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lundi 7 novembre 2022

T2194/19 : tous les modes de réalisation ne doivent pas nécessairement être couverts par la revendication

Les lectrices et lecteurs de ce blog se souviennent que l'adaptation de la description fait débat au sein des Chambres de recours depuis la décision T1989/18.

C'est maintenant à la Chambre 3.5.03 d'apporter sa pierre à l'édifice.

La division d'examen avait objecté que certains "modes de réalisation" (embodiments) n'étaient plus couverts par la revendication et demandait leur suppression de la description.



La Chambre fait remarquer que pour la division d'examen, le terme "mode de réalisation" semble devoir être un objet tombant sous la portée de l'invention telle que définie par les revendications. La division d'examen considérait également que le terme "invention" devait concerner l'invention telle que revendiquée.

Tout d'abord, selon la CBE, l'invention n'est pas toujours équivalente à l'invention revendiquée, voir par exemple T944/15 (qui concernait des questions d'exclusion de méthodes thérapeutiques).

Ensuite, l'exigence de support de l'article 84 CBE ne signifie pas nécessairement que tous les "modes de réalisation" doivent être couverts par la revendication. Cela ne découle pas non plus de la jurisprudence selon laquelle les incohérences et contradictions entre les revendications et la description doivent être évitées. Il peut exister dans certains cas des contradictions entre les revendications et un "mode de réalisation" de la description, mais la division d'examen doit justifier leur existence.

Enfin, contrairement à la division d'examen, la Chambre considère que la règle 42(1) c) CBE ne peut constituer une base juridique créant une exigence générale d'adaptation de la description aux revendications. 


19 commentaires:


  1. Vraiment je ne comprends pas cette approche. Vouloir toujours présenter quelque chose qui n'est plus couvert comme un mode de réalisation de l'invention, c'est juste une astuce des demandeurs pour tenter en cas de litige de récupérer une partie de ce qui a été abandonné pendant l'examen. Et la sécurité juridique, on s'en moque?

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  2. J'applaudis des deux mains cette décision.
    La sécurité juridique n'a pas besoin de ces "adaptations" de la description. L'article 123(3) s'en charge de manière admirable.

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  3. Ca sent la saisine...

    il va bien falloir décider ou expliquer si :
    A.84 : "Elles doivent être claires et concises et se fonder sur la description."
    et
    R42 (1)(c) : "exposer l'invention, telle qu'elle est caractérisée dans les revendications, en des termes permettant la compréhension du problème technique, même s'il n'est pas expressément désigné comme tel, et celle de la solution de ce problème ; indiquer en outre, le cas échéant, les avantages apportés par l'invention par rapport à l'état de la technique antérieure ; "
    veut dire :
    i- "la description ne peut pas contenir d'éléments non couverts par les revendication" (ligne dure des examinateurs qui demandent de supprimer tout ce qui n'est pas couvert), ou
    ii- "la description ne doit pas présenter des caractéristiques non couvertes par les revendications comme des "mises en œuvre" de l’invention »…

    ou au contraire n’interdit pas que la description peut contenir ou décrire des caractéristiques ou mises en œuvre non couvertes par les revendications.

    A un moment donné, il va bien falloir nous expliquer…

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  4. "Vraiment je ne comprends pas cette approche. Vouloir toujours présenter quelque chose qui n'est plus couvert comme un mode de réalisation de l'invention, c'est juste une astuce des demandeurs pour tenter en cas de litige de récupérer une partie de ce qui a été abandonné pendant l'examen. Et la sécurité juridique, on s'en moque?"

    Il existe le 123(3) pour la sécurité juridique des tiers. Au conseil d'en face d'être rigoureux et de le soulever en cas d'extension de la protection.

    Ce n'est pas une astuce des demandeurs, c'est une simple volonté de ne pas supprimer, au stade de la 71(3), des portions de la description "par erreur" (surtout en cabinet où les coûts des 71(3) sont très contraints). A fortiori sachant la quasi impossibilité de modifier un brevet délivré pour en corriger une erreur.

