Dans cette décision, la Chambre rappelle que si une décision ne doit pas nécessairement traiter en détail tous les arguments des parties, elle doit au moins aborder les points décisifs en débat. Elle doit traiter les faits, preuves et arguments pertinents et contenir la chaîne logique qui conduit à la décision finale. Les parties ne doivent pas avoir à spéculer sur les motifs de la décision et doivent être en mesure de vérifier si leur droit d'être entendu a été respecté.
Dans le cas d'espèce, la décision de la division d'opposition indique à plusieurs reprises que la division d'opposition partage l'avis de la Titulaire, mais sans aborder réellement l'argumentation de l'Opposante. A titre d'exemple, s'agissant de la nouveauté de la revendication 35, la décision n'explique pas comment la division d'opposition est parvenue à la conclusion que les caractéristiques 35e), f), g) et j) n'étaient pas divulguées par E1. Il n'est pas clair si la division a pleinement partagé le point de vue de la Titulaire ou si elle a été guidée par d'autres considérations, et pour quelles raisons elle n'a pas partagé le point de vue contraire de l'Opposante.
La Chambre relève un autre vice de procédure: bien que la langue de procédure soit l'allemand, la décision contient de nombreuses citations du mémoire d'opposition, en anglais.
Pour la Chambre, les procédures devant l'OEB sont soumises à un principe d'unité de la langue de procédure: seule la langue de la procédure doit donc être utilisée dans la décision. Seule une décision dans une seule langue de procédure répond en outre aux exigences de la règle 111(2) CBE concernant la motivation des décisions.
Pour aboutir à cette conclusion, la Chambre étudie en détail la pratique des Etats contractants, citant plus de 50 articles de lois et décisions de jurisprudence.
L'article 6(1) CEDH, quant au droit à un procès équitable, sert de ligne directrice générale pour l'organisation des procédures. Ce principe inclut l'exigence selon laquelle la décision doit être rédigée de manière à pouvoir être comprise par une partie qui parle la langue de la procédure.
Les Etats contractants prévoient en général une langue de procédure, qui doit être utilisée pour la rédaction des décisions. Dans la jurisprudence de la CJUE et de la CEDH, toute citation dans la langue originale est traduite dans la langue de la procédure. Il en est de même pour plusieurs Etats contractants.
Dans les procédures devant l'OEB, où les parties peuvent utiliser une autre langue que la langue de procédure, il peut être utile ou nécessaire dans certains cas de reproduire certains actes de procédure dans la langue d'origine à fins d'interprétation, ou encore certains documents, certaines décisions, voire les travaux préparatoires. Mais une simple recopie d'arguments, sans raisons procédurales et sans traduction ou explication dans la langue de procédure, n'est pas admissible.
L'exigence que la décision soit rédigée dans une seule langue de procédure vise à permettre qu'elle soit présentée de manière cohérente, avec une homogénéité linguistique et "d'un seul tenant", sans exiger de connaissances ou d'efforts linguistiques particuliers de la part des lectrices et des lecteurs, y compris des membres intéressés du public, dans des procédures qui, comme en l'espèce, sont ouvertes au public.
En outre, seule une décision rendue dans un langue de procédure uniforme peut satisfaire à l'exigence de transparence de la prise de décision, qui est également un élément central d'une procédure équitable et de l'État de droit. Même si les parties intéressées maîtrisent souvent plus d'une langue officielle de l'OEB, la compréhension sans restriction des décisions doit également être assurée pour ceux qui n'ont pas cette connaissance linguistique.
Dans des procédures telles que les procédures d'opposition et de recours sur opposition en vertu de la CBE, où les actes de procédure sont possibles en plusieurs langues, l'exigence d'uniformité de la langue (de procédure) dans la décision s'applique d'autant plus. A cette fin, l'organe de décision peut non seulement s'appuyer sur ses propres compétences linguistiques requises par la CBE, mais aussi faire appel aux services linguistiques et de traduction de l'OEB afin de garantir globalement que tous les motifs de la décision puissent être correctement compris par les parties.
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