Par communiqué de presse, l'OEB annonce que la Grande Chambre a décidé dans l'avis G3/19 que les plantes et les animaux obtenus exclusivement au moyen de procédés essentiellement biologiques ne pouvaient être protégés par brevet.
L'avis renverse donc les décisions G2/12 et G2/13 (Brocoli 2 et Tomates 2), qui avaient jugé que l'exclusion des procédés essentiellement biologiques de l'article 53 b) CBE ne s'étendait pas aux produits obtenus par ces procédés.
Sur cette question très politique, la règle 28(2) CBE avait été modifiée suite à ces décisions afin d'interdire la protection par brevet de ce type d'inventions, mais dans l'affaire T1063/18, la Chambre 3.3.04 avait jugé que cette nouvelle règle 28(2) CBE était incompatible avec l'article 53b) CBE tel qu'interprété par la Grande Chambre dans les décisions précitées.
Le Président de l'OEB a alors reposé la question à la Grande Chambre.
Le Communiqué de presse dresse le résumé qui suit.
Une interprétation particulière de la loi n'est jamais gravée dans le marbre car le sens d'une disposition peut évoluer avec le temps.
Les conclusions et les motifs de la décision G2/12 étaient corrects, mais les circonstances de l'adoption de la règle 28(2) CBE ainsi que les développements législatifs des Etats contractants montrent que la nouvelle règle 28(2) CBE permet et même appelle une interprétation dynamique de l'article 53 b) CBE.
En adoptant cette interprétation dynamique, la Grande Chambre abandonne son ancienne interprétation.
La nouvelle interprétation n'est toutefois pas rétroactive. Elle ne s'applique pas aux brevets délivrés avant le 1er juillet 2017 (entrée en vigueur de la règle 28(2) CBE) ou aux demandes pendantes déposées (ou revendiquant une priorité) avant cette date.
La réponse aux questions posées (et fortement remaniées) est donc la suivante:
En prenant en compte les développements intervenus depuis les décisions G2/13 et G2/13, l'exclusion de la protection par brevet des procédés essentiellement biologiques d'obtention de plantes ou d'animaux de l'article 53 b) CBE a un effet négatif sur l'admissibilité de revendications de produit et de produit-par-procédé portant sur des plantes, du matériel végétal ou des animaux, si le produit revendiqué est obtenu exclusivement au moyen de procédé essentiellement biologiques ou si les caractéristiques de procédé revendiquées définissent un procédé essentiellement biologique. Cet effet négatif ne s'applique par aux brevets délivrés avant le 1er juillet 2017 et aux demandes européenne encore en instance et déposées avant cette date.
Sur la question de la recevabilité de la saisine, la Grande Chambre voit une divergence entre la décision T1063/18 et des décisions (par exemple T272/95) qui ont jugé qu'une disposition du règlement d'exécution pouvait avoir un impact sur l'interprétation d'une disposition de la CBE, quelle que soit l'interprétation particulière donnée dans une décision antérieure d'une Chambre de recours. Il existe donc une divergence sur l'impact d'une modification du règlement d'exécution sur l'interprétation d'un article de la CBE.
Avis G3/19
C'est très pratique, pour éviter de dire qu'on s'est trompé la première fois il suffit de dire que c'est l'interprétation qui est dynamique !
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RépondreSupprimertrompés? pourquoi se seraient-ils trompés? à l'époque de G2/12 il n'y avait pas cette règle 28. Et ce n'est pas la première fois que la grande chambre change d'avis. C'est heureux, d'ailleurs, que la jurisprudence puisse changer.
Vu l'unanimité des états contractants sur le sujet, cela aurait été un peu stupide de la part de la grande chambre de faire de la résistance.
Il n'y a qu'une seule fois que la GCR a révisé sa jurisprudence.
RépondreSupprimerDans une première décision G 1/84 le breveté avait le droit de s'opposer à son propre brevet.
La décision G 9/93 a renversé G 1/84.
La GCR a toujours accepté de changer sa jurisprudence. D'après l'article 112(3) CBE, sa décision lie la Chambre qui lui a posé la question, et seulement pour l'appel en question. L'article 21 des RPCR impose aux Chambres qui souhaitent s'en écarter de renvoyer la question à la GCR.
RépondreSupprimerDans G2/07, la GCR a notamment écrit: There can be no "legitimate expectation" that an interpretation of a substantive provision governing patentability given in a decision of the boards of appeal will not be overruled in the future by the Enlarged Board, since recognising such an expectation as legitimate would undermine the function of the Enlarged Board of Appeal.
Au risque de contredire Robin, la décision G2/08 avait déjà décidé que les revendications de type suisse, admises par G1/83, ne seraient plus autorisées, également à partir d'une certaine date.
Bien sûr que la GCR peut changer d'opinion, et comme certains l'ont noté, elle l'a déjà fait. Toutefois, voyez-vous bien sur quelle base elle le fait cette fois-ci ? elle change d'opinion sur la base d'une décision du CA de mettre en place une nouvelle règle et du contexte politique. Cela me semble être une raison que la profession ne devrait pas accepter si facilement. Cela revient en effet à donner tout pouvoir au CA de modifier l'interprétation d'articles sans en passer par les processus démocratiques fixés par la Convention, à savoir une conférence diplomatique ou un vote unanime.
RépondreSupprimerIl est possible que peu de lecteurs se sentent concernés par cette opinion du fait qu'elle semble d'apparence limitée à une catégorie d'inventions particulières. Ma lecture de cette opinion me conduit toutefois à penser que ses conséquences vont bien au-delà de ce domaine technique et que chacun devrait se sentir concerné par l'approche prise dans cette opinion.
Moi, éminent spécialiste de la question, je peux vous dire que ce sera la dernière fois que la GCR changera sa jurisprudence.
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