    En principe, les revendications doivent être claires, de sorte que ce qui tombe sous la portée de la protection soit relativement clair et univoque. La description ne change pas grand chose à ce fait.

    A mon sens, et comme l'Anonyme de 9:21, je suis content de cette décision, qui me semble logique (bien plus que l'approche consistant à exiger que la description ne supporte que les revendications, là où les textes ne spécifient que l'inverse).

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  5. mais que vient faire 123(3) ici ? L'article 123(3) est là pour empêcher de modifier les revendications de manière à en élargir la portée pendant une opposition ou une limitation.
    Rien à voir avec l'interprétation des revendications par les tribunaux

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  6. Attention à l'interprétation de cette décision. La Chambre de recours ne rejette de facto pas le principe ou l'idée que la description peut ou doit dans certains cas être adaptée aux revendications. La Chambre de recours rejette surtout la position, objectivement infondée, suivie par la Division d'examen qui consistait à indûment considérer que tous les "embodiments" (ou modes de réalisation) devaient nécessairement être couverts par les revendications. Il n'y a effectivement aucun fondement dans la CBE pour alléguer cela. Il y a tout simplement des "embodiments" qui tombent sous le coup des revendications, et d'autres "embodiments" qui peuvent sortir du champ de protection. En pareil cas, il convient de clarifier que ces "embodiments" non couverts ne sont pas revendiqués. La Chambre de recours se borne dans les faits à rappeler ce principe et qu'il appartient à l'instance compétence de justifier toute objection qu'elle serait amenée à formuler en cas d'incohérence entre les revendications et la description. Il ne suffit ainsi pas de simplement alléguer que tous les "embodiments" décrits doivent nécessairement être couverts par les revendications. C'est là l'erreur commise par la Division d'examen. C'est là l'objet de cette décision. La Chambre de recours ne rejette nullement l'idée que toute incohérence entre la description et les revendications devrait être corrigée.

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  7. S'agissant de l'opportunité et/ou de la nécessité d'adapter la description aux revendications, je crois malheureusement que les instances compétentes n'ont d'autre choix que d'être très strictes quant à l'application de l'Article 84 CBE, étant rappelé que la clarté n'est pas un motif d'opposition. S'il y a objectivement des incohérences entre la description et les revendications, il appartient à l'instance compétente de formuler et justifier son objection et d'inviter le demandeur/titulaire à adapter la description en conséquence. Par principe, je suis toutefois opposé à la suppression pure et simples de modes de réalisation, car cette suppression est parfois de nature à affecter l'interprétation des autres modes de réalisation. Je crois au contraire qu'il est plus recommandable d'assortir le ou les modes de réalisations concernés d'une déclaration explicite selon laquelle il(s) sort(ent) du champs de protection revendiqué. Mais cela dépend bien évidemment de l'objectif recherché. Si la stratégie du déposant est de créer un doute, alors la suppression peut s'avérer opportune. Mais c'est une fois de plus l'obligation de l'instance compétente de dûment examiner et juger si les conditions de clarté sont satisfaites.

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  8. @Anonyme de 08:36 et 10:05
    "tenter en cas de litige de récupérer une partie de ce qui a été abandonné pendant l'examen"
    Comment, en pratique, faire cela, sans contrevenir au 123(3)/L613-25(d) ? Si on part du principe que le mode de réalisation n'est pas couvert par les revendications, l'interprétation ne changera pas. Et on voit difficilement le rapport entre "récupérer ce qui a été abandonné pendant l'examen" et "l'interprétation".

