Sponsors













Abonnez-vous

Abonnez-vous par courriel

Par RSS    Par Twitter
         

Ma liste de blogs

Nombre total de pages vues

mercredi 5 octobre 2011

La nouvelle loi américaine sur les brevets : de nouvelles possibilités d’agir après la délivrance du brevet (2/3)


par Philippe Signore et Scott McKeown, du cabinet Oblon, Spivak, McClelland, Maier & Neustadt, L.L.P

3.    Révision après délivrance (Post Grant Review)

La loi AIA a introduit une nouvelle procédure, qui ressemble à certains égards à la procédure d’opposition pratiquée devant l’OEB. Un tiers peut requérir une Post Grant Review d’un brevet délivré, dans le délai de 9 mois à compter de la date de délivrance du brevet (et avant un éventuel jugement déclaratoire d’invalidité déposé par le requérant). Les brevets soumis à cette procédure doivent avoir une date effective de dépôt (première date de priorité) non antérieure au 16 mars 2013, de sorte que cette procédure se mettra progressivement en place.

Contrairement à la procédure d’opposition européenne, la partie qui est réellement  intéressée dans cette Post Grant Review doit être identifiée. La requête peut s’appuyer sur tout motif d’invalidité (sauf l’absence de description du meilleur mode de réalisation - best mode). En d’autres termes, le tiers peut contester la nouveauté, la non-évidence, la suffisance de description de l’invention ainsi que l’appartenance à une catégorie d’inventions brevetables. La nouveauté et la non-évidence peuvent être contestées sur la base de brevets ou de publications, mais aussi sur la base de preuves d’usage public, de mise en vente ou de toute autre forme de description publique. Cependant, les requêtes ne sont pas automatiquement accordées. Pour qu’elles le soient Il faut que la requête établisse qu’il est plus probable qu’improbable qu’au moins une des revendications n’est pas brevetable, ou qu’une question de droit nouvelle ou non résolue importante pour d’autres brevets ou demandes de brevets, est soulevée. 

La procédure se déroulera devant trois juges administratifs de brevets, appartenant au Patent Trial and Appeals Board (PTAB), qui remplace le Board of Patent Appeals and Interferences (BPAI). Ces juges ne sont pas des examinateurs de brevets (bien qu’ils aient pu l’être dans le passé). Ils ne traitent que de procédures après délivrance et d’appels. Ce sont des juges expérimentés en matière de brevets. Le Patent Trial and Appeals Board pourra autoriser des Discovery limitées, des arrangements entre les parties, accorder des audiences, prendre des décisions de protection (protective orders) et envisager tout autre moyen habituel en matière de litige. La procédure Post Grant Review se déroulera comme un litige devant un tribunal, avec le dépôt de conclusions (motions) et elle se terminera par une audience à l’issue de laquelle les juges rendront leur décision. Une seule occasion sera offerte pour amender les revendications. La durée d’une procédure Post Grant Review doit être comprise entre 12 et 18 mois à compter de l’accord de la requête. Les deux parties peuvent interjeter appel de la décision finale auprès de la CAFC.

Un point important de cette nouvelle procédure de Post Grant Review tient à l’empêchement qu’elle peut entraîner. Cet empêchement concerne tout motif ayant été soulevé ou qui aurait pu raisonnablement être soulevé pendant la procédure. Cette règle est semblable à celle qu’on trouve dans la procédure de réexamen inter partes (cf. § 2), avec une différence importante : puisque les motifs avancés pour requérir une Post Grant Review sont tous les motifs d’invalidation, la partie accusée de contrefaçon se voit empêchée, dans un litige ultérieur, de soulever tout moyen de défense qui serait fondé sur l’invalidité du brevet. Ainsi, un tiers joue gros en s’engageant dans une telle procédure.

La principale conséquence de cet effet d’empêchement est que le requérant devra effectuer préalablement au dépôt de sa requête en Post Grant Review une analyse approfondie de tous les moyens de défense envisagés et raisonnables.

