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lundi 13 avril 2015

Proposition de réforme des Chambres de recours


J'ai récemment été interpellé par des lecteurs qui regrettaient que je n'évoque pas les projets visant à réformer l'organisation et le fonctionnement des Chambres de recours. Plusieurs éléments m'ont ensuite été communiqués.

Le blog IPKat a publié en mars une proposition de réforme CA/16/15 (assortie d'annexes) émanant de la Présidence de l'OEB, à la demande du CA, suite à l'affaire R19/12.
[MAJ 14/04/2015 : lien vers le document CA/16/15 en français]

L'objectif est d'accroître l'autonomie des Chambres de recours ainsi que leur efficacité. Sur ce dernier point, la proposition fait état d'une durée moyenne des recours de 34,3 mois, en augmentation de 8,2% par rapport à 2013.
Le Président de l'OEB déléguerait ses pouvoirs managériaux (et notamment son pouvoir de proposition pour les nominations et reconductions de membres) à un Président des Chambres de recours (PBoA), qui ne ferait pas partie du management de l'OEB et rapporterait à un Comité des Chambres de recours (BoAC).

Le BoAC, composé de 7 membres nommés par le Conseil d'Administration de l'OEB (CA) - 3 membres du CA et 4 membres extérieurs choisis parmi des juges ou présidents de tribunaux- rapporterait au CA et aurait pour responsabilités de contrôler l'indépendance, d'améliorer l'efficacité des Chambres, et de proposer les critères de sélection des membres des Chambres.

Le PBoA serait également chargé de contrôler la performance des membres des Chambres, qui serait prise en compte pour leur avancement et leur reconduction. Des règles sur les conflits d'intérêt seraient adoptées, interdisant notamment l'exercice de certaines professions, comme celle de mandataire agréé, pour les anciens membres des Chambres.

Enfin, les Chambres seraient séparées physiquement du reste de l'OEB. Deux options sont envisagées : le bâtiment actuel de l'OEB à Berlin ou un autre bâtiment à Munich.

Ce projet ne nécessiterait pas de modifications de la CBE et pourrait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2016.

L'Association des membres de Chambres de recours (AMBA) a publié sur son site un communiqué, dans lequel elle pointe divers problèmes.
Problème d'indépendance tout d'abord : le BoAC ne serait qu'un organe du CA, et la multiplicité de ses fonctions donne lieu à des réserves quant à leur compatibilité avec le principe d'auto-gouvernance, pré-requis pour l'indépendance.
Le fait de mélanger les questions d'indépendance et d'efficacité pose également problème, en particulier l'idée de conditionner les reconductions de membres à des critères de qualité et d'efficacité, alors que l'inamovibilité des juges est normalement la clef de voûte de l'indépendance judiciaire. La reconduction devrait être la norme, sauf cas exceptionnels sanctionnés par des procédures disciplinaires.
Le fait qu'un ancien membre ne puisse plus exercer d'activité professionnelle serait clairement un frein au recrutement.
L'AMBA pointe également du doigt les problèmes actuels quant au planning de reconduction des membres, qui touchent plus de 10% des postes, et qui ont et auront un effet négatif sur  la durée des procédures de recours.

Le Présidium comme l'AMBA regrettent de ne pas avoir été consultés.

Le CA a récemment exprimé son soutien au projet proposé. Les premières mesures concrètes pourraient être décidées lors de la prochaine réunion du CA en juin.




9 commentaires:

  1. Vu sous cet angle, je comprends mieux la réaction de certains au poisson du 1er avril...

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  2. Merci Laurent,
    Cela semble assez grave

    Il me semble effectivement inconcevable de s'attaquer au principe d’inamovibilité des juges.

    Sur la forme, j'avais trouvé votre poisson d'avril plutôt drôle. J'ai été choqué aussi par certains commentaires qui semblent oublier d'abord de dire MERCI pour tout ce qu'ils reçu en lisant ce blog.
    On aurait pu vous suggérer l'article ci-dessus en étant un peu moins agressif.
    Mais merci de l'avoir écrit!



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  3. Bonjour

    En ce qui concerne le principe d'"inamovibilité des juges", je souhaite soulever la question suivante : est-ce que ce principe n'aurait pas des déclinaisons un peu voire très différentes dans les différents pays, à commencer par DE, UK, et FR.

    En France, les juges ne restent pas très longtemps au même poste, à ma connaissance, en tout cas par rapport à ce que j'ai cru comprendre du système britannique. J'ignore ce qu'il en est en Allemagne, mais je soupçonne qu'il y ait des postes de plus longue durée qu'en France.