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  9. Il faut saluer cette décision, qui applique l’exigence de support dans la description telle qu’elle est exprimée dans l’Article 84, sans lui ajouter de condition supplémentaire concernant les modes de réalisations non revendiqués, et affirme clairement qu’une telle condition n’a pas de base dans la CBE.
    La décision est importante, car comme elle concerne le domaine informatique, elle élargit la contestation de la pratique actuelle de l’OEB par les chambres de recours, initiée par les décisions T 1989/18 et T 1444/20 qui concernaient le domaine pharma/biotech. Elle contribue ainsi à affaiblir encore davantage l’argument selon lequel la pratique actuelle de l’OEB s’appuie sur une jurisprudence constante des chambres de recours.
    Elle apporte en outre un élément majeur, en exigeant des divisions d’examen qu’elles justifient leur objection et en soulignant cette exigence par la mise en italique de « justified ». La charge de la preuve incombe donc clairement aux divisions d’examen. L’exigence de motivation qui en découle est évidemment essentielle pour que le déposant soit en mesure de la contester.
    Si ce principe est appliqué, il devrait conduire à distinguer entre les différentes catégories d’incohérences ou de contradictions entre la description et les revendications (passages de la description reproduisant littéralement les revendications, modes de réalisation non couverts dans les revendications, présentation de caractéristiques comme « essentielles », formulations faisant référence à « l’esprit de l’invention », disclaimers concernant certaines options de réalisation), et à justifier de façon spécifique l’adaptation de la description le cas échéant par l’incertitude ou le doute que crée l’incohérence existante quant à la signification des termes des revendications.
    Ceci devrait aussi amener à éviter dans une large mesure que les divisions d’examen modifient la description dans le cadre de la notification 71(3). A ce stade, les déposants ne sont généralement plus en situation de contester les modifications.

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  10. Je me suis permis de commenter cette décision dans mon blog:

    https://blog.ipappify.de/t-2194-19-non-adaptation-of-the-description-the-saga-continues/

    J'ai aussi répondu à Mr Hagel ainsi qu'à d'autres personnes.

    Qu'une DE ne puisse pas sans justification sérieuse requérir certaines modifications de la part d'un déposant ou d'un opposant est tout à fait justifié. Mais je m’arrêterai là.

    Que les DE exagèrent avec les modifications apportées dans la demande lors de la notification selon la R 71(3) est certain, mais ne mélangeons pas les torchons et les serviettes.

    Quel peut être le poids de trois décisions, même prises dans deux domaines techniques différents, vis-à-vis de la masse énorme de décisions qui considèrent que la description doit être adaptée.

    Rien que pour cette raison, il n'y aura à mon avis pas de saisine. Une saisine est toujours risquée et n'aboutit pas toujours au résultat escompté.

    Le fait est que les trois décisions ne sont pas convaincantes, même si elles font plaisir à certains mandataires.

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  11. @DXThomas
    Il n'en reste pas moins que ces décisions confirment que ni A84, ni R42 ne disent "la description ne doit se rapporter qu'à des éléments revendiqués".

    Je comprends la dérive lors de litiges nationaux avec l'A69, mais ce n'est pas à l'OEB de pallier ces problèmes nationaux en faisant dire le contraire de ce que veulent dire A84 et R42. Les juges nationaux doivent se tenir à l'A69 et A84 : les revendications définissent la protection, et ces mêmes juges doivent tenir compte de A69 et son protocole qui invitent à quelques nuances, mais dans le cadre de A69 - A84.

    Cette position ou politique unilatérale de l'OEB n'est pas acceptable. Par exemple, il me semble avoir lu quelque part qu'en Suisse la contrefaçon par équivalence se juge en lisant les alternatives mentionnées dans le texte (et dans le texte seulement). Si l'OEB impose de supprimer ces alternatives, le breveté est lésé!

    En conclusion, cette décision a le mérite de ne pas lire à l'envers A84 ou R42 : ce ne sont pas des bases légales pour rejeter une demande dont la description mentionnerait d'autres caractéristiques ou mises en oeuvres non revendiquées.

