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lundi 27 juillet 2015

R9/14 : devoir de neutralité


En première instance l'opposition avait été rejetée. La Chambre de recours avait convoqué les parties à une procédure orale sans émettre d'opinion par écrit et la procédure orale s'était déroulée en l'absence de l'Opposante. La Chambre avait démarré la procédure orale en demandant simplement à la Titulaire de présenter ses arguments en matière d'activité inventive.
En l'absence à la fois d'arguments présentés oralement par l'Opposante et d'indications de la Chambre, la Titulaire a présenté les faits et arguments qui lui paraissaient pertinents.
La Chambre a ensuite révoqué le brevet.

Pour la Requérante, la Chambre aurait dû indiquer plus clairement les aspects sur lesquels elle aurait dû se focaliser.
La Grande Chambre rappelle que l'activité inventive est examinée à l'aide de l'approche problème-solution, normalement connue du mandataire de la Titulaire, si bien qu'elle n'avait pas besoin d'indications particulières, ce qui d'ailleurs n'aurait pas été approprié compte tenu du devoir de neutralité de la Chambre.

Comme rappelé dans un grand nombre de décisions R, le droit des parties d'être entendu ne signifie pas que les Chambres doivent leur donner tous les motifs possibles pour la décision. Une Chambre n'est pas obligée lors d'une procédure orale de discuter en détail tout ce qui peut influer sur sa décision; il suffit que leur pertinence devienne claire durant la procédure.
Le droit d'être entendu du Requérant n'aurait été violé que si la Chambre n'avait pas donné suffisamment l'opportunité de discuter au moins les aspects pertinents pour la décision. Il revient à chaque partie de décider ce qui est pertinent, sur la base de sa connaissance du dossier et de l'expertise professionnelle que l'on peut attendre d'elle. Chaque partie doit jouer un rôle actif et, de sa propre initiative, présenter les arguments en sa faveur (R2/08). Le mandataire doit présenter son cas pour le mieux, sans support de la Chambre, laquelle doit rester impartiale (R11/08, R18/09, R21/09). Un mandataire agréé ne peut compter sur la Chambre pour l'avertir, le guider ou l'aider (R4/09, R17/09). Les Chambres doivent s'abstenir de tout commentaire ou conseil pouvant être utile à une partie, surtout lorsque l'autre partie est absente.

La Chambre avait demandé lors de la procédure orale si des essais comparatifs figuraient au dossier afin de prouver l'effet allégué. La Titulaire s'était montrée surprise par l'importance prise par cette absence d'essais dans la décision. La Grande Chambre rappelle que la soumission d'essais comparatifs fait partie de l'approche problème-solution lorsqu'il s'agit d'établir le problème technique objectif. Il ne pouvait donc n'y avoir ni surprise ni violation du droit d'être entendu.

Décision R9/14

3 commentaires:

  1. Pas d'opinion préliminaire, il faut alors deviner les points pertinents?
    L'autre partie n'est pas présente, alors la chambre peut encore moins donner son avis ou indiquer les points pertinents?

    C'est très pratique pour préparer!!!

    En général on est au bout de 10 ans de procédures, le titulaire doit apprécier d'avoir persévéré pour finir avec une procédure orale au cour de laquelle on ne sait pas si on a abordé les vrais points à discuter.

    Tout ça au nom de la neutralité? C'est un peu fort, et ça donne l'impression que la chambre est dans sa tour d'ivoire et détient le pouvoir sans avoir à se justifier devant ce misérable breveté....

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  2. A anonyme: votre critique s'applique plutôt à la décision de la chambre de recours. Le fait de ne pas émettre d'opinoion préliminaire est à mon avis un peu surprenant, mais cela ne viole pas la CBE, et en particulier le droit d'être entendu.

    Les conditions justifiant une révision de la décision par la GCR ne sont donc pas justifiées.

    J'en retiens qu'en procédure contradictoire, un adversaire absent ne compense pas un mauvais dossier et que silence ne vaut pas acception des arguments de la partie présente.

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  3. Cette décision vient confirmer que les chambres de recours peuvent très bien décider de révoquer un brevet de leur propre initiative.

    A mon avis, dans cette affaire, la CR n'a pas du tout respecté le principe de neutralité. De toute façon, ce principe ne signifie rien, car, quelles que soient les circonstances, la CR est obligée de trancher soit en faveur du breveté, soit en faveur de l'opposant. Elle n'est donc jamais neutre.

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