    Est-ce que les membres des CR de l'OEB n'auraient pas des postes beaucoup plus sécurisés, ou du moins de plus longue durée, que beaucoup de magistrats français ? Je dis cela en ayant en tête que le directeur actuel de l'OEB est d'origine française.

    Je ne suis pas en mesure, du fait de ma faible connaissance de ces questions, d'en tirer de conclusion. Et attention, il ne s'agit pas de dire du mal de qui qu ce soit... je suis personnellement un grand supporter du travail de l'OEB, et ne manque pas de dire du bien de l'office à mes clients pour les encourager à déposer.

    mandataire agréé Paris

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  4. Anonyme de 13:22
    Il me semble que le principe de base est que l'on ne peut révoquer un juge. C'est une norme juridique inscrite dans la plupart des constitutions démocratiques.
    La poursuite d'une carrière nécessite en France d'accepter de changer de poste, mais on ne peut forcer une mutation pour un juge du siège http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/justice/personnel-judiciaire/magistrats/existe-t-il-plusieurs-categories-magistrats.html
    Dans le cas de réforme envisagée, les membres des chambres de recours pourraient être non reconduits( pour mauvaises performances si j'ai bien compris) et en plus par un organisme dont l'indépendance serait contestable.
    Une non reconduction est simplement une possibilité de révocation à date fixe.
    Par ailleurs si on leur interdit de poursuivre après une activité de mandataire dans le privé, on comprend le risque de révocation pour supposée mauvaise performance ne serait pas à prendre à la légère...et avant peut-être le souci de prendre le temps de bien traiter les dossiers.
    NB le directeur de l'OEB, ancien directeur de l'INPI, n'est pas un magistrat.

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  5. Pour l'inamovibilité, cf http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/justice/personnel-judiciaire/magistrats/existe-t-il-plusieurs-categories-magistrats.html
    De façon générale c'est une norme juridique inscrite au niveau de la constitution dans la plupart des pays démocratiques.
    Dans le cas des chambres de recours, la non reconduction est simplement une possibilité de révocation à date fixe et ce pour des critères de performances évalués par un organisme externe aux chambres.
    C'est très inquiétant. La réputation et la qualité des jugements des chambres de recours reposent sur cette indépendance.

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  6. Bonjour

    Merci pour cette réponse intéressante.

    Je continue à commenter sans vraiment avoir étudié le dossier à fond - mais en même temps c'est un peu inévitable.

    1/ Je suis un peu surpris de cette interdiction de devenir mandataire auprès de l'OEB. Quel serait le problème ?

    2/ Par contre, après non reconduction, l'ex membre des CR pourrait retourner travailler en première instance, non ? C'est pas absolument insupportable comme suite de carrière, non ... ? Cela étant, je suppose qu'il y a des arguments contre, mais je ne les ai pas encore lu sur la toile. N'hésitez pas à les expliciter si vous les connaissez.

    mandataire paris

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  7. Point1) c'est supposé empêcher que le membre de la CR ne sera pas tenté d'être biaisé envers son futur employeur. Pas très crédible: Normalement le membre de la CR devrait de toute façon se récuser s'il juge une affaire qui concernerait son futur employeur, d'autant que ce ne sera impossible à cacher

    Point 2) c'est vrai, mais c'est un moyen de pression quand même et donc -à mon avis- peu compatible avec l'indépendance de la CR.

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  8. La gestion de carrière dans un univers un peu restreint comme les CR de l'OEB est forcément problématique.

    Il y a un certain danger, au bout de quelques décennies (c'est à dire maintenant, puisque le système date de 1979) de se retrouver avec une certaine endogamie. Excusez moi si j'ai loupé un élément qui fait que ce terme, désagréable, ne serait pas justifié.

    Je pense qu'il est vertueux de ne pas donner un blanc seing aux membres des CR nouvellement nommés, qui seraient ainsi nommés à vie.

    J'aurais bien vu des postes "tenures" au bout d'une période donnée, par exemple 10 ans. Par contre, avant 10 ans, les membres auraient beaucoup de comptes à rendre et pourraient être remerciés s'ils ne conviennent pas.

    D'autre solutions vertueuses sont sans doute envisageables, mais organiser un système de postes à vie en petit comité me paraît carrément dangereux.

    Au vu de ce que je lis sur IPKat en particulier, il y a beaucoup de souffrance à l'OEB en ce moment. C'est sans doute à la fois un peu vrai, et aussi un peu monté en épingle. Mais relativisons : il y a beaucoup de souffrance partout en ce moment. Serrons les dents, et travaillons tous à passer ce cap en trouvant les meilleures solutions.

    BB est sans doute un champion de la langue de bois, mais je doute qu'il ait pour ambition de violer les droits de l'homme comme cela est écrit partout.

    mandataire paris

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