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  12. Pour les pro forma aficionados, je me demande dans le cas où il y avait un problème d’unité d’une demande avec deux inventions clairement différentes A et B qui a reçu une communication 71(3) avec un jeu de revendications sur l’objet A en quoi il y aurait confusion de laisser l’embodiment de B dans la description? S’il n’y en a pas pourquoi devrions-nous changer la description pour éviter une confusion avec l’objet B?

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  13. Dans ce cas c'est très simple, il suffit de remplacer "l'invention concerne l'objet B" par "la présente description concerne B".
    Il faut juste arrête de prétendre que l'invention porte sur B.
    On n'est pas obligé de supprimer tout ce qui concerne B.
    J'ai fait des quantités d'adaptation de description, je n'ai jamais eu de mal à trouver des manières simples de le réaliser. Il suffit d'être de bonne foi.

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  14. @Anonyme 11:14
    Tout à fait d'accord. L'exigence de support est en particulier un filtre pour vérifier qu'une modification des revendications n'apporte pas de matière nouvelle par rapport à la demande telle que déposée, il est paradoxal, pour ne pas dire contradictoire, d'exiger du déposant des modifications qui modifient la description par rapport au texte du dépôt en invoquant cette même exigence de support.
    En pratique, la pratique consistant à déposer une description modifiée à chaque modification des revendications est loin d'être optimale du point de vue de l'efficacité de la procédure, surtout si on y ajoute les modifications effectuées par la division d'examen avec la notification 71(3).
    Et en tant que tiers, on se trouve contraint de comparer le texte du dépôt et celui du brevet délivré.
    Quant à l'argument de la sécurité juridique liée à l'interprétation des revendications par les tribunaux nationaux, il s'agit d'une question qui n'est pas du ressort de l'OEB. L'OEB n'est compétent pour apprécier la portée des revendications que pour vérifier la conformité à 123(3).

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  15. Anonyme de 13:45 Pourquoi adapter la description, les revendications sont claires. La description n'induit aucune ambiguïté sur l’interprétation des revendications.
    Le fait que les descriptions aient été adaptées dans le passé relativement facilement par les demandeurs ne rend pas cette pratique légitime pour autant. En effet comme dans l’exemple mentionné il est parfois plus simple de modifier légèrement la description pour « rendre clair » pour la division d’examen que l’objet B ne fait pas partie de l’invention telle que revendiquée. Mais dans l’exemple très simple mentionné il n’y pas de possibilité de mal interpréter les revendications car les revendications sont claires en elles-mêmes et sont fondées sur la description.
    Si on revient vers les travaux préparatoires de l’art 84 on trouve qu’au début on pouvait lire
    « The claims shall define the matter for which protection is sought. They shall be clear and concise and be fully supported by the description. »
    Dans une version encore antérieure on pouvait encore lire:
    “The claims shall be clear and concise. They (the claims) shall be fully supported by the description.”
    Les travaux préparatoires indiquent clairement que cet article a un seul objectif particulier la contrefaçon:
    “The sub-Committee decided to provide in paragraph 1 that fee claims must be clear and concise and- that they must be fully supported by the description. This provision seemed so important - particularly from the point of view of infringement actions - that the subcommittee felt inserting this provision in the Convention itself should be considered”.
    On notera que “Fully” a été retiré de la version finale de l’art 84. En effet ce terme a été considéré comme trop restrictif.
    Par conséquent le fait d’avoir dans la description des références a d’autres inventions non revendiquées, ne rend pas automatiquement les revendication non claires. Les revendications doivent être claires en elles-mêmes et c’était l’objectif des travaux préparatoires. Art 84 ne peut être plus clair….

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  16. À l’anonyme du 9 novembre 2022 à 11:14

    Que vous trouviez la position ou politique de l'OEB inacceptable est votre bon droit.

    L’Art 84, ni la R42 ne disent peut être pas que "la description ne doit se rapporter qu'à des éléments revendiqués", mais l’Art 84 requiert que les revendications doivent être supportées par la description.