4.    Révision inter partes (nouvelle procédure)

A compter du 16 septembre 2012, les révisions inter partes remplaceront les réexamens inter partes. Cette nouvelle procédure entrera en application progressivement de manière à ne pas surcharger l’USPTO. A cette fin, il est prévu de limiter le nombre de procédures par an jusqu’en 2016. Cette procédure, qui se déroulera devant le Patent Trial and Appeals Board s’appliquera à tout brevet délivré, quelle que soit sa date de délivrance. Cette procédure de révision inter partes partage certaines dispositions avec la Post Grant Review, avec toutefois deux différences importantes :

a)    Primo, une révision inter partes ne peut être requise qu’après les 9 mois qui suivent la date de délivrance du brevet, ceci pour éviter le recours simultané à une Post Grant Review. La requête doit aussi être déposée dans l’année qui suit la notification de plainte pour contrefaçon, ou avant que la partie tierce ne  s’engage dans une action en jugement déclaratoire d’invalidité. Cette disposition est destinée à éviter une perte de temps pour l’USPTO à propos d’un brevet qui se trouverait  engagé par la suite dans une procédure de litige. 

b)    Secundo, cette nouvelle procédure ne peut être fondée que sur des brevets et des publications imprimées. Cette règle limite les possibilités mais, en même temps, limite les effets d’empêchement. Autrement dit, alors que la partie accusée de contrefaçon, qui a préalablement requis une révision inter partes, ne pourra plus soulever, pendant le litige, un moyen de défense qui serait fondé sur des brevets ou sur des publications imprimées, elle pourra encore contester la nouveauté et la non-évidence de l’invention sur la base d’un usage public, ou d’une vente, ou  d’une description insuffisante ou sur la non appartenance de l’invention à une catégorie d’inventions brevetables.

5.    Examen supplémentaire (nouvelle procédure)

La loi AIA prévoit cette nouvelle procédure offerte aux titulaires de brevets pour leur permettre de remédier à une conduite inéquitable à l’égard de l’USPTO, afin d’éviter le défaut d’opposabilité du brevet. Cette procédure permet de considérer, reconsidérer ou corriger une information relative au brevet. L’examen supplémentaire est ordonné si l’on trouve qu’il existe une question de brevetabilité nouvelle et substantielle. On notera que le but visant à corriger une conduite inéquitable peut être obtenu même si l’USPTO ne trouve pas de question nouvelle et substantielle. L’art antérieur pris en compte dans cette procédure n’est pas limité aux brevets et aux publications imprimées, mais peut aussi comprendre des informations pertinentes non publiées. Les titulaires de brevets peuvent utiliser cette procédure pour corriger de fausses affirmations ou des présentations erronées, par exemple dans la description, dans les déclarations ou dans les réponses à des notifications officielles. 

La procédure d’examen supplémentaire suivra sensiblement la procédure de réexamen ex parte (cf. § 1), à quelques différences près. Elle entrera en vigueur à compter du 16 septembre 2012.

Dans le billet de demain:  redélivrance, dérivation, interférence et programme transitoire pour les méthodes d'affaires

Articles similaires :



1 comments:

Anonyme a dit…

La requête peut s’appuyer sur tout motif d’invalidité (sauf l’absence de description du meilleur mode de réalisation - best mode). En d’autres termes, le tiers peut contester la nouveauté, la non-évidence, la suffisance de description de l’invention ainsi que l’appartenance à une catégorie d’inventions brevetables.

Y-compris la clarté (35 USC 112, si je ne m'abuse)? Ceci pourrait être follement "amusant"; le législateur européen avait sagement exclu l'article 84 de la liste des motifs admissibles sous l'article 100 CBE, comme tout redoubleur à l'EEQ devrait le savoir. ;-)

Et quid de la matière ajoutée (35 USC 132)? Le législateur US a-t-il réfléchi au proverbial piège 123(2)/(3) CBE, ou la pratique actuelle sera-t-elle prorogée? Selon un auteur allemand [1], la matière ajoutée ne représenterait pas en pratique un grand inconvénient dans (l'ancien) régime US. (Je résume beaucoup). De plus, en cas de gros pépin elle peut toujours être reprise dans une demande CIP.

Je n'ai pas d'expérience pratique dans le droit US, alors je ne peux pas vraiment me prononcer.

Contrairement à la procédure d’opposition européenne, la partie qui est réellement intéressée dans cette Post Grant Review doit être identifiée.

Je ne comprends pas ce passage. En EP on doit pourtant aussi précisément identifier l'opposant, particulièrement dans le contexte de la transmission des intérêts dans une opposition et des recours. Voulez-vous dire par là que l'opposant dans la nouvelle loi doit démontrer qu'il ne porte pas un faux-nez et a des raisons immédiates de vouloir casser le brevet, un peu comme avec l'article 105 CBE?

[1] Benedict von Saint André: Das Dilemma der einschränkenden Erweiterung nach dem deutschenm europäischen, englischen und US-amerikanischen Patentrecht, Berlin Wissenschafts-Verlag, 2007

 
Le Blog du Droit Européen des Brevets Copyright Laurent Teyssèdre 2007-2022