Pages

lundi 17 octobre 2022

G2/21 : avis provisoire de la Grande Chambre

Dans la saisine G2/21, la Grande Chambre est saisie de questions portant sur la prise en compte de preuves (par exemple des données expérimentales) publiées après la date de dépôt (preuves post-publiées) et qui ont été soumises pour prouver l'existence d'un effet technique. Les questions posées sont rappelées à la fin du billet.

La procédure orale doit se tenir le 24 novembre et la Grande Chambre vient d'envoyer une notification selon les articles 13 et 14(2) du RPGCR afin de souligner les points qui lui semblent importants.

Sur la première question posée, la Grande Chambre considère pour le moment que le principe de libre appréciation de la preuve ne semble pas en soi permettre d'ignorer des preuves dans la mesure où ces preuves sont soumises pour répondre à une contestation et sont décisives pour la décision finale. Ignorer par principe ces preuves serait contraire aux articles 113(1) et 117(1) CBE.

La Grande Chambre rappelle qu'au vu de la jurisprudence de l'OEB et des Etats contractants, ce qui importe est de savoir quel enseignement technique la personne du métier, munie de ses connaissances générales, comprendrait, à la date de dépôt, à la lecture de la demande telle que déposée. L'effet technique invoqué, même à un stade ultérieur, doit être englobé par cet enseignement et concrétiser la même invention.

Pour la Grande Chambre, la question est donc de savoir si, compte tenu de cet enseignement technique de la demande et des connaissances générales, la personne du métier aurait des raisons sérieuses ("significant reason") de douter de l'effet technique allégué et invoqué. En l'absence de tels doutes, l'organe décisionnaire devrait pouvoir se baser sur des preuves post-publiées afin de décider si elle est convaincue ou non de la présence de cet effet technique. En revanche, si la personne du métier a des doutes sérieux ("significant"), la possibilité d'utiliser ces preuves avec succès paraît discutable.

Une personne du métier qui doute


Questions posées:

1. Faut-il admettre une exception au principe de la libre appréciation des preuves (voir par exemple G 3/97, motifs 5, et G 1/12, motifs 31) en ce sens que les preuves post-publiées doivent être ignorées au motif que la preuve de l'effet repose exclusivement sur les preuves post-publiées ?

2. Si la réponse est oui (les preuves post-publiées doivent être ignorées si la preuve de l'effet repose exclusivement sur ces preuves), les preuves post-publiées peuvent-elles être prises en considération si, sur la base des informations contenues dans la demande de brevet en cause ou des connaissances générales, l'homme du métier à la date de dépôt de la demande de brevet en cause aurait considéré l'effet comme plausible (plausibilité ab initio) ?

3. Si la réponse à la première question est oui (la preuve post-publiée doit être ignorée si la preuve de l'effet repose exclusivement sur cette preuve), la preuve post-publiée peut-elle être prise en considération si, sur la base des informations contenues dans la demande de brevet en question ou des connaissances générales, l'homme du métier à la date de dépôt de la demande de brevet en question n'aurait vu aucune raison de considérer l'effet comme non plausible (invraisemblance ab initio) ?






5 commentaires:

  1. Le doute important, je suppose que c'est un doute au delà de tout doute raisonnable?

    RépondreSupprimer

  2. Je ne sais pas si "important" est la bonne traduction.
    Le terme d'origine est "significant", j'aurais aussi pu traduire par "significatif" ou encore "notable".

    RépondreSupprimer
  3. La pharma peut dormir tranquille :-)

    RépondreSupprimer

  4. J'ai remplacé "important" par "sérieux", qui me paraît une meilleure traduction

    RépondreSupprimer
  5. hum... ça semble annoncer une porte ouverte aux brevets spéculatifs...

    Si je protège une composition nouvelle et pas encore testée et que j'indique dans le texte que l'effet technique est XX, puis YY et encore ZZ et préférentiellement XY, et en particulier YZ, eh bien on pourra fournir des preuves et essais 8 ans plus tard en oppo sur YZ en disant "bien sûr qu'il n'y a aucun doute, on l'a écrit dès le dépôt!"

    Le talent du rédacteur va pouvoir compenser l'absence de tests réels. Et on complètera ensuite si l'Examinateur, l'opposant ou la chambre de recours pose des questions sur l'activité inventive.

    Vous l'aurez compris, je ne suis pas super confiant quant au fait de "déposer d'abord, étoffer ensuite".

    Pour être exhaustif, petite pensée à la pratique imposée de modifier la description : 5 ans après le dépôt, je sais maintenant que c'est l'effet YZ qui m'intéresse et qui marche : j'efface toutes les références aux autres effets : le doute n'est pus permis. Merci l'OEB!

    RépondreSupprimer

Merci de contribuer au débat de manière constructive, sans attaques personnelles.
Les trolls ne sont pas acceptés, sauf s'ils sont drôles.