    Il existe une longue liste de décisions qui ont interprété la CBE dans le sens que toute déclaration dans la description ayant pour objet manifeste de semer des doutes quant à l’étendue de la protection est proscrite. Ce ne sont pas trois décisions qui vont changer quoi que ce soit à ce constat.

    Tant qu’aucune de ces décisions n’est mentionnée dans les Directives, elles seront ignorées par les DE/DO. Que ce soit dans un futur proche ou lointain, je ne vois d’ailleurs pas ces décisions entrer dans les directives.

    Si la description mentionne des alternatives, il devrait être possible de les rassembler dans une revendication chapeau. Si cette possibilité n’existe pas à cause d’un art antérieur pertinent, alors en général ces alternatives manquent d’unité d’invention et toutes les alternatives sauf une doivent faire l’objet de demandes divisionnaires.

    Il existe des cas exceptionnels dans lesquelles les alternatives ne peuvent être groupées sous une revendication chapeau et une série de revendications indépendantes de la même catégorie peut alors être acceptable, cf. R 43(2) et Directives F-IV, 3.2. Mais c’est au déposant de démontrer cette nécessité, cf. T 1388/10.

    Dans tous ces cas de figure il est difficile de voir en quoi le déposant/propriétaire serait lésé. En tout cas il n’est pas nécessaire, sauf exception, voir ci-dessus, de laisser dans la description des alternatives non revendiquées.

    La contrefaçon par équivalence est une décision prise par une juridiction nationale dans toute sa liberté de décision supportée par l’Art 69 et son protocole d’interprétation qui dans son Art 2 mentionne les équivalents sans pour autant les définir.

    T 1989/18 a provoqué une tempête dans un verre d’eau qui a été entretenue par T 1444/20 et un peu par T 2194/19. Il serait temps de se calmer. Avec un peu de bonne volonté de part et d’autre, il n’y a pas de quoi fouetter un chat.

    En tout cas l’OEB et un grand nombre de décisions des CR ne lisent ni l’Art 84 ni la R 42 à l’envers, mais tant que l’Art 84 est ce qu’il est, il faudra bien adapter la description aux revendications.

    Pour conclure, je voudrais attirer votre attention sur le fait que si le demandeur ou le propriétaire se contente de déposer une RA sans description adaptée, et qu'en plus, il ne se présente pas à la PO, la conséquence peut être assez drastique.

    En l'absence d'un ensemble complet de documents, soit
    - la demande est rejetée T 893/01, T 109/02
    - le brevet est révoqué T 725/00, T 986/00, T1024/18.

    Il existe cependant des décisions dans lesquelles la CR a renvoyé à la première instance malgré l'absence du
    - du déposant T 256/10
    - du propriétaire T 484/12

    Si les CR n'avaient pas considéré qu'il fût obligatoire d'adapter la description aux revendications, ces décisions n'auraient jamais été prises.

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  17. Cher Monsieur Hagel,

    Vous ne serez pas surpris que je ne puis souscrire à vos propos. Je l’ai déjà fait dans mon blog.

    En règle générale, l’objet des revendications dépendantes est présenté comme optionnel dans la description. Si eu égard à l’art antérieur le déposant combine la revendication indépendante d’origine avec une revendication dépendante d’origine, la caractéristique qui était optionnelle dans la description ne l’est plus, car elle est maintenant comprise dans la revendication indépendante. Il est donc impératif de modifier la description en conséquence. Où est le problème d’extension d’objet ?

    Il ne s’agit que d’un exemple, mais il en existe bien d’autres. Dès lors que certains modes de réalisation manquent de nouveauté ou d’activité inventive eu égard à l’art antérieur cité, il n’est pas correct de prétendre que ces modes de réalisation représentent toujours encore l’invention.

    Soutenez-vous réellement que dans de tels cas, la description ne doit pas être adaptée?
    J’espère pour vous que non.

