivrées manquent de clarté en opposition, car les revendications délivrées ne peuvent être attaquées pour manque de clarté. Par contre, lorsque le libellé de la revendication est clair et techniquement raisonnable dans le contexte technique sous-jacent, il n'est pas justifié de s'appuyer sur la description pour restreindre la portée de la revendication en excluant des interprétations qui sont à la fois raisonnables et techniquement sensées dans le contexte technique du brevet.

Il convient de noter que, durant l’examen de nombreuses objections de manque de clarté ont été soulevées ce qui a poussé le déposant à modifier la revendication telle que déposée pour arriver à celle délivrée. Aucune objection selon l’Art 123(2) a été soulevée par la DE lors de la modification incriminée.

Dans mon blog j’ai tiré, de la présente décision, les conclusions suivantes :

Il n'est pas nécessaire qu'une caractéristique essentielle soit marquée comme telle pour avoir cette qualité. Il suffit qu'elle résulte de l'ensemble de la divulgation et, en particulier, qu'elle soit nécessaire pour résoudre les problèmes techniques abordés dans la demande telle qu'elle a été déposée.

La suppression d'une caractéristique essentielle est toujours problématique, car elle est contestable au titre de l'Art123(2), car, dans le cas contraire, l'objectif de l'invention ne peut être atteint. Toutefois, il n'y a là rien de nouveau.

Une caractéristique essentielle peut au mieux être remplacée par une caractéristique équivalente, à condition que cette caractéristique équivalente soit divulguée directement et sans ambiguïté dans les documents déposés à l'origine.

Si une caractéristique essentielle n'est pas claire dans la revendication indépendante telle qu'elle a été déposée, il n'est pas possible de soutenir que son remplacement par une caractéristique apparemment plus claire est autorisé en vertu de l'article 123, paragraphe 2.

Le demandeur est seul responsable de toute ambiguïté dans les revendications qu'il dépose. Il n'y a là rien de nouveau au regard de l'Art 113(2).

Une conclusion similaire a été tirée dans un contexte similaire dans les affaires T 427/21 ou T 92/16.

Anonyme a dit…

M. DXThomas, vous dites que la CR se devait de rester dans le cadre de l’Art 123(2) et donc "de procéder à une comparaison entre la revendication déposée et celle délivrée". Il me semblait pourtant que pour l'Art 123(2) c'était le contenu de toute la demande telle que déposée qui devait être pris en compte, pas uniquement les revendications. J'ai certainement raté une ligne de jurisprudence en la matière. Pourriez-vous m'éclairer?

DXThomas a dit…

Cher Anonyme du 28 avril 2023 à 08:32

Votre remarque est pertinente et j’aurais dû être plus précis.

Les modifications d'un brevet européen peuvent être fondées sur l'ensemble des caractéristiques divulguées à l'origine dans la demande correspondante. Voir par exemple T 81/03, Catchword 1.

Par contre le contenu d'une demande telle qu'elle a été déposée ne doit cependant pas être considéré comme un réservoir à partir duquel des caractéristiques individuelles appartenant à des sections distinctes peuvent être combinées afin de créer artificiellement une combinaison particulière. Voir par exemple T 1334/09, motifs 3.3.1, T 296/96, motifs 3.1 ou T 776/16, motifs 3.

Si le contenu d'une demande/brevet, y compris les revendications, après modification est nouveau par rapport au contenu de la demande/brevet avant modification, nous sommes en présence d'une extension du contenu de la demande/brevet telle qu'elle a été déposée à l'origine.

Cela signifie que le critère à appliquer est le test de nouveauté.

C’est par un raccourci malencontreux et qui pouvait prêtre à confusion que j’ai parlé de comparer les revendications.

 
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