    Dans mon blog, je vous ai demandé, ainsi qu’à Max Drei, de présenter des cas dans lesquels l’adaptation de la description aux revendications modifiées a abouti à un rejet de la demande ou à une révocation du brevet, que ce soit à l’OEB ou devant une juridiction nationale. Comme Sœur Anne je n’ai rien vu venir, mais je suis ouvert à votre démonstration.

    Je conviens avec vous que la pratique consistant à déposer une description modifiée à chaque modification des revendications est loin d'être optimale du point de vue de l'efficacité de la procédure. Les DE et les DO sont cependant très pragmatiques en la matière. Je n’ai jamais vu une DE ou une DO requérir une description adaptée tant qu’un accord sur le libellé d’une revendication indépendante. Par contre le fait de ne pas le faire peut aboutir à des conséquences drastiques comme je viens de l’expliquer à l’anonyme de 11 :14.

    Au sujet des modifications apportées par les DE dans la notification selon la R 71(3), je vous ai déjà répondu dans mon blog. Je le répète ici. Le fait que dans les notifications selon la R 71(3), les DE se permettent d'apporter des modifications, parfois nombreuses, est un fait bien connu.

    Selon les Directives et les instructions en vigueur, seules des modifications mineures, par exemple des fautes de frappe, peuvent être apportées aux documents de la demande à ce stade de la procédure.

    Toute modification allant au-delà de ces modifications mineures doit faire l'objet d'un accord avec le demandeur avant l'émission de la notification selon la R 71(3). Cet accord doit être documenté à l'endroit approprié dans ladite notification.

    Les modifications liées à des changements substantiels dans la description, par exemple des suppressions, ou des modifications des revendications, par exemple des combinaisons de revendications, sont le type de modifications qui ne peuvent pas être effectuées par la DE sans l’accord du déposant.

    Je peux comprendre qu'avec la pression de production, qui ne cesse d'augmenter, les DE espèrent que la perspective de la délivrance d’un brevet puisse, dans l’esprit de celles-ci, rendre certaines modifications acceptables pour le déposant. Cette façon de faire n’est pas du tout correcte. Que les déposants ne le tolèrent pas est tout à fait normal. Le risque est en effet élevé d'introduire des problèmes au titre de l'Art 123 (2), sous prétexte de "clarification". Une fois une telle modification acceptée, le déposant/propriétaire ne peut pas se décharger de sa responsabilité sur la DE.

    J#ai peut-être été un peu long, mais l'affaire qui nous concerne le mérite.

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  18. Anonyme de 13:45 Pourquoi adapter la description ? Les revendications sont claires en elles memes. La description n'induit aucune ambiguïté sur l’interprétation des revendications.
    Le fait que les descriptions aient été adaptées dans le passé relativement facilement par les demandeurs ne rend pas cette pratique légitime pour autant. En effet comme dans l’exemple mentionné il est parfois plus simple de modifier légèrement la description pour satisfaire à la demande de la division d’examen que l’objet B ne fait pas partie de l’invention telle que revendiquée. Mais dans l’exemple très simple mentionné il n’y pas de possibilité de mal interpréter les revendications car les revendications sont claires en elles-mêmes et sont fondées sur la description. Pourquoi ne pas enlever la partie introductive/historique de l’objet de l’invention elle n’est pas nécessaire a la compréhension des revendications!  Part on du principe que cette partie n’altère en rien la clarté des revendications ?
    Si on revient vers les travaux préparatoires de l’art 84 on trouve qu’au début on pouvait lire
    « The claims shall define the matter for which protection is sought. They shall be clear and concise and be fully supported by the description. »
    Dans une version encore antérieure on pouvait encore lire:
    “The claims shall be clear and concise. They (the claims) shall be fully supported by the description.”
    Les travaux préparatoires indiquent clairement que cet article a un seul objectif particulier la contrefaçon:
    “The sub-Committee decided to provide in paragraph 1 that fee claims must be clear and concise and- that they must be fully supported by the description. This provision seemed so important - particularly from the point of view of infringement actions - that the subcommittee felt inserting this provision in the Convention itself should be considered”.
    On notera que “Fully” a été retiré de la version finale de l’art 84. En effet ce terme a été considéré comme trop restrictif.
    Par conséquent le fait d’avoir dans la description des références a d’autres inventions non revendiquées, ne rend pas automatiquement les revendications non claires. Les revendications doivent être claires en elles-mêmes et c’était l’objectif des travaux préparatoires. Art 84 ne peut être plus clair ! : ….
    A DXThomas rendre une pratique légitime et légale juste parce qu’on la pratique depuis des décennies ne peut exister en droit sauf si le droit change. Même une référence à des précédents ne rend pas la chose plus juste nous ne sommes en pas dans un système anglo saxon de common law. Une ou plusieurs mauvaises interprétations d’une chambre ne rendent pas la pratique légale pour autant.
    Admettons la thèse que vous avez avance est juste qu’il n’y a jamais eu de conséquence sur ces adaptations non justifier, encore une fois ça ne rend pas la chose juste juste pour autant.
    Comme dit précédemment rares ont été les cas où il y a eu contentieux sur ces adaptions vu le nombre de demandes délivrées. Une fois dis ça il faut reconnaitre que par le passé la division d’examen n’était pas forcement très regardante et ou le demandeur n’avait nullement intérêt de passer du temps à faire valoir que la demande de DE n’était pas en accord avec l’EPC. Récemment la DE pousse plus loin cette pratique d’auto correction.
    Pour moi il n’y pas de tempête, mais si l’OEB veut corriger cette pratique inadéquate, l’OEB peut le faire, plusieurs Chambres de recours sont prêtes à l’aider.

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  19. À l’anonyme du 10 novembre 2022 à 15:00

    Je n’ai jamais été, ni de près, ni de loin, d’avis qu’une pratique devenait légitime et légale juste parce qu’on la pratique depuis des décennies ne peut exister en droit sauf si le droit change. Je n’ai pas besoin de vous pour me dire que nous ne sommes pas à l’OEB dans un système de common law.

    Au surplus, votre réponse me fait sourire, car les mandataires britanniques veulent exactement que les décisions T 19898/18 et T 1444/20 soient immédiatement acceptable car la pratique de l’OEB n’est pas légitime et légale car elle n’est en rien justifiée par la jurisprudence. Ils souhaitent en fait l’application du système de common law dans ce cas précis.

    Le corps de jurisprudence en la matière est très clair et se fonde sur l’Art 84, dernière partie, qui précise que « les revendications doivent se fonder sur la description ». Que vous considérez que cette interprétation est erronée est votre bon droit, mais vous n’avez en rien montré que celle-ci fût erronée. Ce n’est que le fait qu’il existe des décisions qui affirment de façon péremptoire, pour ne pas dire apodictique, qui vous permet de le dire. Trois décisions pèsent peu eu égard à la masse des autres.

    Je maintiens que la description ne peut pas contenir des éléments qui mettent en doute l’étendue de la protection définie par les revendications. Ceci n’empêche en rien une juridiction nationale de définir sa propre théorie des équivalents.

    Cependant, au moment de la délivrance ou du maintien sous forme modifiée, toute déviation entre ce que les revendications couvrent, qui doivent être claires par elles-mêmes sans recours à la description, et la description doit être supprimée. Ce n’est qu’à cette condition que les revendications sont supportées par la description. Que l’adverbe « entièrement » = fully, ne change rien à cette obligation.

    À titre d’exemple je me réfère à T 2290/18 publiée ce jour:

    2.2-In view of the now much narrower subject-matter in claim 1 relative to that granted, the Board exercised its discretion to remit the case to the opposition division to adapt the description to the amended claims with requisite care.

    Cette décision est-elle erronée? Je ne le pense pas.


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